« Pour construction illégale », des centaines de maisons bâties dans la zone aéroportuaire de Bamako, capitale du Mali, ont été, courant jeudi 14 janvier 2021, démolies par les autorités transitoires. Événement suite auquel, une conférence de presse regroupant les victimes a été ainsi animée par les membres de la coordination des associations des déguerpis de Niamakoro-Diallobougou (C.A.D.N), un quartier sis dans ladite zone.
« Nous ne nous sommes pas illégalement installés ici. Certes nos maisons sont détruites, mais nous sommes décidés de rester. Nous saisirons la justice, et mènerons d’autres actions sans prendre ni armes ni fusils contre l’État »,se sont exprimés, dimanche 17 janvier 2021, les victimes de la zone aéroportuaire de Bamako.
« On vit avec ce problème depuis les années 1995. La première démolition de cet espace a eu lieu le 20 avril 1995.C’est suite à cela que les associations existantes à l’époque se sont réunies en un seul regroupement appelé coordination des associations des déguerpis de Niamakoro-Diallobougou », rappelle Amadou Cissé, président de la coordination. Dans un décret datant de 1995 signé par le président de la République et le gouvernement de l’époque, la zone aéroportuaire se limitait 8720 hectares. Quatre ans plus tard (en 1999), un autre décret limitant la zone à 7174 hectares est apparu, ajoute le président qui indique : « Depuis qu’on a vu ces différents décrets, on a su qu’il y avait une trahison dans l’affaire. Parce qu’avant la démolition de 1995, on avait appris que les autorités voulaient confier la gestion de cet endroit (Niamakoro-Diallobougou, un quartier sis dans cette zone aéroportuaire) à l’ACI ». En plus, un arrêté interministériel limitant la zone aéroportuaire à 4126 hectares est sorti en 2008, a-t-il rappelé.
Suite à un échange avec le chérif de Nioro qu’on avait aussi saisi du problème, l’ex-président IBK a instruit à Bou Touré, son chef de cabinet de l’époque, « à nous remettre, nous les victimes de la démolition de 1995 dans nos droits », dit M. Cissé.
« Après un rendez-vous qu’on a tenu à Koulouba avec le chef de cabinet Bou, celui-ci nous a envoyés chez Mohamed Ag Erlaf, l’ex-ministre de l’Administration territoriale. À son tour, rapporte le président, ce dernier nous a suggéré de lui adresser une demande que nous avons faite », fait savoir le conférencier.
Cette demande a été transmise par le ministre au maire du district Adama Sangaré qui nous a donné 800 lots alors que 4612 logements avaient été détruits lors de la démolition de 1995, a-t-il confié. Cet endroit fait partie de Niamakoro. Les déguerpis ont, selon lui, acheté leur terrain avec le chef du quartier. Cela, avant la démolition de 1995.Et de clarifier que toutes les victimes détiennent des documents livrés par Adama Sangaré, le maire du district de Bamako. Nous n’avons jamais cru que le gouvernement allait agir ainsi. La démolition du jeudi a été faite sans aucune lettre de préavis, dénonce Nanko Boubacar Samaké, porte-parole de la coordination. Quand le ministre en charge de cette affaire soulignait à la télé que les déguerpis de1995 ont été recasés, le porte-parole précise : « Je défie quiconque d’apporter la preuve ».
S’exprimant au nom des victimes, M. Samaké annonce haut et fort : « Nous ne nous sommes pas illégalement installés ici. Aucun gouvernement ne peut ignorer notre présence ici. Pour l’installation des gens, a-t-il dit, nous avions demandé 381 hectares au gouvernement de l’époque qui a dépêché une équipe technique pour les constats. Celle-ci a attesté que les gens peuvent s’installer sans problème ».D’après lui, une chose se doit d’être appréhendée par tous : « Nous (victimes) ne renoncerons jamais à cette lutte. Nous saisirons la justice, et mènerons d’autres actions jusqu’à ce que nous soyons mis dans nos droits. Certes nos maisons sont détruites, mais nous sommes décidés à rester ici. Mais nous ne prenons ni d’arme ni de fusil contre l’État », a-t-il extériorisé, soulignant que les gens continuent de passer des nuits avec leurs familles, en dépit de la démolition des maisons. Que l’État fasse ce qu’il peut, nous resterons ici jusqu’à ce qu’on soit mis dans notre droit, poursuivait le porte-voix qui ne cessait d’appeler les gens à leur rescousse. « Mon mari est décédé il y a trois mois et mes enfants n’ont pas grandi. Je demande aux autorités d’avoir pitié de nous, on est pauvre », plaide la veuve Fanta Doumbia.
Mamadou Diarra