Mme Boudault nous écrit a propos de l''adoption d''enfants maliens : S’il y a un coupable, c’est bien Rayon de Soleil France *

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    Suite à nos articles sur la vague d’adoptions d’enfants maliens en France, initiée par l’Ong française « Rayon de soleil », Madame Boudault Danielle, Représentante de la filiale de cette ONG à Bamako de 1988 – 1991, a adressé à notre Rédaction, depuis Limours (France), un droit de réponse que nous publions en intégralité.

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    Je suis affectée à Bamako au Mali le 01/09/1987, détachée par l’administration des Finances auprès du Ministère de la Coopération et chargée d’enseignement à l’Ecole Nationale d’Administration de Bamako.

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     Mon salaire d’Assistante technique me permettait à mon modeste échelon, de réagir aux situations douloureuses que je pouvais rencontrer. La maison était ouverte, ceux qui le souhaitaient pouvaient y trouver un peu d’aide, d’écoute, et d’espoir.

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    Au bout de quelques mois, je suis devenue correspondante de l’Association Rayon de Soleil France de l’Enfant Etranger, ?uvre d’adoption. Il m’a été demandé de produire différents documents (état civil, moralité, santé, parcours professionnel) qui ont été adressés aux autorités françaises et maliennes par les soins de cette Association. Bien sûr, le Consulat et l’Ambassade de France étaient informés.

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    Cette ?uvre reçoit l’habilitation pour faire des adoptions au Mali.

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    Le Docteur Lemire, aujourd’hui décédée, est alors la Présidente de Rayon de Soleil France et Madame Bernadette Gratecap responsable pour l’Afrique des adoptions. Je dépendais directement de Madame Bernadette Gratecap, qui je le pense, rendait compte pour sa part à la Présidente.

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     J’ignore si elle détient encore des archives. Tous les documents envoyés du Mali, notamment ceux relatifs à l’adoption étaient adressés à son attention.

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    Je n’étais pas pour ma part, membre du Conseil d’administration ou du Bureau de l’association Rayon de Soleil France.

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    Un volet aide sur place se constitue : parrainage pour la scolarisation d’enfants, prise en charge d’enfants malades, etc.

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    Après agrément par les Affaires Etrangères de Rayon de Soleil au Mali pour les adoptions, les candidatures des parents français à l’adoption me sont adressées par Madame Gratecap de Rayon de Soleil

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     Elles sont accompagnées des documents suivants :

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    – l’accord de la DASS, il faut généralement près d’une année pour l’obtenir et la démarche est la même pour adopter un enfant de France ou de l’étranger,

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    – l’enquête sociale et psychologique, concernant l’aptitude de la famille à adopter un enfant,

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    – en cas de stérilité du couple, certificat de stérilité ou de non-fécondité,

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    – l’état civil des parents adoptant, leur profession, leurs ressources,

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    – une fiche familiale d’état civil,

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    – des photos de famille la montant dans son environnement.

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    Quant au dossier des enfants maliens, il était établi suite à de nombreux entretiens. Il comprenait l’état civil, l’adresse, la composition de la famille, ses motivations et ses ressources quand il y en avait. Au fil du temps, il y eu une intervention d’une assistante sociale du secteur et d’un capitaine de police.

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    Il était expliqué en français pour ceux qui le comprenaient et en bambara pour la plupart ce que signifiait l’adoption et ce qu’elle impliquait : « l’enfant va partir en France, il ne portera plus votre nom mais le nom de la famille française, et cela sera définitif. Il deviendra français, il aura les mêmes droits que tout enfant légitime (au sein de sa nouvelle famille) il ne sera plus votre enfant, mais celui de la famille française»

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    Lorsque la candidature d’un enfant était retenue:

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    – les parents biologiques étaient informés qu’en France l’adoption plénière pouvait être sollicitée par la famille française et il était demandé aux familles maliennes, si elles acceptaient, de souscrire un consentement à adoption plénière française avec renonciation des droits paternels et maternels sur l’enfant. Ces explications étaient données en bambara par plusieurs personnes compétentes (M. Issa Traoré, M. Konaté, un greffier de justice dit Dany)

