Les marchés sont bien achalandés, les prix restent raisonnables. Mais la liste des achats est longue.
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rnLe triptyque fait des ravages depuis plusieurs années et il ne nous épargnera pas cette fois-ci non plus. L”enchaînement dans un très court laps de temps de trois fêtes majeures – Tabaski, Noël et Saint Sylvestre – met à rude épreuve les budgets des ménages. Les chefs de famille ne savent plus très bien où donner de la tête, tant s”empilent les dépenses incompressibles qui vont des vêtements neufs au mouton de la fête. Impossible cependant de se soustraire à la saignée des porte-monnaies, car la fièvre des évènements monte de manière irrépressible et vous amène bon gré, mal gré dans les magasins ou devant les étals.
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rnLes commerçants, que nous avons rencontrés, délivrent un diagnostic unanime : le marché est bien achalandé, les prix sont relativement raisonnables, mais les ventes n”ont pas encore vraiment décollé. Une chose est certaine, l”affluence ne faiblit pas. Que ce soit au Grand marché de Bamako et dans ses rues adjacentes, à la Foire exposition de Bamako, dans les petits marchés de quartiers, la marée humaine est au rendez-vous. Chacun avec ses goûts et ses besoins. Les plus petits cherchent habits à leur taille et chaussures à leur pied. Les femmes, elles, voltigent entre les multiples variétés de bazins et de tissus à la mode venant de Doubaï. Les très jeunes filles envahissent les boutiques de "prêt-à-porter" pour négocier robes, jupes et autres "bodies" en vogue comme les “Corsaires”. Ces parures sont très prisées par les adeptes de la "griffe-mania" et des "m”as-tu vu".
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rnLes vendeurs qui sentent bien l”embarras financier des acheteurs potentiels ne lésinent sur rien pour créer une ambiance festive, propice à l”achat "coup de coeur". Ingrédient indispensable à la mise en condition des client(e)s, l”animation varie d”un lieu à l”autre. Dans les boutiques de bazin, dominent les morceaux mandingues très prisés d”une gent féminine qui a dépassé le stade de l”adolescence. Chez les vendeurs d’habits pour jeunes, le "coupé-décalé" et le "séka-séka" tiennent le haut du pavé. Avec un attrait prononcé pour le morceau “Grippe Aviaire”, très prisé des jeunes branchés. Quant aux étalagistes, ils font battre le tam-tam. Certains marchands pour retenir plus longtemps la clientèle ont embauché des danseurs du "Bobaraba" qui fait fureur actuellement parmi les jeunes.
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rnFait rarissime – Au milieu de ce tintamarre, deux types d”individus gardent l”oeil particulièrement vigilant. D”abord, les intermédiaires (les fameux "coxeurs") habiles à décèler le client hésitant et prompts à ui proposer une "affaire" impossible à laisser passer. Ensuite, les voleurs qui savent qu”il y a toujours moyen de tirer profit de cette incroyable cohue. Mais qui ne se font pas trop d”illusion sur le sort qui les attend si jamais ils étaient pris sur le vif. Le produit le plus abondant sur tous les marchés est certainement le bazin. Il remplit les étagères des boutiques et des échoppes, déborde des pousse-pousse stationnés au bord des rues et s”empilent sur la tête des vendeuses ambulantes. Ce tissu si prisé provient dans ses variétés haut de gamme de Hollande, d”Autriche, d”Allemagne et du Danemark. Lorsqu”il est dit "moins riche", il nous arrive surtout de Chine et d’autres pays asiatiques. Au premier coup d”oeil, on se rend que son pouvoir d”attraction est intact.
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rnLes boutiques de Gagny Lah, le plus grand fournisseur de bazin du Grand marché, sont en effet littéralement prises d’assaut par les femmes. La première qualité, appelée "bazin riche", se vend entre 4500 et 5500 Fcfa le mètre. Le "moins riche" coûte de 1000 à 2000 Fcfa le mètre. La deuxième qualité se situe entre 600 et 1000 Fcfa le mètre. Un nouveau tissu léger a fait une percée sur le marché à l”occasion de la présente fête. Il s”agit de "Bamako Joliden" en provenance de Chine et dont le mètre coûte seulement 200 Fcfa.
