Centenaire de la fin de la 1ère guerre mondiale : Les Présidents IBK et Emmanuel Macron inaugurent à Reims un monument en hommage aux soldats noirs tombés

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Les chefs d’Etat malien et français lors de la cérémonie d’inauguration du monument

A l’invitation du Président français, Emmanuel Macron, le Président de la République, IBK, séjourne en France du 5 au 11 novembre 2018 où il a participé aux commémorations du centenaire de l’armistice de 1918, le centenaire de la fin de la Première Guerre mondiale. Lors de ces commémorations du centenaire, un monument en hommage aux soldats noirs tombés au Champ d’Honneur durant la Première Guerre Mondiale a été inauguré officiellement à Reims, le mardi 6 novembre dernier, en présence des présidents Emmanuel Macron et Ibrahim Boubacar Kéïta. Précisons que le monument de Reims est un duplicata de celui de Bamako, en face du Ministère de l’Education nationale.

L’idée d’ériger un monument en hommage aux soldats noirs tombés au Champ d’Honneur a vu le jour dès la fin de la Première Guerre Mondiale. Ainsi, le Comité aux Héros de l’Armée Noire, créé en 1921, avait comme mission de faire ériger en France et en Afrique un monument à la mémoire des soldats africains morts pour la France au cours du conflit. Aussi, le financement a été assuré grâce aux souscriptions des communes de France et des Amis des Troupes noires françaises. Ce Comité a été placé sous la présidence du Général Louis Archinard, ancien commandant supérieur du Soudan Français, assisté du Général Marchand et de Blaise Diagne, député du Sénégal et ouvrier du recrutement en AOF.

Monuments jumeaux

Notons que l’idée de monuments jumeaux a été proposée dès la création du Comité en 1921. En Afrique, la ville de Bamako a été retenue pour rendre hommage aux soldats originaires de la colonie du Soudan français, et qui composaient la majorité du 1er corps d’Armée Coloniale. Ainsi, en métropole, la ville de Reims a été choisie car les soldats africains restaient dans les mémoires pour avoir défendu la ville pendant la guerre, et surtout en avril 1918, où pas moins de six bataillons de “Tirailleurs sénégalais” ont renforcé les troupes métropolitaines pour défendre la ville jusqu’au repli des forces germaniques.  Le 29 octobre 1922, le ministre de la Guerre, André Maginot, pose la première pierre du Monument aux Héros de l’Armée Noire à Reims. Quant au monument de Bamako, il a été inauguré le 3 janvier 1924 et celui de Reims le 13 juillet 1924, par Edouard Daladier, ministre des Colonies.

Les Nazis détruisent le monument de Reims

Pendant la seconde Guerre Mondiale, l’occupant allemand a fait descendre de son socle, le 10 septembre 1940, le monument de Reims et l’a fait disparaître. Il aurait été envoyé vers une destination inconnue, puis fondu. Il n’a jamais été retrouvé.

Au milieu des années 50, l’amicale des anciens coloniaux et marins de Reims sollicite l’appui du gouverneur général de l’AOF pour lancer une souscription visant à reconstruire le monument. Mais la municipalité renonce au projet de reconstruction à l’identique parce qu’elle craignait de rallumer les tensions entre anciens combattants des troupes coloniales et anciens combattants des régiments métropolitains, qui se disputent la gloire d’avoir sauvé Reims en 1918.

En pleine période de décolonisation, le monument est en effet jugé trop colonialiste et un nouveau Comité est constitué en 1961. A l’issue d’un concours ouvert aux élèves de l’Ecole régionale des Beaux-arts et des arts appliqués, le projet de Jean-Marie Maya-Perez est retenu. Le nouveau monument a été inauguré le 6 octobre 1963. Il est constitué de deux obélisques de 7 mètres de haut qui symbolisent l’union des combattants métropolitains et africains, érigés sur un bloc symbolisant la résistance de Reims et de ses défenseurs.