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    – Consentement d’abord donné sur papier libre, visé par le procureur du tribunal compétent de Bamako,

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    – Les textes français concernant l’adoption en France précisent bien que les conditions de l’adoption sont soumises à la loi nationale de l’adoptant mais que le représentant malien légal de l’enfant doit-être informé et donner un consentement éclairé,

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    – Au fil des années ce consentement sera donné devant notaire,

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    – Les parents biologiques sont informés qu’ils recevront des nouvelles de leur enfant par Rayon de Soleil France à Paris, pendant une durée de 5 ans après le prononcé d’adoption du jugement français. Les familles françaises signaient avec Rayon de Soleil France un protocole en ce sens.

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    – Le dossier de l’enfant est alors présenté au juge malien. Le président du tribunal de la commune 2, pendant toute cette époque était Madame Diallo. Le tribunal ne demandait pas toujours la comparution de la famille malienne, mais cette comparution a été cependant été systématique vers 1989/1990. Ces dates sont difficiles à préciser car je ne détiens aucune archive. Lorsque la famille malienne est présente à l’audience, le juge s’adresse à la famille en bambara, si le français n’est pas bien maîtrisé.

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    Un jugement d’adoption – protection est prononcé (l’affaire est parfois mise en délibéré). Je représentais, pour ma part, la famille française. Il faut ensuite attendre le délai de non-révocation et non-appel, le jugement ne devenant définitif qu’ ‘après ce délai.

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    – Ensuite le dossier de l’enfant est contrôlé par les services de police afin d’obtenir l’autorisation de sortie du territoire. Une demande de passeport est sollicitée pour l’enfant, ce qui implique le dépôt de tout le dossier de l’enfant et un nouveau contrôle,

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    – Puis après une visite médicale de l’enfant par le médecin du Centre médical français, la demande de visa d’entrée en France est sollicitée. A ce moment, nouveau contrôle du dossier et de la procédure par les services consulaires qui prenaient l’attache du Ministère Français des Affaires Etrangères,

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    – J’ignore si en France les familles adoptantes ont toutes obtenu des jugements d’adoption plénière, ou pour certaines, des jugements d’adoption simple, mais l’?uvre d’adoption estimait que l’adoption plénière offrait de meilleures garanties à l’enfant.

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    Il aurait donc fallu, pour qu’un enfant soit arraché à ses parents sans leur consentement, comme certaines rumeurs le laissent entendre, une collusion au Mali entre la justice, la police, les services sociaux d’une part, et les services consulaires français , Rayon de Soleil et moi-même d’autre part.

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     Les textes français concernant l’adoption en France et une jurisprudence de la cour de cassation précisent bien que les conditions de l’adoption sont soumises à la loi nationale de l’adoptant, mais que le représentant légal de l’enfant doit être informé et donner un consentement éclairé.

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    Lorsque l’enfant arrivait en France, il était accueilli à l’aéroport le plus souvent par Madame Gratecap, responsable du secteur Afrique qui remettait à la famille une attestation de recueil en vue d’une adoption plénière signée du Docteur Lemire alors présidente de Rayon de Soleil France. Les difficultés sont apparues lorsque les familles ont cessé de recevoir de la part de Rayon de Soleil France des nouvelles de leurs enfants. J’ai tenté mais sans résultat, d’obtenir que le délai de 5 ans, soit repoussé jusqu’à la majorité de l’enfant, comme cela se faisait au niveau des adoptions d’enfants des Indes.

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    De retour en France en 1991, lorsque les familles maliennes qui avaient mon adresse m’écrivaient, j’adressais le courrier au siège de Rayon de Soleil France, mais cette demande ne recevait généralement pas de suite favorable, ce que je regrette vivement.

