L’on se rappelle bien. Avril 1995-avril 2015. Il y a 20 ans justes que des concessions des habitations du quartier Niamakoro en Commune VI du district étaient démolies. L’opération qui a duré 10 jours (du 20 au 30 avril 1995), a pris fin par la disparation de 4. 712 concessions, 30. 000 personnes se sont retrouvées dans la rue sans habitation, 16 établissements scolaires ont péri, 12 lieux de cultes aussi. Il y eut mort d’hommes, et beaucoup d’autres scènes de désolation.
Les autorités d’alors avaient expliqué leur geste par l’extension d’une zone aéroportuaire. L’espace « conquis » s’étendit à 8. 720 ha alors que pour l’extension de ladite Zone aéroportuaire on en demandait que 750, lequel espace est aujourd’hui utilisé à des fins utiles par l’ASECNA. On l’appelle « Aéroport international Bamako-Sénou »
Et le restant des terres ? Elles sont là ces terres d’une superficie d’environ de 3 km de long et 1,5 Km de large. Les déguerpis y veillent jour et nuit. L’Etat aussi.
Des terres intouchables
Ces déguerpis de la « zone aéroportuaire », n’ont pas encore dit adieu à leurs terres. Une coordination mise en place pour la cause, veille sur la protection de l’espace contre toute expropriation de la part de l’Etat. Lors d’une rencontre avec les hommes de médias dimanche dernier, cette coordination des déguerpis a notifié que la « zone aéroportuaire» est très convoité. Plusieurs tentatives, a-t-on expliqué, de mises en bail ont échoué.
Par ailleurs, et selon Oumar Konta, secrétaire général de la coordination des associations des déguerpis de Niamakoro, l’appellation de cet espace au nom de «Zone aéroportuaire » est comme celle de l’Azawad. Pour lui, il s’agit d’un nom imposé pour exproprier des citoyens de leurs terres : « s’il s’agit vraiment de la sécurité pourquoi y a-t-il des constructions aux alentours de la même zone », a-t-on martelé lors de cette rencontre avec les hommes de médias.
Evidemment, dans les contours de la zone dite aéroportuaire, se trouvent des bâtiments dont la direction de la météo. C’est ici que la première pierre de l’usine de raffinerie aurifère a été déposée lors de la transition par le président Dioncounta Traoré. Ces espaces, a-t-ton expliqué, ne sont pas inclus dans la zone réclamée par les déguerpis.
Les déguerpis réclament également leur recasement sur les 1626 hectares réduits, quatre ans plus tard des 8. 720 ha rasés par l’Etat. Dans un 2ème décret n°99-252P-RM du 15 Septembre, les autorités maliennes ont réduit 1626 ha des 8. 720 ha rasés tout en expliquant que l’espace annoncé pour les besoin avait été dépassé.
Ils ont cotisé pour la démolition de leurs concessions.
Les propriétaires des 4. 712 concessions démolies ont une double peine. Ils n’ont pas seulement perdus des maisons, mais ils ont financièrement contribué à leur démolition. Explications : après plusieurs mois de tiraillements entre le gouvernement d’alors et les propriétaires de concessions, ces derniers n’acceptèrent la démolition de leur maison que sous présentation d’une garantie. A savoir, un numéro d’identification leur permettant d’être recasés sur un autre site. Ces numéros d’identifications leur seront octroyés contre payement de la somme de 500 FCFA. 500 FCFA par 4. 712, mathématiquement, cela donne 2.356.000 FCFA. Ce fonds, aux dires des déguerpis, aurait été utilisé pour les moyens de locomotion employés dans la démolition. C’est-à-dire, le carburant des bulldozers qui ont fait le travail.
S’agissant du recasement, et toujours selon la coordination des déguerpis, environ 5.500 personnes ont eu la chance d’être recasées dans le site aujourd’hui appelé « Niamakorokourani ». Le restant des terres de ce site, accuse la coordination des déguerpis, a été utilisé à des fins inconnues. Tout de même « Niamakorokourani » est suffisamment peuplé aujourd’hui et s’avère l’un de ces quartiers les plus enviés à Bamako par l’architecture des constructions. Probablement « des hommes d’en haut » sont là, disons-nous.
Il convient de rappeler que les pouvoirs actuels sont les même qui ont concédé à la démolition des 4. 712, concessions en 1995. Le premier ministre du temps s’appelait M. Ibrahim Boubacar Keita. Aujourd’hui il est président de la République. La coordination des déguerpis lors de sa rencontre avec les hommes de médias ont vivement interpelé le chef de l’Etat à intervenir dans ce dossier dans lequel la justice s’est déclarée incompétente.
Djibi Karim