L’adultère : sur les sentiers du mensonge et de la séduction (4) : la faute plus le profit

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    L’adultère vénal est un engrenage dont on ne sort pas. Seule varie la gravité des déviations

    L’adultère : sur les sentiers du mensonge et de la séduction (4) : LA FAUTE PLUS LE PROFIT

    Dans l’adultère, l’on se rend compte que les femmes sont plus promptes à se repentir que les hommes. A l’image de Fanta dont nous vous rapportions le cri du cœur à la fin de notre précédent dossier. Nombreuses parmi elles sont celles qui sont capables de se ressaisir après leur moment d’égarement et qui démontrent une force de caractère inattendue. Pour Fanta par exemple, deux coups de semonce ont suffi pour la faire revenir sur le droit chemin et donc pour lui éviter de subir l’humiliation de glisser irrémédiablement dans les travers les plus haïssables de l’adultère. Fanta a eu le courage de ne pas devenir une de ces femmes irrémédiablement esclaves de leurs pulsions. Une de celles qui passent la frontière séparant la dissimulation de la vénalité. Une de celles que fait basculer la poussée cumulée du manque de caractère et de l’attrait de l’argent. Prenons le cas édifiant de Hadja. Dans les années 70, elle avait tout ce qu’un homme pouvait espérer trouver de mieux chez une jeune fille. Au point qu’un regard coulé de ses yeux en amande déconcertait les plus audacieux venus lui déclarer leur flamme.

    Hadja possédait un physique parfait et, atout non négligeable, une chute de reins capable de faire délirer le plus pudibond des hommes. La légende ne comptait plus le nombre de ses victimes, et on racontait avec force détails que cette beauté fatale avait poussé au suicide un de ses amoureux éconduits et qu’un second devint fou quand il apprit qu’elle s’était mariée à la fin des années 70. Un de nos amis avoua quinze ans plus tard que lui-même, à force de vivre dans le culte de cette « diablesse » (ce fut exactement le terme qu’il utilisa), avait échoué à ses examens et avait été ensuite contraint de virer vers une profession dont personne ne voulait. L’amoureux pas toujours con¬solé se trouva par la suite de nombreux compagnons de nostalgie. Parmi ces derniers, se trouvait un haut fonc¬tionnaire repoussé par notre dame et qui à la suite de cette contrariété tombait systématiquement amoureux de très jeunes filles prénom¬mées Hadja. Pourtant bien partie pour réussir sa vie, la Hadja de notre histoire a plutôt mal tourné. Elle avait donné à son mari deux filles et un garçon. Mais elle ne put empêcher son époux de prendre une seconde femme. Est-ce cette situation de coépouse qui a provoqué sa dérive ? Peut-être bien. En tous les cas dans le quartier de la rive droite bamakoise où elle réside, nous rapporta M.D. un de nos amis qui la connaissait bien, Hadja bénéficie d’une réputation pas très nette et qui ne s’est pas arrangée à la suite d’un dernier incident.

    PAS DE COMMERCE DE BAS ETAGE – Sa fille Massi, âgée de 19 ans, avait décroché un fiancé fortuné, héritier d’un riche négo¬ciant. L’homme portait bien ses 36 ans et Massi lui semblait très sincèrement attachée. Pourtant un beau jour M.D. eut la surprise de voir venir à lui la jeune fille en larmes. Elle ne voulut pas lui expliquer la cause de son chagrin. Mais comme il l’avait toujours traitée de manière très pater¬nelle, elle lui demanda de lui trouver une bourse grâce à ses relations. M.D. n’eut pas à lui rendre le service, car un des oncles de Massi l’amena au Maroc quinze jours après. L’épisode avait intrigué M.D. qui procéda à sa petite enquête et fit une découverte ahuris¬sante : la jeune fille avait surpris sa mère dans les bras de son fiancé. A ses yeux, ce n’était plus que de l’adultère, mais de l’in¬ceste. Comme la scène se passait dans une villa où habitait le jeune homme, beaucoup de gens se perdirent en conjectures. L’affaire traumatisa M.D. qui avait été en son temps un amoureux acharné de Hadja et qui avait gardé une bonne partie de son ancienne idolâtrie pour la dame. Comme il continuait à fréquenter cette dernière, mais main¬tenant en toute amitié, il ne put un jour s’empêcher de lui demander ce qui l’avait poussé à jouer un aussi mau¬vais tour à sa propre fille. Ce que M.D. entendit comme confession le laissa effaré et perplexe. Car il découvrait un pan de la vie de la femme qu’il ignorait complètement. “J’étais au début de mon mariage, raconta Hadja, une épouse aimante et surtout vertueuse. Mon mari me couvrait de cadeaux et m’a même offert une maison, parce qu’il avait été mon premier homme. Ces hommages à ma beauté, je les trouvais logiques, puisque j’avais consenti à abandonner les études pour une vie au foyer. Mais, au début des années 80, les affaires de mon époux qui était en cheville avec des officiers arrêtés en 1978 périclitèrent. Heureusement j’avais mis des fonds de côté. Cela nous permit de faire illusion jusqu’au milieu des années 80 où nous avons commencé à nous redresser. Mon mari choisit justement cette période à nouveau faste pour prendre une seconde épouse, et en utilisant pour ses noces mon propre argent. Il ne me restait plus qu’à accepter cette marque d’ingratitude et de reconstituer le fonds perdu. Je n’ai pas eu le choix de la méthode. Je n’avais plus le courage de repartir de zéro et ce que j’avais de mieux, c’était mon corps, car même à l’approche de la quarantaine je possédais encore de beaux restes. `