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    Je précise qu’à mon départ du Mali, une association malienne ARSEM Association Rayon de Soleil de l’enfant au Mali a été créée en juin 1991 et que toutes les archives (double des dossiers, enquêtes sociales) ont été laissées sur place. J’ignore qui les détient actuellement et ce qu’elles sont devenues. Il y a eu différents présidents maliens (capitaine de police, capitaine de l’armée, médecin)

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    En mars 1996, une action a été déposée par 3 familles maliennes devant l’Observatoire National des Droits de la Femme pour absence de nouvelles contre Rayon de Soleil France, moi-même et Ibrahim Diakité. J’ai alors contacté Rayon de Soleil France qui a refusé de donner des nouvelles, mais m’a autorisée à en prendre directement auprès des familles : le commandant Diakité de la Brigade des Mœurs m’avait fourni les jugements d’adoption protection concernant les 3 familles (Bah, Coulibaly et Touré). J’ai obtenu des familles le dossier complet des enfants (les pièces produites ont été les suivantes : jugement malien, consentement à adoption plénière française, jugement d’adoption plénière française, rapport récent sur l’évolution de l’enfant, dossier scolaire, photos) que j’ai pu adresser avec des nouvelles au Procureur de la République de Bamako et le dossier a été classé sans suite, les familles ayant été rassurées.

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    Les familles ont toutes été rassurées sur le sort de leurs enfants et cela m’a conforté dans l’idée qu’il était important, pour les familles maliennes, de recevoir des nouvelles même au delà des 5 ans, si elles en exprimaient le désir.

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    J’ai transmis à Rayon de Soleil France de nombreuses demandes de nouvelles de leurs enfants, de la part des familles maliennes. Je n’ai jamais reçu de réponse. Ma dernière demande a été adressée en ce sens à Rayon de Soleil le 12/11/2004. J’ignore quel sort lui a été réservé. J’ai fait part de cette situation aux familles maliennes, leur indiquant qu’il était inutile de continuer à m’écrire à mon adresse personnelle puisque je ne détenais aucune archive à la maison et que Rayon de Soleil ne répondait pas à mes demandes.

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    La présidente de Rayon de Soleil de l’époque, Madame Boucher, en a pris acte dans un courrier qu’elle m’a adressé le 30/11/2004.

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    Des textes s’appliquant aux œuvres d’adoption en ce qui concerne les informations qu’elles peuvent ou non divulguer, Rayon de Soleil France en connaît certainement les termes.

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    * Le titre est de la rédaction

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    Limours, le 07 novembre 2007

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    Notre commentaire

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    Estimant que son honneur et sa dignité ont été gravement mis en cause dans nos éditions en date des 1er et 5 novembre 2007, Madame Boudault Danielle jouit pleinement d’un droit de réponse que « L’Aube » se fait le devoir de publier intégralement. Même si, en l’occurrence, ce droit de réponse n’entame en rien ni la crédibilité ni la véracité des faits évoqués dans les éditions de « L’Aube » citées en référence par Madame D. Boudault.

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    Pour notre part, nous ne regrettons pas d’avoir écrit que D. Boudault était la première responsable dans le processus d’adoption en France de plusieurs centaines d’enfants maliens dans la période allant de 1988 – 1991, pour le compte de « Rayon de soleil » sis au 8 bis, rue Martel Paris-10è. Qui plus, ces adoptions se sont faites dans des conditions plutôt douteuses, en sachant qu’au moment des faits, les lois maliennes, en matière d’adoption n’autorisaient qu’une seule forme d’adoption : l’adoption – protection. Or, au vu des documents que nous avons en notre possession, nous sommes fondés à croire que « Rayon de soleil » a fait adopter tous les enfants maliens auprès des familles françaises sous l’autre forme non légale au Mali c’est-à-dire l’adoption plénière. Si non, pourquoi les familles d’origine des enfants concernés (aujourd’hui majeurs), ne communiquent pas avec leurs enfants ? Plus grave leurs parents maliens ont perdu leurs traces depuis plus de 15 ans. Pourquoi, « Rayon de soleil » ne dévoile-t-elle pas les adresses des familles adoptantes en France ? Ces enfants maliens savent-ils, aujourd’hui après leur majorité, la vérité quant aux conditions dans lesquelles ils ont été adoptés en France ? Le droit de réponse de Mme Boudault n’apporte guère de réponses claires à ces interrogations.

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    Nous nous réjouissons toutefois du fait que Mme Boudault, dans son droit de réponse, confirme, sur toute la ligne, nos informations. Elle complète même celles-ci en faisant des révélations intéressantes, nous ouvrant d’autres pistes d’exploration.

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    La Rédaction
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