26 mars : Évaporation du symbolisme

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Monument des Martyrs, Bamako

Devant l’impasse politique, compromettant gravement la vie et l’avenir du Mali, provoquée et entretenue par le refus catégorique du pouvoir de Moussa TRAORE, alors Président de la République et Secrétaire Général de l’Union Démocratique du Peuple Malien (UDPM) ; Parti-unique, d’adopter la forme du gouvernement correspondant aux aspirations profondes de l’heure du peuple malien dont la démocratie pluraliste, un groupe de militaires, dirigé par le Lieutenant-colonel Amadou Toumani TOURE, avait décidé, en parachevant ainsi les douloureux sacrifices consentis par le peuple dans la même perspective, de prendre le pouvoir par la force. C’était dans la nuit du 25 au 26 mars 1991. Analyse

Cette décision grave qui porta à la tête de l’Etat malien en transition le jeune officier supérieur, le Lieutenant-colonel Amadou Toumani TOURE, semblait à l’époque être l’unique solution capable de mettre fin à la crise. Elle avait été murie concomitamment avec le durcissement du régime en place contre la volonté générale.

Si le monde s’évertue à considérer ce coup de force comme étant plutôt une révolution, c’est-à-dire « un retour sur soi », c’est à cause du comportement honorable des militaires qui avaient tenu à leurs engagements envers le peuple.

En effet, après la prise du pouvoir, le lieutenant-colonel Amadou Toumani TOURE et ses compagnons s’étaient d’abord rendus à la Centrale Syndicale (UNTM) pour remettre le pouvoir aux acteurs politiques regroupés au sein du Mouvement Démocratique.

Sur la demande de ces acteurs politiques majeurs, les militaires avaient ensuite accepté de continuer avec eux en vue de s’assurer une transition politique apaisée et sécurisée qui devait permettre la consécration de la démocratie pluraliste notamment par l’adoption d’une nouvelle constitution qui avait été adoptée par le peuple le 25 Février 1992. C’est sous le fondement de celle-ci, que la mise en place des institutions de la République a été effectuée avec satisfaction de tous.

L’élection du Président Alpha O. KONARE le 08 juin 1992, marquait dès lors à la fois,  la fin de la IIème République et consacrait la naissance de la IIIème République du Mal. C’est après ce travail titanesque, sur l’initiative unilatérale du jeune Lieutenant-colonel ATT, que  les militaires avaient décidé de retourner dans les casernes.

Il faut cependant rappeler que la Conférence Nationale, instance suprême à l’époque, avait sollicité, devant certaines difficultés relatives à l’organisation des élections présidentielles, le maintien à la tête de l’Etat du lieutenant-colonel TOURE, très certainement du fait des qualités qu’il avait fait montre jusqu’ici  dans la fonction de Chef de l’Etat via CTSP, mais il déclina catégoriquement l’offre au nom de « son Serment d’Officier ».

Plus tard, il répondra aux journalistes de l’hebdomadaire « Jeune Afrique », au sujet de la proposition relative à son maintien au pouvoir, que dans le même contexte sociopolitique, il pendrait la même décision ; du fait que leur intervention dans la vie politique n’avait pas pour motivation de conserver ou de conquérir le pouvoir, mais de trouver une solution transitoire pour alléger la seule souffrance du peuple et pour restaurer la paix dans le pays.

Le processus démocratique ainsi emprunté et la conduite des militaires notamment celle du Président ATT en particulier avaient constitué essentiellement les critères qui apaisaient les morts et les victimes et qui donnaient également une dimension exceptionnelle à la démocratisation au Mali.

A partir du 26 mars 1991, aucun pouvoir ne pouvait plus régner en roi ; seul le peuple demeurerait toujours souverain. La constitution énonça à cet effet que « le fondement de tout pouvoir réside dans la présente constitution ». Il a été également installé comme principe de gouvernance, le respect obligatoire de  l’Etat de droit, des droits fondamentaux et des libertés publiques. La constitution consacra dès lors le juge constitutionnel comme le juge de la constitutionnalité des lois pour « garantir les droits fondamentaux de la personne humaine ainsi que des libertés publiques ».

Aussi, aucun pouvoir ne pourrait plus s’attaquer à la forme  républicaine de l’Etat au risque de se voir opposé la désobéissance civile, comme il a été indiqué dans la constitution.

Après 25 ans, il est important de se poser la question de savoir si cet esprit du 26 Mars 1991 sus-définit,  demeure toujours et de s’interroger comment le consolider aussi ?

Tout en laissant à chacun le soin et la liberté de méditer sur cette problématique, il est toutefois utile, en cette énième anniversaire, de s’interroger sur la présence au Mali et en toute liberté de celui qui avait menacé gravement la survie de notre nation et violé les libertés et les droits des maliens durant des années pendant que celui qui avait extirpé le peuple de ces nombreuses exactions criminelles se trouve contraint par des stratégies politiques à demeurer en dehors du territoire national ?

Comment peut-on prier le bon Dieu pour qu’il pleuve suffisamment et le supplier à la fois pour qu’il fasse que  les semences pourrissent ?

L’esprit du 26 Mars est en désaccord profond avec une telle situation. C’est la raison qui conduit à penser à l’évaporation du symbolisme du 26 Mars. Le Mali est pays qui a toujours abrité dans l’histoire des leaders africains combattant pour la liberté de leurs peuples, mais difficilement un dirigeant malien avait été contraint, par des manœuvres politiques, à l’exil.

En tout cas, qu’on le veuille ou non, qu’il soit au pays ou pas, le 26 Mars sera toujours cité dans l’histoire du Mali, comme un repère intangible et de dimension Nationale  et le Président Amadou Toumani TOURE  comme un acteur majeur incontestable de la démocratisation au Mali.

Il vaut mieux voir plus loin et plus grand qu’en nombre ; celui-ci est couramment trompeur surtout de nos jours. Que Dieu bénisse le Mali et les maliens ; Amen.

 

Siriman Wangara.

 

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