La deuxième session de la Cour d’assises de Bamako a examiné le cas de Mohamed Touré poursuivi pour “atteinte à la sureté intérieure de l’Etat, détention illégale d’arme à feu en relation avec une entreprise terroriste”. A l’issue des débats, il écope de la peine de 5 ans de réclusion criminelle.
e l’acte d’accusation, il ressort que courant décembre 2014, une équipe de patrouille de la force Barkhane a croisé des combattants se réclamant du Mouvement pour l’unicité du jihad en Afrique de l’ouest (Mujao) et du groupe Al-Mourabitoune, à bord d’une Toyota 4X4 Land-cruiser et d’une mobylette, à Almoustrate, dans le cercle de Bourèm.
Au cours de l’assaut, un arsenal de guerre a été saisi. Notons que celui-ci était composé notamment de trois fusils mitrailleurs AK 47, d’un lance-roquette, d’une mitrailleuse 14,5 mm avec canon, d’un mortier de 82 mm avec son bipied.
Aussi, l’assaut s’est soldé par la mort d’une dizaine de combattants. Ainsi, Mohamed Touré et Alhousseyni Ag Aguissa ont été capturés et inculpés d’atteinte à la sécurité intérieure de l’Etat, de détention d’armes et de munitions de guerre, en relation avec une entreprise terroriste et d’association de malfaiteurs.
Interpellé en possession d’une kalachnikov, Alhousseyni Ag Aguissa a, au cours de son interrogatoire, déclaré avoir été enlevé dans un garage avec son collègue apprenti mécanicien, courant 2012, lors de l’invasion de la ville de Gao par les djihadistes et enrôlé de force au sein du Mujao. Son coinculpé, Mohamed Touré, a affirmé qu’un jour étant en brousse, son chef, Ahmed El Tilemsi, lui a amené le nommé Alhousseyni Ag Aguissa et de déclarer qu’il ignore d’où et comment Alhousseyni Ag Aguissa a été pris par Ahmed El Tilemsi. Cependant, les enquêteurs ont découvert que Aguissa était un mineur. Dès lors, tout acte qu’il a posé engage celui qui l’a recruté et qui le commandait, selon la Charte Africaine des Droits et du Bien-être de l’Enfant qui indique qu’en cas de mouvement armé, la minorité est une cause exclusive de responsabilité pénale, que par conséquent, on ne saurait retenir à la charge de Alhousseyni Ag Aguissa, un quelconque acte constitutif d’infraction. Par contre, Mohamed Touré est inculpé de détention d’armes et munitions de guerre, en relation avec une entreprise terroriste, d’atteinte à la sécurité intérieure de l’Etat du Mali et d’association de malfaiteurs. Aux termes des dispositions de l’article 6 de la loi n° 08-025 du 23 Juillet 2008 portant répression au Mali, la détention d’arme et de munitions de guerre, intentionnellement en relation avec une entreprise individuelle ou collective ayant pour but de troubler gravement l’ordre public par l’intimidation ou la terreur, constitue un acte de terrorisme.
L’inculpé a toujours reconnu, sans ambages, les faits de détention d’armes, de munitions de guerre et d’adhésion volontaire au Mujao, pour, soutient-il, venger ses parents, suite aux atrocités commises par le Mnla, lors de l’invasion de la ville de Gao en 2012.
De l’avis du Ministère Public, le mobile de cette adhésion invoqué par l’inculpé est inopérant et laisse intacte sa responsabilité, tant, dans les faits de détention d’arme et de munitions de guerre, en relation avec une entreprise terroriste que dans les faits d’atteinte à la sécurité intérieure de l’Etat, cette dernière infraction pouvant résulter, du simple engagement dans des troupes armées, sans autorisation du pouvoir légal (articles 48 du Code Pénal). Mohamed Touré a été ainsi reconnu coupable des faits à lui reprochés. Ainsi, il a été condamné à 5 de prison ferme.
Boubacar PAÏTAO
Inculpé pour traite de personnes :
La Nigériane Favour Okonkwo acquittée
Lors de son audience du lundi 3 décembre, la Cour d’assises s’est penchée sur le cas de Favour Okonkwo, une nigériane installée au Mali depuis quelques temps et poursuivie pour crime de “Traite de personne”. Cependant, compte tenu de nombreuses zones d’ombre sur sa culpabilité, la Cour, dans sa sagacité, a purement et simplement décidé de l’acquitter.
L’arrêt de renvoi indique que, courant 2017, Favour Okonkwo, une citoyenne nigériane, à son retour au Pays, retournait à Bamako avec une de ses compatriotes, la nommée Blessing Srivanoos. Il est aussi indiqué qu’elle aurait promis à cette dernière, depuis le Nigeria, “un travail bien rémunéré une fois arrivée à Bamako”. Cependant, la surprise de la jeune Blessing Srivanoos sera amère lorsque son accompagnatrice l’a informée qu’elle sera embauchée comme prostituée à l’effet de pouvoir rembourser tous les frais engagés pour son voyage sur le Mali. Pour ce faire, elle sera conduite à l’hôtel “Ananas” où elle a passé son premier test dont le prix sera immédiatement intercepté par Favour à titre de remboursement partiel de la somme imposée. Lorsque la jeune fille s’est rendu compte du caractère immoral de cette activité, elle a décidé de tout abandonner. Ce qui a déclenché une sérieuse mésentente entre les deux dames jusqu’à ce qu’elles en viennent aux mains. Frappée et blessée, Blessing Srivanoos s’est rendue à la police pour dénoncer ouvertement les agissements de Favour Okonkwo.
