Les faits reprochés à l’élu communal, seraient sans fondement ? Serait-il, victime d’un complot politique ? En tout cas, ce qui reste évident est que l’homme n’est pas en odeur de sainteté avec des têtes couronnés, telles que le célébrissime opérateur économique, Diadié Bah, le préfet de Niono de l’époque Seydou Traoré, (actuellement en fonction à Teninkou ndlr) et le 1er adjoint au maire, Abdramane Touré. Enquête !
C’est inimaginable, pardon paradoxal, qu’un prisonnier supposé être impliqué dans une affaire de malversations et d’abus de confiance soit accueilli avec autant de ferveur par une foule aussi immense qu’émerveillée, après sa libération. Il s’agit du maire, de la Commune urbaine de Niono, Moriba Coulibaly, celui là même, dont la commune a été classée 1ère du cercle et de la région en recouvrement de recettes avec un résultat de plus 80% au titre de l’année 2014. Accusé à l’approche des élections municipales à venir (devinez le pourquoi) de morcellement et de vente d’une parcelle de plus de 56,5 hectares (et non 48 hectares comme rapporté par certaine presse ndlr), qui pourtant a été attribuée à la mairie de la commune urbaine de Niono par l’Office du Niger, le maire Moriba Coulibaly, après sa libération, le mardi 17 mars dernier, a été accueilli par une foule immense, qui l’a escorté de Markala jusqu’à son domicile à Niono.
« Tièn de bi laban (tôt ou tard la vérité triomphera) », pouvait-on lire sur certaines banderoles, confectionnées pour la cause. Histoire pour les populations de Niono, de clamer l’innocence de leur maire, Moriba Coulibaly. Mais aussi, de mettre à nu la cabale dont il fait l’objet.
En effet, le dossier qui fait l’effet d’une bombe, dans la ville rizicole de Niono, et qui défraie la chronique, est relatif à la parcelle de terrain d’une superficie de 56,5 hectares, dont 48ha situés entre le village de N’Golobala et la route goudronné RR23 et 8,5 ha de vergers situés au Nord du collège ATT de Niono. Propriété de l’office du Niger, selon nos investigations, l’espace avait été cédé dans un premier temps aux maraîchers, avant d’être attribué à la mairie de Niono, par l’Office du Niger, pour être morcelé.
La foi de la direction régionale de l’Urbanisme et l’accord du gouverneur de Ségou !
« …après accord pour attribution du Président Directeur Général de l’Office du Niger repartie en deux lots permettant la gestion des problèmes d’inondation et d’extension de la ville de Niono, soit : 48ha entre le village de N’Golobala et la route goudronnée RR23 et 8,5ha de vergers au Nord du collège ATT de Niono. De nos investigations il ressort que la parcelle est située dans la zone couverte par le schéma directeur d’urbanisme de la ville de Niono et environs, approuvé le 15 novembre 2001. Elle est située dans la zone réservée à l’habitat. En conséquenc, j’ai l’honneur de vous (maire de Niono ndlr) accorder l’autorisation préalable de lotir ladite parcelle et pour laquelle le Président Directeur Général de l’Office du Niger vous a donné son accord par la lettre n°00124/PDG-ON du 19 septembre 2011 », ainsi peut-on, lire dans la lettre N°286 datée du 11 octobre 2012, signé par le directeur régional de l’Urbanisme et de l’Habitat de Ségou, Alfousseini Diarra, adressée au maire de la commune urbaine de Niono, Moriba Coulibaly.
Laquelle autorisation de la Direction Régionale de l’Urbanisme et de l’Habitat de Ségou, qui sera suivie d’une autorisation définitive de lotissement de ladite parcelle accordée à la mairie de Niono par le gouverneur de la région de Ségou, Thierno Boubacar Cissé. « Une autorisation définitive de lotissement des TF 186, 187, 188, et 189 sis à N’Golobala en Commune urbaine de Niono est accordé à monsieur le maire de Niono pour usage d’habitation », indique l’arrêté N°0717, daté du 7 août 2013 signé par le Gouverneur de Ségou, Thierno Boubacar Cissé.
