Le ministre de l’Urbanisme, de l’Habitat, des Domaines, de l’Aménagement du territoire et de la Population a présenté récemment en Conseil des ministres une communication verbale sur les nouvelles investigations entreprises. En plus des irrégularités constatées dans le processus de cession de ces édifices, une somme de 3,8 milliards de Fcfa devant être reversée à l’État par l’ACI, ne l’a jamais été
L’affaire dite «Vente des bâtiments administratifs» de Bamako est de nouveau devant la justice. Les citoyens continuent à réclamer que toute la lumière soit faite sur cette affaire qui défraye la chronique sur les réseaux sociaux. Dans les grins (lieux de causerie regroupant des personnes de la même génération), beaucoup y vont de leurs commentaires. De quoi s’agit-il ? Que s’est-il réellement passé ? Comment comprendre ce rebondissement ? À ce jour, quelles sont les diligences entreprises par le ministère de tutelle pour élucider cette affaire ?
Pour obtenir des réponses à ces questions, notre équipe de reportage s’est entretenue avec le ministre de l’Urbanisme, de l’Habitat, des Domaines, de l’Aménagement du territoire et de la Population. « Cette affaire a constitué une source de préoccupation des hautes autorités, dans la mesure où la lutte contre la corruption et l’impunité a été inscrite parmi les priorités et traduite de «façon éloquente» dans le Programme d’action gouvernemental (PAG). Lequel a imputé des actions à mon département », confie d’entrée de jeu Bréhima Kaména.
L’audit de la cession des bâtiments publics à Bamako figure au premier rang de ces actions, indique notre interlocuteur. Selon le ministre Kaména, c’est dans ce cadre que l’Inspection des domaines et des affaires foncières a été instruite de procéder à la vérification de la procédure de cession des bâtiments administratifs de Bamako. «C’est suivant le mandat n° 2013/001-MLAFU-SG du 25 juillet 2013, que le ministre du Logement, des Affaires foncières et de l’Urbanisme, a autorisé l’Agence de cessions immobilières (ACI), à vendre vingt deux bâtiments administratifs pour, avec le produit issu de ladite vente, construire de nouveaux immeubles en vue de reloger les services de l’État impactés», rappelle le ministre Kaména. La mesure participait également du souci d’embellissement de la ville de Bamako par la construction d’immeubles ultra modernes en vue d’abriter des services de l’État, explique-t-il.
ORDONNANCE DE NON-LIEU- Selon notre interlocuteur, dans le souci d’encadrer la vente des immeubles concernés et surtout d’assurer la transparence de la procédure de cession, le mandat dans certaines de ses dispositions a défini le mode de cession (le bail avec promesse de vente ou la vente aux enchères publiques). Il a également été exigé qu’il soit procédé à l’expertise préalable de tous les bâtiments avant leur cession, développe le ministre Bréhima Kaména.
C’est en vertu de ce mandat que l’ACI a enclenché la procédure de cession des bâtiments concernés en vendant dix-sept bâtiments sur un total de vingt-deux. Cependant, déplore-t-il, force a été de constater qu’après la vente des premiers bâtiments administratifs, une forte vague de critiques s’est faite jour au sein de l’opinion nationale. Motif : certains estimaient que des biens relevant du patrimoine immobilier de l’État semblaient avoir été bradés. Eu égard aux ressources limitées de notre pays, des citoyens ont pensé qu’il aurait été plus sage de conserver ces biens en les restaurant, rapporte notre interlocuteur.
Suite au tollé général qu’a suscité la vente de ces bâtiments, le Bureau du Vérificateur général, dans un premier temps, s’est saisi du dossier et a entrepris des investigations, souligne le ministre Kaména. Il ajoute que le rapport issu de la mission de contrôle a été remis aux autorités habilitées, dont le procureur du Tribunal de grande instance de la Commune III du District de Bamako, procureur du Pôle économique et financier.
Ainsi, suite à la saisine du procureur du Pôle économique et financier de Bamako, l’affaire a été judiciarisée, avec l’ouverture d’une enquête préliminaire par les enquêteurs de la Brigade spécialisée dudit Pôle. Le procès-verbal issu des investigations a été communiqué au procureur de la République du Pôle économique et financier de Bamako. Lequel a requis l’ouverture d’une information judiciaire. Faute d’éléments probants dans le dossier pouvant permettre le renvoi des mis en cause devant un tribunal, le juge d’instruction a rendu une ordonnance de non-lieu, révèle le ministre Bréhima Kaména.
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C’est ainsi que le premier dossier d’information judiciaire ouvert autour de l’affaire dite de la vente des bâtiments administratifs a connu son épilogue. Après la clôture de l’information judiciaire et suite à la persistance de forts soupçons de violation des clauses du mandat conféré à l’ACI, mais également dans le souci d’élucider l’affaire, le département de tutelle a instruit l’Inspection des domaines et des affaires foncières, d’entreprendre des investigations relativement à la procédure de cession des bâtiments administratifs. Le rapport de cette mission d’inspection a été transmis aux autorités habilitées, explique notre interlocuteur.
RÉOUVERTURE DU DOSSIER- «Des conclusions de la mission d’inspection, il est apparu, entre autres, que les bâtiments administratifs ont été cédés sans expertise, sans respecter la procédure de cession prévue dans le mandat, à savoir le bail avec promesse de vente, ou la vente aux enchères publiques», déplore le ministre Bréhima Kaména. Il a également été relevé que l’ACI a, de façon indue, procédé à des remboursements de dépôts versés par les premiers acquéreurs de certains bâtiments. Cela, en violation des prescriptions de la Convention de location accession qui stipule que : «Dans l’hypothèse où la non réalisation de la vente n’a d’autre cause que la seule convenance de l’accédant, cette non réalisation produit les conséquences suivantes : la caution ci-dessus visée ne lui sera pas restituée et est acquise à l’ACI. Seuls les autres versements effectifs lui sont restitués…»
Le ministre Kaména assure qu’il a également été relevé qu’une somme de 3,8 milliards de Fcfa devant être reversée à l’État par l’ACI au titre de la vente des bâtiments, ne l’a jamais été.
C’est au regard de ces nouveaux éléments que le ministre de l’Urbanisme, de l’Habitat, des Domaines, de l’Aménagement du territoire et de la Population a, par une communication verbale, informé le Conseil des ministres. Dans le souci de sauvegarder les intérêts de l’État, il a saisi son collègue de la Justice et des Droits de l’Homme, afin de solliciter son implication pour la réouverture du dossier d’information judiciaire.