Contrairement à ces propos soutenus par le Ministère Public, l’inculpée a rejeté en bloc toutes les accusations. En effet, de l’enquête préliminaire à la Cour d’Assises en passant par le Cabinet du Juge d’Instruction, elle n’a jamais cessé de nier les faits à elle reprochés. Certes, elle a affirmé avoir favorisé et supporté le voyage de Blessing Srivanoos sur Bamako sans pour autant l’obliger à se prostituer afin d’assurer le remboursement intégral des frais injectés à cet effet. De son côté, le ministère Public a considéré que les dénégations systématiques de l’inculpée sont à la fois incohérentes et infondées dans la mesure où “l’exigence de remboursement d’un montant chiffré par la victime dépourvue de toute source de revenu n’avait aucun fondement réel et objectif”. Pour le Ministère Public, l’inculpée a demandé la somme de 1,5 million de Fcfa.
Quand bien même que la victime n’a pas pu comparaitre devant le Juge d’Instruction pour son ultime audition, il est tout de même évident qu’à la suite des recoupements faits des différentes déclarations consignées à tous les niveaux d’investigations, l’inculpée a effectivement contraint sa proie à se livrer à une activité immorale qu’est la prostitution.
Que sinon, peut-on lire dans l’acte d’accusation, le montant d’un million cinq mille francs, exigé, n’a aucune justification, et d’ailleurs, les premières recettes de la victime extorquées par son bourreau n’étaient nullement le salaire d’un travail ordinaire ou légal, mais plutôt le produit de son activité sexuelle, à laquelle elle était soumise contre son gré. La Cour n’a pas, en tout cas, suivi l’accusation. Elle a ainsi opté pour l’acquittement de l’inculpé pour fautes de preuve suffisante contre Favour Okonkwo.
Boubacar PAÏTAO
Inculpés pour “association de malfaiteurs et vols qualifies” :
Souleymane Diawara, Aboubacar Traoré, Moussa Doumbia et Boicar Mariko condamnés à la réclusion à perpétuité
Au cours de son audience, du jeudi 29 novembre, la deuxième session de la Cour d’assises s’est penchée sur l’affaire du ministère public contre Souleymane Diawara, Aboubacar Traoré, Moussa Doumbia et Boicar Mariko et autres, accusés “d’association de malfaiteurs et vols qualifiés”. Au terme d’un débat houleux entre la partie civile et les avocats de la défense, la Cour a acquitté Alassane Camara et Sékou Coumaré. Cependant, elle a retenu les quatre autres inculpés dans les liens de l’accusation. Ainsi, ils ont été condamnés à la prison à perpétuité.
Selon l’arrêt de renvoi, dans la nuit du 24 au 25 décembre 2016, aux environs de 4 heures 30 minutes, la Commissaire de police Oulimata Kéita et son époux Oumar Camara ont été victimes de vol avec agression à leur résidence, à Kalaban-coro. Cette nuit-là, Souleymane Diawara a réussi à escalader le mur voisin pour se retrouver au domicile des époux Camara. Aussitôt rentré dans la chambre à coucher de ses victimes, il a pointé son arme sur Monsieur Camara, auquel il a ordonné de se mettre à plat ventre. Ensuite, il a ordonné à Mme Camara de lui remettre tout ce dont elle disposait dans la chambre. Ainsi, sous la menace de l’arme, celle-ci s’est exécutée en lui remettant les sommes de 307 000 Fcfa puis 2 500 000 Fcfa. En plus de ces montants, Souleymane Diawara a emporté la somme de 40 000 Fcfa et des bijoux en or dont la valeur est estimée à 3 millions de Fcfa. Quelques jours plus tard, sur plainte de la victime, le Commissariat de police du 10ème Arrondissement a diligenté une enquête qui a conduit à l’arrestation de Souleymane Diawara dit “Yougo”, Aboubacar Traoré dit “Moré” et Moussa Doumbia, avant de les mettre à la disposition de la Brigade d’Investigations Judiciaires. Il ressort également de l’arrêt de renvoi que les éléments de la bande interpellés ont reconnu les faits à eux reprochés dans les moindres détails. Ils ont dénoncé leur compère Boicar Mariko. Ce dernier, appréhendé, a expliqué qu’il a remis les bijoux en or à Sékou Coumaré, qui a vendu le lot à Alassane Camara.
Devant la Cour, les quatre accusés pour “Association de malfaiteurs et vols qualifiés” ont nié les faits à eux reprochés. En arguant que leurs aveux ont été obtenus par la police sous l’emprise de la torture. Quant à Alassane Camara et Sékou Coumaré, accusés de “vols qualifiés”, ils ont déclaré avoir été victimes de manœuvres frauduleuses pour avoir acheté les bijoux en or.
Dans son réquisitoire, la Procureure a déclaré que la Cour fait face à des délinquants de la pire espère, qui devaient faire leur mea-culpa, mais qui ont préféré continuer dans la dénégation. Elle a demandé de les retenir dans les liens de l’accusation.
Les avocats de la défense, dans leur plaidoirie, ont dénoncé les irrégularités dans le dossier parce qu’ils trouvent que le terme “association de malfaiteurs” n’existe pas dans le dossier puisque les accusés ne se connaissent pas. Et d’ajouter que la qualité professionnelle de la plaignante (Officier de police) a contribué à l’acharnement à faire porter le chapeau à ces jeunes.La Cour, dans son verdict final, a acquitté Alassane Camara et Sékou Coumaré, accusés de vols qualifiés. Quant aux autres, notamment Souleymane Diawara, Aboubacar Traoré, Moussa Doumbia et Boicar Mariko, ils ont été condamnés à perpétuité.
Boubacar PAÏTAO