Le ciel semble s’écrouler sur les têtes à Ansongo. A la surprise générale l’étau se resserre sur l’épouse du sous-préfet central, Fatoumata Touré et le planton Ousmane Maïga qui viennent d’être présentés au tribunal de Gao dans une affaire de tentative de trafic présumé de bébé.
A croire que les démons ont quitté l’enfer pour élire domicile chez le sous-préfet central. En intervalle de quelques jours tout semble basculer. Lui qui était craint et respecté assiste impuissant aux regards écrasant de ses administrés. Non pas qu’il est en faute, mais que de forts soupçons pèsent désormais sur sa douce moitié. Venant de l’épouse du représentant local du chef de l’Etat, l’affaire est jugée grave, très grave. Ensuite, au Mali, la fonction de mère des enfants, celle qui donne sa vie pour que vive sa progéniture n’admet point faire souffrir une autre en tentant d’enlever ce qu’elle a de plus cher pour des broutilles. Eh bien, souvent la morale ne pèse pas lourd ! Quand le goût immodéré pour le profit passe le bon sens trépasse.
Dans l’arrière pays que Dieu n’a pas doué particulièrement en ruse, Fatoumata Touré dispose d’une longueur d’avance sur ses sœurs. Son statut d’épouse du sous-préfet aidant, elle semble avancer en loup grimé en agneau, jouant le bon-Samaritain. Puisqu’on n’attrape pas une mouche avec du vinaigre, sous des airs d’assistance aux nouveaux nés et à leurs parents, elle affectionne délier le cordon de la bourse, selon les premiers éléments de l’enquête. Dans un pays mordu à pleines dents par la pauvreté, on ne crache pas facilement sur 10. 000 F CFA, surtout lorsqu’on n’a pas vent des intentions malveillantes de la généreuse donatrice, flanquée d’Ousmane Maïga, tous deux soutenant agir au compte d’organisation non gouvernementale (particulièrement connue par ses initiales ONG).
Aïssata Abdourazak est aux anges. Déjà, elle passe en revue tous les achats qu’elle peut effectuer avec cette somme. Ainsi, elle est parée pour les manifestations qui s’annoncent grandioses. D’où son empressement à mettre en contact son mari et la donatrice, à la demande de cette dernière. Cette fois-ci, l’épouse du sous-préfet central d’Ansongo casse la tirelire : 75.000 F CFA remis en espèces au père de l’enfant. La joie est immense, totale dans la famille. En plus d’un enfant né, le Ciel la gratifie de liasses de billets de banque. Le destin ne pouvait mieux leur offrir ses services en ces tempos de vaches maigres.
Mais, les parents du nouveau né vont rapidement changer d’avis. Le messie n’était autre que le diable en personne. Du moins suite au vœu maintes fois exprimé de Fatoumata Touré de conduire l’enfant dans les locaux de son ONG, qui n’existe que sur les bouts de ses lèvres, afin qu’il bénéficie d’une meilleure attention, affection. Devant son insistance répétée, les parents du nouveau né ont finalement porté plainte à la gendarmerie. Les indices récoltés sont jugés suffisamment compromettants pour que les gendarmes présentent les auteurs présumés devant le Tribunal de première instance de Gao. Qui pourrait donner suite à cette affaire dans les semaines à venir. En attendant d’être fixés sur leur sort, l’épouse du sous-préfet central et le planton vivent des heures difficiles à Gao.
Cheick Badi , envoyé spécial