En 1994, lors de la commémoration du 50ème anniversaire du débarquement et de la libération de la Provence, l’association des amis du musée des troupes de marine finance la construction, à Fréjus, d’un nouveau monument à la gloire de l’Armée noire. Le monument, œuvre du sculpteur Léon Guidez, a été inauguré par François Léotard, alors ministre de la Défense et maire de Fréjus. Il s’agissait d’une réinterprétation contemporaine des monuments jumeaux de 1924.

Le monument de Bamako dupliqué

L’idée de faire renaître le Monument aux Héros de l’Armée Noire à Reims a été portée pendant de longues années par Cheikh Sakho, fondateur de l’Association pour la Réhabilitation du Monument aux Tirailleurs d’Afrique Noire (Armatan) en 2007, devenue en 2008 l’Association à la Mémoire de l’Armée Noire (Aman). Celle-ci rassemblait l’Etat, les collectivités territoriales et plusieurs mécènes, désireux de voir le monument reconstruit.

En 2006, une première mission de Reims est arrivée à Bamako pour étudier la faisabilité du projet. D’abord prévu pour 2007, en vue de la commémoration des 150 ans de la création du premier régiment de tirailleurs sénégalais par le Général Faidherbe en 1857, puis pour 2008 pour le 90ème anniversaire de la fin de la Grande Guerre, ce n’est qu’en 2012 que le projet porté par la Mairie de Reims et l’association Aman a été finalement lancé.

Et le concours artistique a été remporté par le sculpteur Jean-François Gavoty. En janvier 2013, une nouvelle mission est arrivée à Bamako pour prendre les mesures nécessaires sur le monument rescapé, en collaboration avec le Conservatoire des Arts et Métiers Multimédia Balla Fasséké Kouyaté de Bamako. Le monument a été finalement réinstallé à Reims, le 8 novembre 2013, sur un nouveau socle différent de celui de Bamako, plus contemporain et intégré à son nouvel environnement, dans le parc de Champagne. A ce titre, des objets sur le thème du monument, issus de travaux communs aux étudiants de Reims et de Bamako ont été incrustés dans le socle.

Un premier dépôt de gerbe fut organisé le 11 novembre 2013.

Pour le Général Jean-Marie Lemoine, ancien président de l’Aman : “Les monuments jumeaux sont le symbole de l’amitié franco-africaine, née des souffrances partagées dans les tranchées”.

Au Mali, les monuments des capitales militaires

Au Mali, le monument érigé sur la “Place des Ecoles”, devenue “Place André Maginot”, puis “Place de la Liberté” de nos jours, a longtemps servi de monument commémoratif pour les soldats morts au cours des deux guerres mondiales et des guerres de décolonisation. Des gerbes y étaient fréquemment déposées lors des cérémonies militaires.  Au cours des années 2000, la statue servait de modèle pour l’érection de monuments dans chaque capitale militaire du pays. Un bas-relief, reprenant l’effigie du monument, a été apposé en partie basse de chaque monument, haut de plusieurs mètres.

Le monument

Le monument est constitué de deux éléments à savoir le bronze, œuvre du sculpteur Paul Moreau-Vauthier, représente un groupe composé d’un poilu tenant le drapeau français, entouré de quatre soldats africains, symbolisant la fraternité dans l’effort de guerre. Quant au socle, œuvre de l’architecte Auguste Bluysen, il représente un petit fortin, surnommé “Tata” sur lequel sont gravés les noms des grandes batailles de 14-18 au cours desquelles se sont illustrés les tirailleurs.

Ce socle est taillé dans un granit africain. Plus tard, probablement après sa disparition survenue en 1932, un médaillon en hommage au Général Archinard est apposé sur la plaque commémorative scellée sur le socle. Ces médaillons ont disparu, mais un moulage est conservé au musée des troupes de marine à Fréjus. On y voit le profil du Général, entouré de l’inscription “un grand honneur dans ma vie est d’avoir commandé ces braves soldats”.

     Synthèse de Boubacar PAÏTAO

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