L’abandon du domicile de son mari par l’épouse est condamné par nos us et coutumes et par les religions de notre pays. Les « Fugueuses » refusent d’aller dans leurs familles paternelles au risque de se voir contraintes de regagner leur foyer. Il n’y a aucune gloire à abandonner le foyer. Bien au contraire ! Dans le passé nos grand-mères, malgré les difficultés n’ont jamais abandonné le domicile conjugal. « A cette époque le mariage avait tout son sens. Même si nos maris nous mettaient à la porte nous n’osions pas quitter le domicile conjugal. Nous dormions dans la cour » se souvient la vieille Rokia. Elle souligne que la nouvelle génération n’a ni cette patience, encore moins cette tolérance. Les épouses actuelles admirant le mode de vie des Occidentaux pensent même que c’est une perte de temps et d’énergie que de rester au foyer quoi qu’il arrive. Une femme doit être un exemple pour ses enfants, surtout pour ses filles. Vous comprenez pourquoi il est formellement interdit à l’épouse qui a même une seule fois fuguer de son foyer de déballer les colas de fiançailles de sa propre fille ou d’une autre fille. A ce titre il est interdit aussi à une fugueuse de fixer la jarre de la nouvelle mariée à l’arrivée de cette dernière au foyer conjugal. Les femmes doivent savoir que l’avenir des enfants dans un couple dépend du comportement de l’épouse. La vieille Rokia remonte dans le temps.« Si par malheur à notre époque il arrivait à une femme d’abandonner le domicile conjugal, sa fille peinait à avoir un mari. Il n’y avait rien à faire la femme était obligée de se sacrifier pour le bonheur de ses enfants et surtout l’honneur de sa famille paternelle. » enseigne grand-mère Rokia.« Dieu merci il reste des maîtresses de maison qui respectent encore nos traditions. Mais jusqu’à quand ? » s’interroge la vieille dame visiblement inquiète. Mme Keïta Djenèba Diop explique son cas. Cette dame a 15 ans de mariage. Elle indique que durant ces années de vie commune avec son mari qu’elle a eu à abandonner son foyer plusieurs fois. Elle nous narre son expérience. Elle se souvient qu’elle a fugué la première fois pour la simple raison que son mari avait trop duré dehors la nuit. « Il savait que je suis contre le fait qu’il sorte le soir à plus forte raison de trop durer. Je l’ai averti plusieurs fois qu’un jour il viendrait trouver sa maison vide » dit-elle. Le noctambule époux de Djèneba ne changera pas de comportement. L’épouse mettra ses menaces à exécution. Notre bonne dame se souvient qu’elle a passé plus d’une semaine chez son amie sans que l’on sache où elle se trouvait. Après les médiations, elle a regagné son foyer après plus d’un mois de séparation. Depuis, notre interlocutrice explique que pour faire passer ses doléances elle menace de faire une figue. Un autre cas, une autre histoire. Mme K. Binta avoue avoir abandonné son foyer laissant son mari et ses enfants âgés de 7 à 3 ans seuls à la maison. Elle indique qu’elle est partie sciemment sans ses progénitures juste pour faire mal à son époux qu’elle juge irresponsable. Le seul tort de ce malheureux mari est de ne pas intervenir entre son épouse et ses belles sœurs. Sa fugue a duré une année. N’eut été la médiation du démarcheur de leur mariage notre interlocutrice n’allait plus jamais intégrerson domicile conjugal. Son époux avait décidé de prendre une autre femme. « J’avoue que j’ai eu peur car mon mari disait à qui veut l’entendre que cette fois-ci qu’il n’ira plus me chercher et que c’était trop. Toutes mes tentatives pour réintégrer mon foyer avaient échoué » se souvient Binta.
Une Faute. En commune V du District de Bamako, le vieux BD évoque le cas d’un jeune couple. Les conjoints avaient bouclé seulement trois ans de mariage et vivaient en parfaite harmonie. Ils avaient conçu deux beaux gosses. Cette famille selon BD était enviée dans le quartier pour l’atmosphère d’entente qui y régnait. Un beau jour raconte BD, la femme répondant au nom de DD, décida d’aller se faire engager comme vigile. TD, le mari, estima que ce boulot très risqué pour sa femme, et s’opposa alors à sa requête. Contre toute attente DD, se lança dans un jeu de séduction pour faire raisonner son mari, qui restera de marbre. Ne voulant pas lâcher prise DD se fera appuyer par ses parents pour convaincre TD. Leur argumentaire soulignait que le métier de vigile était réservé à des personnes qui n’ont pas fait des études avancées. Le mari demeura sourd à cette plaidoirie. Les parents de DD conseilleront à leur fille d’abandonner le foyer conjugal pour réaliser son rêve. La forte implication du vieux BD n’arrivera pas à concilier les deux points de vue. Toutes les gymnastiques du médiateur pour amadouer les parents de l’épouse fugueuse et obtenir son retour dans son foyer restèrent vaines. Nous nous transportons en commune I de Bamako. La vieille M.S nous retrace l’histoire qu’elle a vécue. Elle vivait en location dans une concession. Elle cohabitait avec un couple heureux. L’épouse T.T était dans des bonnes conditions aux côtés de son homme. Malheureu-sement un beau jour le mari commença à séduire l’intime amie de sa femme. La légitime ne se doutait de rien, jusqu’au jour où elle les a surpris en plein ébat sexuel dans sa chambre. Imaginer le choc provoqué chez T.T face à une scène ahurissante. Le mari toute honte bue a continué à normalement donner le prix de condiments, à payer ses loyers et ses factures. Mais il n’y avait plus d’intimité entre les deux conjoints. Cette situation durera cinq ans. Un jour, elle eut le courage de poser directement la question à son mari, qui lui répondit sans détour :« j’ai déjà des femmes qui s’occupent bien de moi ». T.T décida de s’en aller de son foyer sans dire mot à quelqu’un. Cet acte est considéré comme un abandon du foyer conjugal prohibé par les textes de droit et condamné par les lois de la religion. Et pourtant l’épouse martyrisée TT bénéficie de circonstances atténuantes. Elle a eu tort de n’avoir pas porté plainte au tribunal. Selon les religieux l’abandon du domicile conjugal est à éviter pour que les enfants soient bénis et pétris de « baraka ». Aussi l’article 232 du code pénal condamne, l’abandon du domicile conjugal sans motif. Juridiquement l’abandon du domicile conjugal est une faute. De part sa définition c’est un acte illicite, qui implique pour l’auteur, la volonté de se soustraire aux obligations du mariage et notamment au devoir de cohabitation.
M. A. Traoré
Adjaratou Dembélé