Spéculation foncière spectaculaire à Yorodjambougou : Affrontement imminent entre jeunes et autorités coutumières

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Morcèlements spectaculaires des rues vendues; les passages naturels des eaux d’écoulement ne sont pas épargnés, certaines routes, les places publiques et même les crêtes de la colline sont proposées au plus offrant à Yorodjambougou. La colère gronde, les habitants se mettent sur le pied de guerre.

 

Situé entre Yirimadjo – Ouest et Sirakoro Meguetana, le quartier de Yorodjambougou est partie intégrante de la commune de Kalaban-Coro (cercle de Kati). Les autorités coutumières et leurs complices ont systématiquement morcelé et vendu les rues, les passages naturels des eaux d’écoulement, certaines routes, les places publiques et même les crêtes de la colline. La vente du seul espace public (utilisé comme terrain de foot) a été la goutte d’eau qui a fait déborder le vase. Et la population du quartier, en l’occurrence les jeunes, plus mobilisés que jamais, s’opposent à la vente de cet espace et ne compte plus accepter les agissements des chefs coutumiers assistés techniquement par le Bureau d’études et d’application topographique (Beat), selon en tout cas, les habitants de ce quartier que nous avons rencontré.

 

Le quartier de Yorodjambougou est une émanation d’occupations spontanées communément appelé’’ Dougoutiguidi’’. Plusieurs habitants de toutes catégories socioprofessionnelles y vivent. Avec l’urbanisation sauvage, cette population s’est retrouvée vite confrontée à des défis majeurs dont l’insécurité et la précarité de leurs conditions de vie. Des familles et même certaines zones ont été déguerpies en plein jour, des habitations souvent démolies pour satisfaire aux velléités de spéculateurs munis de réquisitions douteuses. Pour pallier à ces fléaux, les chefs de familles en assemblée générale, se sont regroupés pour créer l’association ‘’Siguidalakana’’ afin de faire face au banditisme et aux spéculations de parcelles d’habitation qui coupent le sommeil des paisibles habitants. Pour donner un statut juridique à ce regroupement dont l’objectif majeur est la protection des personnes et des biens des 5 000 âmes que compte le quartier, une commission a été mise en place. Sa mission : faire bloc contre toutes tentatives de destruction, se battre contre la spéculation foncière et assurer la liaison de dialogue entre l’administration de Kati et les citoyens de Yorodjambougou.

 

 

La trahison de l’ancienne commission et les agissements du bureau d’études et application topographique (Beat)

 

Avec les investigations menées sur le terrain, votre journal, ‘’le Matin’’ a pu avoir un plan de la zone. Le constat est gravissime. Car, les rues, les passages naturels des eaux d’écoulement, certaines routes, les places publiques et même les crêtes de la colline sont systématiquement morcelés et vendus par les autorités coutumières de Sirakora ou leurs hommes de main. Ces derniers (spéculateurs) sont assistés techniquement dans leurs agissements par le géomètre Issa Oualogum du Beat.

 

Pour l’obtention d’un plan de lotissement fiable et reconnu de tous afin de défendre dignement leurs biens, 1400 familles ont payé chacun la somme de 25.000 F Cfa par parcelle pour couvrir les frais de redressement du quartier. A cet effet, des contacts ont été pris avec le préfet de Kati qui a mis à leur disposition le Bureau d’études et application topographique (Beat) agréé afin de procéder au redressement dudit quartier à hauteur de 9 millions de F Cfa (entièrement couvert par les fonds de l’association Siguidalakana). Depuis 2008 jusqu’à nos jours le Bureau Beat est sur le travail. Et le pire est qu’il n’a pas pu procurer les permis d’occuper à ces familles, ni faire un compte rendu d’achèvement des travaux conformément au contrat. La plupart des familles que nous avons contactées dénoncent la complicité de l’ancienne commission avec le géomètre Issa Ouologum du Beat. « Nous avons été trahies par l’ancienne commission, à laquelle, nous avons remis notre argent et qui est sensée défendre nos intérêts, mais rien du tout. Et quand nous avons renouvelé la commission, ces traîtres (les membres sortants de la commission : Ndlr) n’ont pas pu nous faire une restitution », a lancé un membre de la commission, sous couvert de l’anonymat. Un autre rétorque : « le Beat ne peut pas nous escroquer comme ça, nous n’allons plus rester les bras croisés, nous ferons tout pour obtenir nos permis d’occuper ».

 

Le seul espace vert hypothéqué !

En effet, il existait dans le quartier un espace vide qui n’avait pas fait l’objet de morcellement et qui servait de lieu de loisir à la jeunesse. La parcelle en question était supposée être la propreté de Coumba Dembaga. Après avoir mené des enquêtes approfondies et constaté que la parcelle en question n’a été attribuée à personne, la nouvelle commission de gestion du quartier a déposé une opposition afin de transformer, selon le plan, cet espace en lieu d’intérêt public (loisirs, réunions, lieu d’éducation physique et sportive Eps). C’est ainsi qu’elle (la commission) a saisi la justice et a gagné le procès contre Coumba Dembaga. Mais, la stupéfaction fut grande de constater que ce même espace a été morcelé sur le nouveau plan par le Beat sans le consentement de la population et contre les intérêts des habitants. Pis, le premier plan a disparu. « Malgré notre ferme volonté de trouver une solution aux problèmes d’intérêt public, nous nous sommes confrontés à la cupidité des autorités coutumières de Sirakoro qui se sont accaparées de tout l’espace en complicité avec le Beat », a martelé un membre de l’association dépassé par les agissements. « C’est vrai que nos possibilités ne sont pas au-dessus de celles des autorités traditionnelles qui ont vendu tout le quartier. Mais, ils ont devoir de mettre à notre disposition ce seul espace public surtout que le morcellement en question a été effectué par les fonds de l’association », a laissé entendre un autre membre.

 

Dans tous les cas, les autorités doivent intervenir rapidement pour trouver une solution, sinon un affrontement entre la population, les autorités coutumières et les éventuels acquéreurs des parcelles issues de cet espace serait imminent, au regard de la colère perceptible.

Aliou Touré

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