Toute chose qui donne le droit au maire de Niono de procéder au morcellement de ladite parcelle conformément au cahier de charges.
Une arrestation sur fond de complot politique ?
Le maire Moriba Coulibaly serait-il, victime d’un complot politique ? Il n’est pas interdit d’avoir des doutes ! Car, interrogés, plusieurs observateurs de la scène politique à Niono, répondent que le moment choisi pour incarcérer, le maire Moriba Coulibaly, à savoir la date du 12 mars, le disqualifiait, ipso facto de la course pour les élections communales qui étaient initialement prévues au mois d’Avril avant d’être reportées à une date ultérieure.
« J’ai été convoqué le 4 mars, et lorsque je me suis rendu au pôle économique, le juge d’instruction, Broulaye Keïta m’a fait savoir que je serai jugé le 12mars. Je lui ai demandé que je serai jugé pour avoir fait quoi ? et que si je dois être jugé je préfère que le jugement soit fait avant ou après la date du 12 mars qui était la date de clôture des dépôts de candidature pour les élections municipales, avant le report. Le juge m’a répondu par la suite qu’il s’en fout et que sa décision est irrévocable. Je lui ai répondu que je m’en remets à Dieu», nous confie l’édile, inculpé. Qui poursuit en ajoutant: « Quand je me suis présenté au juge le 12 mars, il m’a dit en ces termes : Vous êtes M. Moriba Coulibaly ? Je réponds : Oui. Il dit vous êtes le fils de Bala Coulibaly ? Je réponds : Oui. Il dit : vous êtes inculpé de malversations et d’abus de confiance de 2007, 2008, 2009, 2010, 2011, 2013 à 2014. Je lui ai répondu, que je n’étais pas encore maire en 2007, 2008 et jusqu’en juillet 2009 , dans ce cas, ce qu’il me reproche n’est pas fondé. Il me demande, si j’ai d’autres choses à dire ? Je lui dis oui. Par ce que, une chose est d’accuser quelqu’un mais une autre est de le faire savoir les fautes qui lui sont reprochées, et demander ensuite s’il les reconnaît ou pas. Mais le juge ne m’a pas demandé si je reconnais les faits ou pas, il n’a pas fait de PV (Procès Verbal), il n’y a pas eu d’audition. Il fait juste un mandat de dépôt pour m’envoyer à la prison centrale d’arrêt de Bamako», s’est-il, indigné. Et de poursuivre en ces termes : « …avant de m’envoyer à la maison centrale d’arrêt de Bamako, le juge m’a dit : M. le maire est ce que vous pouvez appeler votre 1er adjoint Touré. Surpris, je lui ai répondu, qu’il peut avoir besoin d’un de mes conseillers, ou de mon adjoint, mais pas le 1er adjoint, qui est chargé des questions de l’administration ».
Le 1er adjoint dont il s’agit s’appelle Abdramane Touré. Et l’étonnement du maire, Moriba Coulibaly se justifie, au motif que, le juge d’instruction, Broulaye Keïta ait pu savoir le nom du 1er adjoint Abdramane Touré, qui selon nos investigations, serait du même parti, ADP-Maliba, que le célébrissime opérateur économique Diadié Bah qui tirerait les ficelles pour abattre à visage découvert le maire en place, Moriba Coulibaly qui est du parti RPM. Et de surcroit, à l’en croire celui-ci serait du même village que le juge d’instruction Kéita, à savoir le cercle de Goudam.
Les mises au point sur la procédure !
Contre cette argumentation du maire de Niono sur les conditions, jugées obscures de son inculpation, nos investigations nous ont permis de saisir l’avis d’un juriste chevronné. Lequel sans détour, a battu en brèche les propos du maire Coulibaly. A l’en croire, au regard des explications fournies par le maire de Niono pour décrier ses conditions d’inculpation au niveau du pôle économique, il n’y existe aucune vice de forme. A cet effet, il estime que le juge d’instruction Kéita a agi au respect des articles 144, 155 et 156 du code de procédure pénale au Mali. De façon sommaire, il dira que le maire a bénéficié d’une libération conditionnelle, d’autant plus que tout le monde bénéficie d’une présomption d’innocence avant son jugement déclaratif. Que ce type de libération est dit libération sous cautionnement. Qui intervient après paiement d’une caution au greffe. Qu’au vu du récépissé de paiement le Procureur doit mettre la personne en liberté.
