34ème anniversaire de la mort de Modibo Kéïta :Le crime parfait ?

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16 Mai 1977 – 16 Mai 2011, il y a 34 ans que le premier Président de la République du Mali mourait assassiné, de la manière la plus atroce.

"Je proclame ma foi en l’avenir de notre République. Cette foi, nous la partagerons tous, j’en suis convaincu, car il ne peut en être autrement quand il s’agit d’un peuple qui a su garder son calme et sa dignité en des heures où d’autres les auraient perdus, qui a donné des preuves éclatantes de la fermeté de son caractère, qui a affirmé avec force sa patrie et qui, s’il le fallait, n’hésiterait pas à offrir ce à quoi les hommes tiennent le plus, leur vie, pour que vive et prospère un Mali libre dans une Afrique unie…".

L’homme qui s’exprimait ainsi en 1961 devant le peuple malien, s’appelait Modibo Kéïta.

Grand patriote, il venait de bénéficier de la confiance de son peuple pour relever le pays des décombres d’une colonisation rapace qui aura mis à genoux l’économie Nationale, sapé les fondements de la Nation.

Hélas ! Seulement sept ans après, le 19 Novembre 1968, Modibo Kéïta, a été renversé par un coup d’Etat militaire dirigé par un lieutenant anonyme : Moussa Traoré.

Depuis, emprisonné dans des conditions les plus inhumaines, sans jugement et en contradiction flagrante avec les déclarations des nouveaux dirigeants, il n’en sortira que le 16 Mai 1977, mort, assassiné de la manière la plus atroce.

Ce jour en effet, le président Kéïta était transporté à l’hôpital du Point G, pris de violents malaises.

Le soldat qui le gardait, se précipitant pour demander de l’aide, se voyait interdire tout déplacement.

Quelque temps après, un communiqué de Radio Mali, annonçait la mort de "l’instituteur à la retraite, Modibo Kéîta".

Quelle autre interprétation, donner à l’absence de toute annonce officielle de la disparition subite du premier Président de la République du Mali ?.

"Espérait-on que son décès aurait pu passer inaperçu ?" s’interrogeait Pierre Morlet. Ce qui est plausible poursuivait-il, "c’est que, cette tentative peu reluisante, traduit pour l’essentiel, le désarroi d’une équipe déconsidérée".

En effet, la première tentative d’explication de la mort de Modibo, donnée pour cause d’intoxication alimentaire", était remplacée peu après, par un œdème pulmonaire".

Il fallait nier l’évidence : l’assassinat.

Et l’autopsie demandée par la famille, a été refusée. Chacun savait cependant que Modibo Kéïta avait été empoisonné.

Le Jeudi 19 Mai, date des obsèques, les écoles et les lycées étaient gardés, les élèves dans la rue. Tous voulaient emmener le corps de Modibo pour le rendre au Comité Militaire : "leur rendre leur mort".

Les élèves et étudiants sont venus dans la famille de Modibo. Ils ont cassé le cercueil et déchiré le linceuil pour voir son corps. Les élèves ont ensuite transporté le corps du Président assassiné jusqu’au cimetière de Hamdallaye et effectué l’enterrement.

Pourquoi GMT, avait-il mis Modibo Kéïta à mort ?

Pour sauvegarder un pouvoir menacé, car le 9 Mai 1977, s’était déroulé à Bamako, une manifestation des élèves et étudiants faisant suite à la grève au cours de laquelle, les manifestants réclamaient le retour au pouvoir de Modibo Kéïta, dont ils clamaient le nom.

Modibo Kéïta, même en prison, était devenu encombrant, et sa vie, une menace pour le régime militaire.

Par l’assassinat de Modibo Kéïta, Moussa Traoré et ses valets ont liquidé un espoir, celui qui a consacré sa vie à l’indépendance de sa patrie, à la grandeur et à la dignité de son peuple, sans jamais se renier.

Moussa Traoré a aussi mis fin par le meurtre de Modibo Kéïta, à une histoire d’une grande foi et d’un profond attachement réciproque, nourris comme dans un pacte de sang, par une fidélité émouvante des Jeunes, à celui qui reste à jamais le père de la jeunesse malienne.

En effet, un des premiers actes de confiance du Président Modibo Kéïta en la jeunesse dans l’action politique remonte à juillet 1950 à Bamako. Une initiative prise par les jeunes d’organiser un grand meeting populaire en faveur de l’appel de Stockholm contre la bombe A, s’était heurtée à la répression policière déclenchée par l’administration coloniale qui était alors féroce et faisait planer une atmosphère de terreur sur toutes les activités démocratiques, qu’elles soient politiques ou populaires.

Qu’à cela ne tienne, grâce à l’appui ferme du secrétaire général Modibo Kéita, le bureau politique du parti aida à l’organisation matérielle du meeting, lequel fut un très grand succès populaire. Le défi des jeunes face à la terreur coloniale consacra le ridicule du grand déploiement de son appareil policier et relança l’initiative et la hardiesse dans l’action politique de masses militantes du parti.

Cette confiance que le futur Président de la première République du Mali, mettait déjà en la jeunesse, prenait racine dans son expérience d’ancien leader de mouvement socio-culturel de la jeunesse soudanaise.

En effet, Modibo Kéita considérait la jeunesse comme "une période de la vie où l’homme est naturellement capable de grande générosité, naturellement ouvert aux idéaux de justice et d’égalité, bref, réceptif et sensible aux grandes valeurs morales, civiques et humanitaires. C’est plus que jamais l’âge de l’aptitude à les appliquer avec rigueur".

Aussi, considérait-il que la "jeunesse est une source permanente de renouveau de la société qu’il faut protéger de toute pollution et dont il faut soigner l’environnement".

D’ailleurs pendant ses dernières heures en tant que Président de la République alors qu’il était à bord du bateau général A. Soumaré, et, sachant qu’un groupe de militaires parjures avait pris le pouvoir, Modibo Kéita avait continué son voyage jusqu’au port de Koulikoro. Il avait encore quelque chose à dire au peuple malien et sa jeunesse : "Le Mali, ce n’est plus nous, ce n’est plus ceux qui ont pris le pouvoir aujourd’hui. Le Mali, c’est vous !".

La suite est connue : Modibo est passé, de la prison au… cimetière.

Aujourd’hui, "l’autre", mieux nanti que quiconque, se la coule douce… dans une superbe villa payée par le contribuable Malien. Il est toujours Général et même… "Président".

Boubacar Sankaré

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