Les "Bamakoises" savent se tirer d’affaire à l’approche du réveillon. À chacune sa recette.
Les jeunes maliennes, surtout les citadines, rivalisent d’ingéniosité pour s’adapter à la conjoncture économique difficile et préparer leur fête de fin d’année à hauteur de souhait. Elles sont pragmatiques et sans état d’âme. Elles révèlent une conscience aiguë de leurs intérêts.
Nous avons taquiné quelques-unes sur la question. Elles ont accepté de nous dévoiler leurs recettes. Beaucoup de nos lecteurs, en suivant les pérégrinations des jeunes filles dites "les Bamakoises", ne seront sûrement pas étonnés, car chacun connaît où a connu une histoire de ce genre. Le 31 décembre à Bamako, c’est une soirée de rire, de défoulement qui mérite vraiment d’être vécu. Cet événement est riche en enseignements.
Les filles, dès la fin du mois de novembre, commencent à se soucier de la nuit du 31 décembre, la nuit de tous les abus. Elles font appel à leur génie créateur. Tous les hommes qui portent des yeux doux sur elles sont les bienvenus. Malheur à celui qui franchit le pas, car il se jette alors dans la gueule du loup ou plutôt de la louve. C’est le moment où le trio magique entre en jeu. Les trois "C" désignent les trois galants que la belle se choisit parmi les prétendants qui soupirent après elle. Le "chic", le "choc" et le "chèque" qualifient chacun selon le service qu’il doit rendre à l’élégante Fanta ou Awa. Faisons un petit décryptage de cette formule pour les non initiés.
LES TROIS "C" AU RENDEZ-VOUS :
Le "chèque", c’est cet homme disposant d’une large surface financière. Il joue le rôle d’argentier et alimente le portefeuille de la jeune fille. Elle lui soumet les problèmes et il met, sans difficulté, les fonds à disposition. Généralement, c’est un homme âgé et amateur de chair tendre. Cette faiblesse lui interdit de s’opposer aux caprices de sa "chérie" et pour garder l’amour de cette dernière, il ne lui refuse rien. Mais il reste le plus souvent dans l’ombre. Le haut rang social ou ses hautes fonctions dans l’administration font de lui quelqu’un qui ne peut pas s’afficher en galante compagnie. Parfois un vieux et riche commerçant joue le rôle du "chèque". Pendant cette période, ces hommes sont les plus sollicités.
Tel n’est pas le cas pour le chic. Ce dernier est habituellement assez bel homme, bien habillé, beau parleur et présentable. Il occupe une position sociale assez élevée qui lui confère une certaine aisance matérielle. Toutes ces qualités ne sont pas demandées au choc. Il est l’élu du cœur, le bien-aimé, dont les besoins sont souvent financés par l’argent des deux premiers pigeons. Il reçoit tout de sa copine pour supporter toutes les comparaisons parmi les plus beaux couples dans les soirées de réveillon durant la nuit du "31".
La jolie Hawa N’Diaye est une étudiante. Elle promet une belle fête cette année à l’élu de son cœur, lui aussi étudiant. "Il n’y a pas de remords à fracasser la tête de l’animal qui vous supplie de l’achever" dit-elle. "Les vieux veulent la compagnie de jeunes filles fraîches. Alors ils doivent débourser des frais conséquents" ajoute cette fille cynique. La soirée du "31" est la plus grande des fêtes dans la tête des "Bamakoises" adolescents ou jeunes femmes. Nous la fêtons dans toute sa splendeur", avance la belle Hawa. Cette étudiante donne raison aux jeunes filles matérialistes. Elle qualifie le "31 décembre" de championnat de course de haie. Si tu n’es pas audacieuse, tu signes forfait".
Mami-Jolie, une élégante fille rencontrée aux abords du grand marché de Bamako, avoue fièrement qu’elle sort actuellement avec 4 hommes différents. Mais comment arrivera-t-elle à se tirer d’affaires avec "ses quatre hommes" la nuit du 31 Décembre ? "Qui t’a dit que je vais sortir avec les quatre", a-t-elle répondu sèchement. L’experte en séduction masculine dans un rire de gorge d’autosatisfaction exprime le peu de considération qu’elle accorde aux séducteurs." Je leur soutire de l’argent avant la fête en faisant croire à chacun qu’il est le préféré, l’élu de mon cœur. Vous savez les coureurs de jupons sont tellement crédules. Ils me mangent tous dans la main. Il suffit que j’adapte mes arguments en fonction de mes interlocuteurs". Elle n’en dit pas plus sur ses arguments. Mais Mami-Jolie chuchote avoir déjà choisi son cavalier. Pressée, elle s’engouffre dans le marché à la recherche de la tenue de la soirée.
PAS SEULEMENT LES JEUNES FILLES :
Les jeunes filles ne sont pas les seules "jongleuses du 31". Elles ne sont pas différentes des personnes plus âgées hypocrites. Et non moins vertueuses que leurs aînées. Celles-ci sont apparemment respectables, mais n’hésitent pas à s’adonner à l’abus de confiance en misant sur l’impunité que leur donnerait l’âge. La capitale Bamako est remplie de jeunes dames et de femmes mariées qui ne cèdent rien à leurs filles cadettes dans l’art de changer de compagnons, de jongler avec les hommes pour se rendre féeriques la fameuse nuit du "31". Elles font complètement fi de l’interdiction de l’adultère. Pas besoin de lunettes pour s’en rendre compte. Observez bien ce qui se passe autour de vous, du jeudi au vendredi, dans certains services.