Aussi que devant le juge d’instruction, on est soumis à la première comparution à l’interrogatoire d’identité, qui exige au juge à se limiter aux questions d’identité seulement, sans entrer dans le fond du dossier. A la suite de laquelle, le juge peut dire : « vous êtes inculpé pour tels faits ». Qu’il lui appartient soit de mettre l’inculpé sous contrôle judiciaire où le mettre sous mandat de dépôt (le cas du maire de Niono). Et pourquoi le juge a choisi de mettre le maire Coulibaly à l’approche des élections municipales (reportées d’ailleurs) ?
« Le maire n’a pas à choisir ni imposer son jour d’inculpation au juge d’instruction. Qui est seul habilité après avoir reçu le dossier à se donner une date pour l’interrogatoire d’identité et de cette même manière il fixe la date de l’interrogatoire de fond. Entre temps, il se donne un délai raisonnable pour mieux étudier le dossier » a expliqué notre interlocuteur.
Sur les 41 maraîchers qui occupaient ladite parcelle, 38 ont été compensées contre 3 qui se dressent contre l’autorité régionale et communale.
« Il n’y a pas de coopératives de maraîchers qui se plaignent, mais plutôt trois individus manipulés, par certaines personnes », nous confie une source. La même source nous indique qu’en guise de compensation 38 des 41 maraîchers qui occupaient l’espace en question, ont reçu chacun deux parcelles sur chaque 1hectare. Et que seulement trois ont refusé de se plier aux règles. Une information qui nous a été confirmée par des responsables de la mairie.
« Pour ces genres de situation, d’habitude la compensation est d’une parcelle sur chaque hectare, mais exceptionnellement cette fois-ci, nous avons décidé de donner deux parcelles à l’hectare », révèle le maire, Moriba Coulibaly, qui déclare que les trois individus sont manipulés par certaines personnes qui dit-il, leur ont promis de récupérer leurs terres, contre la décision du gouvernorat de Ségou, de l’Office du Niger, de la Direction Régionale de l’Urbanisme et de l’Habitat de Ségou et de la mairie de Niono.
Les mises en garde du Directeur Général de l’Office du Niger de l’époque contre le préfet, Seydou Traoré actuellement en fonction dans le cercle de Teninkou.
Sur les 48 hectares situés entre le village de N’Golobala et la route goudronnée RR 23, selon nos investigations, le préfet de Niono à l’époque, Seydou Traoré, actuellement préfet de Teninkou aurait grignoté environ six hectares. Et ce, bien que le lotissement et la vente des 56,5 ha, propriétés de l’Office du Niger ait été octroyé à la mairie, chargée du lotissement et de la vente des parcelles conformément au cahier de charges de l’Office du Niger et à l’arrêté N°0717 du gouvernorat de Ségou.
« Lors des missions classiques de supervision de mes services techniques dans la zone de Niono, il m’a été rapporté la présence de bornages aux abords immédiats des locaux du cercle de Niono. Il ma plait de rappeler que le domaine concerné est un titre foncier sous la gérance de l’Office du Niger et enregistré dans les livres du domaine de l’Etat sous le numéro 336. Face à cette situation, je vous saurai gré des dispositions utiles que vous voudrez bien faire prendre pour circonscrire une quelconque spéculation foncière à ce niveau», ainsi mettait en garde, le Président Directeur Général d’alors de l’Office du Niger, Seydou Idrissa Traoré, à son homonyme préfet de Niono à l’époque, Seydou Traoré.
Que les faits reprochés au maire Moriba Coulibaly, soient vrais ou faux, une chose est sûre, l’élu jouit d’un soutien conséquent de sa population. Une légitimité qu’on veut certainement mettre en branle par une manœuvre politico-judiciaire.
Affaire à suivre !
Lassina NIANGALY
Envoyé spécial à Niono