Rien ne va plus entre les habitants de Niamana village et le Groupement d’entreprises pour la construction immobilière (GECI-SA). Au centre du litige, une parcelle de terrain située à Niamanabougou, dans la Commune rurale de Kalabancoro dont la société immobilière se dit propriétaire et décide de la morceler. Les deux parties ont failli en découdre plusieurs fois par les armes. Le Procureur de la République près le tribunal de Kati a son nom mouillé dans l’affaire.
Depuis 2015, la tension est vive entre les populations de Niamanabougou et la GECI-SA. Les raisons de cette tension découlent d’un litige portant sur un terrain de 9 hectares. Pour en savoir davantage, nous nous sommes rendus sur place à Niamana et auprès de la société immobilière pour écouter les deux parties, en l’occurrence le chef du village de Niamana, Moussa Diarra et le chargé du contentieux de la GECI-SA, Hamidou Sangaré.
De nos entretiens avec le chef du village, il ressort que suite à la demande des habitants du village de Niamana, le préfet de Kati, par décision n°109 du 22 avril 2008, a attribué une parcelle de 9 ha 43 a 43 ca à la Commune rurale de Kalabancoro pour servir de cimetière à la population de Niamana village.
Selon le chef du village, en pareilles circonstances, c’est l’Etat qui prend toutes les dispositions pour compenser les particuliers dont les terres ont été touchées. C’est dans ce cadre, poursuit-il, que la parcelle appartenant à un certain Seydou Diarra a été touchée par l’opération.
Pour le chef du village, c’est après cette attribution que le nommé Seydou Diarra qui disposait d’un titre provisoire pour ses 4 ha concernés a procédé à leur vente à la GECI où il travaillait, malgré la dévolution faite au village de Niamana pour les besoins du cimetière. Quelques années plus tard, Seydou Diarra décède. Après sa disparition, son employeur, la GECI se présenta courant 2015 pour morceler l’espace destiné au cimetière. C’est là où le conflit est né. « Nous nous sommes opposés à plusieurs reprises. L’entreprise insiste arguant qu’elle détient un titre foncier sur une moitié de la superficie qui nous a été affectée. Il y a eu deux affrontements entre le personnel de l’entreprise et les jeunes du village. L’entreprise a procédé à l’arrestation de deux personnes. Depuis, le problème reste pendant à la justice d’où notre appel aux plus hautes autorités à intervenir pour qu’on ne morcelle pas notre cimetière », a insisté le chef du village, Moussa Diarra, entouré de ses conseillers.
Du côté de l’entreprise, c’est une autre version des faits qui a été rapportée. Le chargé du contentieux, Hamidou Sangaré affirme qu’il a pris le dossier en main après le décès de son collègue Seydou Diarra. A le croire, celui-ci disposait d’un titre provisoire que l’entreprise a introduit afin d’avoir un titre définitif. Nous sommes en 2007. C’est après cela que le préfet de Kati de l’époque a affecté la parcelle aux habitants. Pour lui, la parcelle destinée à abriter le cimetière appartenait à un certain Maïga qui a été dédommagé pour la circonstance. Selon lui, ce sont les villageois qui ont induit le préfet en erreur. Ce qui a amené ce dernier à élargir le cimetière à 9 ha 43 a 43 ca. « Parmi ces 9 ha figurent nos 4 hectares qui sont abusivement occupés par les villageois. A la sortie de notre titre définitif, nous avons essayé de morceler notre parcelle en 2015. Nous nous sommes butés à la résistance des villageois. Toutes nos tentatives pour essayer de les sensibiliser sont restées vaines. Pire, ils ont agressé nos agents en mission », a fait savoir M. Sangaré. Toujours selon lui, c’est dans ce cadre que l’entreprise a approché la préfecture de Kati en vue de trouver une solution à l’amiable afin d’éviter un affrontement, a déclaré Hamidou Sangaré. « Toutes nos tentatives se sont butées à la mauvaise foi du chef de village et son neveu. Nous avons fait même une concession en demandant au préfet de nous attribuer 3 hectares et de laisser 6 hectares pour servir de cimetière surtout qu’il y avait une seule tombe sur notre parcelle. Sans succès. Pire, le préfet a même pris une décision annulant notre titre », a déclaré M. Sangaré.
Cette décision du préfet, poursuit Hamidou Sangaré, a amené l’entreprise à constituer un avocat afin d’attaquer la décision d’annulation de son titre et la décision qui affecte les 9 hectares à la population au tribunal administratif. Le verdict rendu par le tribunal en juin puis en septembre dernier a annulé les deux décisions administratives. « L’affaire reste pendante à la justice malgré notre volonté de la résoudre à l’amiable », a-t-il indiqué.
Le procureur de Kati accusé
Le contentieux s’était retrouvé au tribunal de paix à compétence étendue de Kati. Des verdicts étaient tombés en faveur de la société immobilière. Les populations du village avaient en son temps douté de la moralité du procureur Satigui de Kati, à qui elles reprochaient d’être juge et partie pour des intérêts personnels, en ce sens qu’il aurait eu, selon certaines sources, des parcelles de la part de la société immobilière. Une dizaine de lots seraient partie dans l’escarcelle du procureur incriminé.
Simples accusations ou réalité patente, le procureur de Kati, à travers les nombreux contentieux liés au foncier dans la préfecture de Kati (plus de 95 % des jugements), traîne les mêmes accusations. Le procureur que nous n’avons pas pu rencontrer malgré notre volonté, a son nom mêlé dans presque tous les litiges fonciers comme prenant fait et cause pour les spéculateurs fonciers et autres arnaqueurs, dont il serait considéré comme leur complice. Cette mauvaise réputation lui colle à la peau comme un tic même dans d’autres localités où il a servi comme par exemple à Bougouni où son passage comme juge de paix à compétence étendue a laissé un mauvais souvenir auprès des agriculteurs et éleveurs. En sa qualité de magistrat et de surcroit fonctionnaire de l’Etat, il est cité parmi les plus grands propriétaires fonciers de ce pays. Ces comportements décriés ci-après par des justiciables sont-il connus de la hiérarchie ?
Des accusations qui n’honorent pas du tout le pouvoir judiciaire, une institution chargée de dire le droit et qui doivent interpeller le premier magistrat du pays, le président de la République Ibrahim Boubacar Kéita (IBK). Le souci de celui-ci aussi bien que du ministre de la Justice Garde des Sceaux est d’avoir un appareil judiciaire assaini, insoupçonnable et à égal distance entre tous les justiciables. Selon les dernières informations, le litige est transporté au tribunal de Grande instance de la Commune VI du district de Bamako.
En attendant une solution à ce problème, chaque partie affute ses armes et reste cramponnée sur sa volonté de sauver sa parcelle. Déjà l’affaire a détruit le tissu social et le lien de sang où certaines familles proches d’une partie ou l’autre ne s’adressent plus la parole. Il est urgent pour l’administration de trouver une solution définitive à ce problème afin d’éviter un affrontement sanglant.
Une correspondance particulière