Affaire Paul Leroux Traoré / Yahaya Sangaré: Quand la justice fait «valser» un plaignant jusqu’au vertige

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Décidément, on n’en finira jamais de pointer les contradictions de nos juridictions, surtout en matière de litiges fonciers. Il semble en effet que, dès que l’on porte un cas de ce genre devant un tribunal, afin que celui-ci dise le droit, l’on s’expose à vivre dans le stress et l’incertitude, quand ce n’est pas à subir toutes sortes d’intimidations, pour, finalement, risquer d’être dépossédé de ses biens. Le différend qui oppose Paul Leroux Traoré à l’Officier supérieur de Police Yahaya Sangaré en une belle illustration de la capacité de nos magistrats à vous faire «valser» jusqu’au vertige.

A priori, l’affaire qui nous intéresse aujourd’hui a l’air des plus simples. Mais chacun sait depuis La Fontaine que « Selon que vous serez puissant ou misérable…». Après avoir acheté à Salif Berthé, Avocat à la Cour, une concession rurale à Samalé, et acquis un titre foncier provisoire sur cette parcelle, Paul Henry Leroux Traoré se verra délivrer, le 15 février 2002 une immatriculation de celle-ci, sous le TF N°4041 du Cercle de Kati, Vol XXII Fol 57, et une vente administrative du terrain, suivant l’acte N°2002-167/MDEAF-DNDC-DRDC Koulikoro, moyennant 1 116 960FCFA (Payé et quittancé), pour une superficie de 4 ha 65 a 40 ca.

Le Titre Foncier 4041 sera ensuite diminué (pour reprendre la formule officielle) par Paul Leroux Traoré le 25 octobre 2007 au profit de Lassine Bouaré, Professeur d’enseignement supérieur, pour une superficie de 1 ha 07 a 56 ca qui se verra attribué par le Cercle de Kati le TF N°28430. Le premier document (TF 4041) est signé du Chef du Bureau des Domaines du Cercle de Kati, Magan Sidibé, Inspecteur des Impôts et le second, relatif à la diminution de la parcelle, de Mme Tandia Ilam Niang, Inspecteur des services Economiques.

Ajoutons que le cahier des charges en date du 13 août 1998, signé du Chef de la Circonscription administrative de Kati, le Commandant de Cercle Souleymane Diabaté, Chevalier de l’Ordre National, avait accordé la concession provisoire du terrain rural pour une durée de cinq ans à Paul Leroux Traoré, pour le mettre en valeur par la plantation d’arbres fruitiers, l’élevage, les cultures vivrières et la construction de maisons d’habitation.

Tout allait donc pour le mieux dans le meilleur des mondes, jusqu’au jour où l’Officier supérieur de Police Yahaya Sangaré, en 2010, ne prétende être le propriétaire de la parcelle et ne décide d’y entreprendre des travaux de labour et de construction. Paul Leroux Traoré fera constater les faits par Huissier et commencera les démarches afin de faire valoir ses droits sur le terrain.

Le Titre Foncier produit par M. Sangaré étant le N°10 617 du 24 février 2004, le Directeur régional des Domaines et du Cadastre de la Région de Koulikoro, Amadou Doumbia, Ingénieur des Construction civiles, informera l’Officier supérieur de police, après vérification, que par sa «Décision N°10-0001/DNDC-DRDC-KKRO en date du 8 juillet 2010, il a été procédé à l’annulation de l’acte administratif N°10-0360/MLAFU-DNDC-DRDC du 18 juin 2010 portant cession, à votre profit, de la parcelle de terrain d’une superficie de 04 hectares 56 ares 76 centiares sise à Samalé, Commune rurale de Kalaban Coro (Cercle de Kati), objet du Titre Foncier N°10 617 de Kati».

Par ce courrier, l’autorité en charge du cadastre à Koulikoro appliquait la règle habituellement en usage lorsque ce genre de double «propriété» se présente, celle de la prééminence du document le plus ancien. Paul Traoré Leroux pensait en avoir définitivement fini avec ce problème, mais c’était sans compter avec la pugnacité de son concurrent et, il faut le dire, les revirements inexplicables (pour ne pas dire les voltes-faces commanditées, d’une manière ou d’une autre, de certains de nos magistrats). En première instance, le Tribunal de Kati sous la présidence de Mohamed A. Maiga, ordonnera l’arrêt des travaux entrepris par Sangaré, sous astreinte de 250 000 FCFA par jour. Ensuite, le Tribunal administratif de Bamako, par le jugement N°540 du 09 décembre 2010 remettra Paul Leroux Traoré dans ses droits de propriétaire de la parcelle.

Mais, au Mali, pour peu que vous soyez bien introduit, avec les bons amis aux bonnes places et, pourquoi pas, des moyens pour « graisser » les rouages quand ils coincent, rien n’est impossible. Formulant un recours pour excès de pouvoir en appel, Yahaya Sangaré, fort chanceux très certainement, verra la Section Administrative de la Cour Suprême, par l’arrêt N°260 du 11 novembre 2011, infirmer le jugement du Tribunal administratif de Bamako du 9 décembre 2010 et même, tenez-vous bien,  annuler la décision du Directeur Régional des Domaines et du Cadastre de Koulikoro de juillet 2010 ainsi que l’acte administratif N°2002-167/MDEAF-DNDC-DRDC.

Tout cela au bénéfice d’actes qui ont tous été établis entre le 14 et le 30 juillet 2003, soit en violation flagrante de la célébrissime Lettre Circulaire N°1351/MATCL-SG du 2 juillet 2003, adressée a tous les Hauts Commissaires de Régions et du District de Bamako, tous Préfets, tous Sous-Préfets et tous Maires de Communes. Ce courrier du Général de Division Kafougouna Koné, Commandeur de l’Ordre National, demandait à ces destinataires «de bien vouloir surseoir jusqu’à nouvel ordre à toute attribution des terrains du domaine privé immobilier de l’Etat» et prenait effet «pour compter de sa date de signature». La Loi est dure, mais c’est la Loi, dit-on. Cela est valable quand elle est appliquée de manière impartiale et équitable, ce qui n’est pas toujours le cas sous nos cieux. Paul Leroux Traoré ne savait pas qu’il n’en était encore qu’au premier pas de sa valse judiciaire! A suivre.

Ramata Diaouré

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1 commentaire

  1. Condoléances, à Adam THIAM pour la disparition de sa maman, Condoléances à toute la rédaction du Républicain. Que Dieu accueille Maman au Paradis.

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