Mariam Sylla est secrétaire de direction dans un service de la place. Elle se plaint déjà de l’atmosphère sulfureuse qui étouffe son service en cette veille de nuit du Saint Sylvestre. "C’est comme ça chaque année. Ici, il n’y a plus de boulot à partir du 25 Décembre. Les courtisanes appellent à longueur de journée ou envahissent nos bureaux", explique Mariam.
"Je ne suis pas venue voir un amant ici, mais mon cousin. Je viens lui demander de l’argent pour ma coiffure. Moi-même je suis mariée, mais mon mari n’a pas les moyens de satisfaire tous mes besoins. Naturellement je sollicite l’aide de mes parents", nous a expliqué une jeune dame que nous avons rencontrée dans la cour d’une grande administration. La pulpeuse Habibatou pense que les filles ont raison de jongler avec les hommes en cette période. "Un seul homme ne peut jamais satisfaire les besoins financiers d’une femme. La fête du "31", exige au moins deux tenues de soirée "chiques", des chaussures, des sacs, des bijoux, les manucures, les pédicures, le maquillage", argumente notre interlocutrice.
SANS SCRUPULE : Nos parents sont indignés de constater cette nouvelle fièvre qui contamine les filles de la capitale. Ils parlent de perte des valeurs morales, du goût effréné des "enfants" pour le luxe. Malheureusement le constat est patent. L’individu comme son milieu de vie change avec le temps. Cette transformation ne touche pas la grande ville seulement. Le village, le milieu rural opère sa mutation à une cadence accélérée.
Mme Djénébou Dia, sexagénaire est nostalgique des célébrations de cette fête dans les années 60. "La belle époque ! Une élégante n’avait qu’un seul compagnon pour fêter la Saint Sylvestre. Quel plaisir que d’aller regarder un film au Cinéma ABC, avant de retrouver les amis pour une surprise party. Et au cours de la matinée du 1er janvier, nous nous envoyions de douces lettres pour souhaiter les meilleurs vœux. Dans l’après-midi, nous organisions un "bal poussière" à la maison pour les jeunes du quartier". Mme Dia déplore le comportement de la nouvelle génération, basé sur l’arnaque. Elle dégrade la femme estime t-elle. Les multiples amants, c’est tout juste pour un temps. Et très souvent, c’est pour la jeune fille que l’aventure se termine mal.
Les festivités sont déjà lancées. Sachons raison garder en tous lieux à tous moments. Nous souhaitons à tous nos lecteurs nos meilleurs vœux de bonne santé, de prospérité tout au long de l’année 2007.
Doussou DJIRE
Comportement des filles : FIDELITE BAFOUÉE
Fatima est belle. C’est une véritable perle noire. Mais elle entretient deux relations amoureuses distinctes. Le premier sur la liste est Moussa. Il s’occupe de ses frais de scolarité. Le second Amadou assure les habits, les coiffures, les autres besoins matériels. La belle Fatima trouve normal de vivre une telle situation. Il ne s’agit point d’une obsession sexuelle a t-elle coutume de dire à ceux qui lui posent la question, mais plutôt de besoins financiers à satisfaire à tout prix. Il faut être en phase avec son temps, aime t-elle à répéter dans un sourire qui en dit long sur sa personnalité.
Une femme peut-elle vivre plusieurs amours en même temps ? La réponse est « oui » pour la majorité des Bamakoises que nous avons approchées. Que pensent-elles alors de la pandémie du sida ? Elles n’y pensent même pas. Même si c’était le cas, cela n’arrive qu’aux autres. Pire elles se moquent de leurs camarades qui acceptent de rester fidèles à un seul homme. Au point de les appeler "gawa" (sauvage en bambara).
La fidélité pour Mme N’Diaye Fanta Traoré est inhérente à la nature humaine. " En amitié ou en amour, la fidélité traduit la loyauté envers la personne aimée. La femme fidèle s’engage à respecter une promesse ou une certaine constance". La fidélité engage sur l’avenir. Elle peut avoir la forme d’une promesse ou d’un serment explicite, concernant des choses qui par nature peuvent être trahies. Mme N’Diaye déplore l’infidélité qui est "devenue une seconde nature chez les jeunes filles de la nouvelle génération".
Celles-ci s’identifient à de nouvelles valeurs qui ne sont connues que d’elles seules. Confondant, dans la plupart des cas, la liberté de choix et le libertinage.
Dans nos sociétés, la fidélité est imposée par les cultures et les religions. Aujourd’hui, la modernisation et la globalisation des cultures ont engendré une forme de liberté qui piétine tout devant elle, tradition, honneur et moralité pour ne citer que ceux-là. Même la dignité n’est pas épargnée. Mais la femme a-t-elle besoin de contraintes pour être fidèle ? D’où vient ce comportement si particulier que l’on peut observer chez la majorité des jeunes filles aujourd’hui ? Les réponses à ces questions vous permettront de pénétrer l’univers de ces filles ou de ces femmes. Pour qui le mot de fidélité n’a pas de sens.
D.D
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