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rnFait rarissime et qui mérite qu”on le souligne, les "Halles de Bamako" qui en temps normal peinent à s”assurer une fréquentation honnête enregistrent ces jours-ci une belle affluence. Et certains y trouvent leur bonheur comme le jeune commerçant Boubou Bocoum, qui s”est spécialisé dans les vêtements pour jeunes filles. Avec un large sourire (ce qui n”est pas le cas de tous ses collègues de la zone), il accueille les visiteuses qui se pressent devant son stand. Les raisons de cet engouement ? "J’ai importé de nouveaux modèles de robes et de jupes en vogue aux Etas-Unis, explique Bocoum, et j”essaie d”être raisonnable sur les prix. On peut acquérir une robe ou un "couplé "chemise et jupe entre 6000 et 15 000 Fcfa".
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rnAutre homme heureux, le vieux Mamoutou Gassama, vendeur d’habits pour enfants, qui se réjouit de l’affluence de cette année dans ce marché, longtemps délaissé au profit du Marché Rose. "Comme vous le constatez, explique-il, les clients sont là en nombre. Lui aussi affirme avoir joué sur l”accessibilité financière de ses produits, avec comme ambition première liquider tout son stock. Une tenue pour jeune garçon de 6 à 12 ans se négocie selon les modèles à 5000, 4000 et même 3000 Fcfa. La robe pour fille de la même tranche d”âge coûte entre 1500 et 6000 Fcfa. La vie a appris au vieux Gassama à être réaliste. Il sait qu”entre la rentrée scolaire, le Ramadan et les fêtes, les mois derniers ont été dispendieux pour les chefs de famille. Alors, il compatit à leur situation. "Je suis moi-même père de famille. Je fais mon possible pour que mes articles soient accessibles à tous les parents", indique-t-il.
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rnL”insouciante Kadi – Le souci de Gassama est louable. Mais il faut bien reconnaître que tous les acheteurs ne sont pas égaux devant la fête. Cheick peut en témoigner. Il s”est spécialisé dans la vente des tissus "princiers" venus de Doubaï et qui connaissent une belle vogue depuis déjà deux ans. Mais ne les achète pas qui veut. Le prix des tissus "Princesse d’Arabie" ou "Première Dame" ont de quoi refroidir celles qui se jettent dessus sans précautions. Pour confectionner un boubou dans la première qualité, il faut débourser jusqu”à 300 000 Fcfa. De 50 000 à 100 000 Fcfa sont nécessaires pour un vêtement taillé dans la qualité inférieure. Mais Cheick nous assure que les affaires sont bonnes et que ses produits n”ont aucun problème à trouver prenneur.
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rnEn fait, cette année, les commerçants se sont montrés globalement raisonnables et l
es acheteurs en conviennent. Comme cette mère de famille, Mme Cissé Maïmouna Traoré, pour qui les habits sont cédés à très bon prix. Notre dame met plutôt en cause l”enchaînement des fêtes qui a mis à mal les porte-monnaie. "C’est vraiment dur. Si on doit acheter le mouton, payer le riz, les condiments et les habits pour les enfants et les femmes… Que Dieu nous sauve. C”est très dur", s”exclame un père de famille qui appelle les femmes à faire preuve de compréhension et de tolérance à l”endroit des époux éprouvés.
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rnComme toujours, il y a ceux qui geignent et ceux qui rient. L”étudiante Kadi appartient à la seconde catégorie et semble à mille lieues des soucis du consommateur moyen. “Le 31 décembre se fêtera avec éclat”, annonce-t-elle avec un large sourire. Insouciante, elle se réjouit de la coïncidence des deux fêtes. L”occasion est belle, affirme-t-elle, pour renouveler sa garde-robe. Kadi n”a certainement pas les mêmes problèmes que les jeunes filles dont les petits amis ont disparu de la circulation depuis belle lurette. Faute de pouvoir assumer les factures qu”on leur a fait miroiter.
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rnDoussou DJIRÉ
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