    Ma première liaison adultère, je l’ai eue à cette époque-là avec un commerçant qui se montra très généreux avec moi. Il m’offrit villa et voiture, sans compter quelques mil¬lions. L’aventure dura trois ans et mon mari bien qu’informé ne pipa mot. Au contraire, sans aucune vergogne, il ve¬nait auprès de moi me faire des em¬prunts. Au début de mes frasques, je prenais des précautions. Mes filles grandissaient et je n’avais aucune envie qu’elles apprennent les origines de ma fortune. Je retrouvais donc mes amants à l’extérieur du Mali dans des hôtels luxueux d’Abidjan, Dakar ou Lomé. Je connus ainsi d’autres “gros clients” étran¬gers lors de certaines de ces escapades. Moi, je ne pratique pas le commerce de bas étage auquel se livrent certaines honorables épouses qui ont trop de besoins¬ et pas assez de ressources. Je vais généralement avec de gros commerçants bien installés et je n’ai pas besoin d’avoir trop d’amants pour bien vivre. Maintenant, si on parlait du cas de Massi. Cette gourde ne voulait pas de l’argent du pigeon qu’elle avait attrapé. J’ai eu beau lui faire la leçon, elle ne se montrait pas assez dégourdie pour exploiter les avantages de sa situation. Mais ce n’est pas cela qui a amené l’événement dont tu as entendu parler.

    Je dois te dire de la manière la plus sincère que je n’ai jamais fait d’avance au fiancé de Massi. Au contraire, c’est ce dernier qui ne cessait de me jeter des regards appuyés et j’ai fini par me laisser approcher. Tout ce que ma fille refusait, il me le donnait et le jour où il dit que c’est moi qu’il aurait dû connaître et non Massi, je ne dormis pas de toute la nuit. D’accord, j’ai très mal agi, mais j’ai des circonstances atténuantes. Le trouble que j’ai créé en cet homme beaucoup plus jeune que moi m’a flattée. Si je lui ai cédé finalement, c’est que je voulais surtout me prouver que j’étais encore très désirable malgré mes quarante-cinq ans. Je n’ai donc pas réfléchi, je me suis donnée à mon futur beau-fils et ma punition a été que ma fille m’ait surprise. Je te jure que cela a été la première et unique fois, mais ce fut suffisant pour refroidir mes vagabondages amoureux. Depuis je ne vois que deux ou trois anciens amants encore très fortunés, je ne voyage plus. Disons que ma mésaventure m’a permis de prendre du recul. Aujourd’hui, ma fille est à l’exté¬rieur. Cependant c’est grâce à mon argent qu’elle fait de bonnes études. Elle m’a écrit pour me dire qu’elle m’a par¬donné, mais elle sait désormais que dans cette vie-là, pour s’en sortir il faut de l’argent. Si je n’en avais pas, elle n’aurait pas pu vivre la vie qu’elle a aujourd’hui”.

    UN BOURREAU GENEREUX – Hadja était devenue donc moins turbulente, mais pas du tout repentante. Au fond d’elle-même, elle restait persuadée qu’une femme dotée d’atouts physiques particuliers est en droit de les monnayer sans états d’âme. Et tant pis pour les sans-le-sou, ils n’auront d’autre choix que de la regarder passer en tirant la langue de dépit. L’adultère vénal a ses ferventes adeptes qui sont prêtes à aller beaucoup plus loin que Hadja. Comme cette femme, F., épouse d’une personnalité en vue du pays dans les années 70 et qui faisait de fréquentes navettes entre le Mali et l’Europe. Le mari se limitait à assurer le transport en fermant les yeux sur le reste. Après l’accueil à l’aéroport par les services de l’ambassade et son installation dans un hôtel, la dame prenait deux ou trois jours à elle, soit disant pour aller voir de mystérieuses cousines dans la banlieue parisienne, en province et même parfois en Italie ou à Bruxelles. Ce fut dans la capitale belge surtout qu’elle connut son expérience à la fois la plus lucrative et la plus éprouvante. La dame tomba dans le milieu des jeunes diamantaires venus là négocier leur butin amassé à la dure en Afrique. C’était presque tous des aventuriers à moitié lettrés et à qui leur fortune avait tourné la tête. Notre dame s’était fait accrocher sur un client généreux, mais très violent. En même que cet homme multipliait ses largesses envers elle, il en fit sa chose. F. se voyait offrir de l’or par centaines de grammes, mais elle gagnait durement ces cadeaux, car il lui fallait passer par les fantasmes d’un homme affligé d’un instinct de domination hors-norme. Quand F. se mettait à le supplier d’arrêter de lui faire mal, il lui rétorquait que son mari à elle martyrisait le peuple entier en détournant l’argent du pays. “Moi, criait le bourreau, je suis un homme, je gagne ma fortune dans les mines d’Afrique centrale et ce que j’investis en toi, il faut t’habituer à l’obtenir aussi difficilement que j’ai collecté mes diamants”. Après avoir subi cet amant particulier F. revenait à Paris et gardait la chambre quelques jours, histoire de faire disparaître les traces que portait son corps avant de regagner le pays, pimpante, le sac à main alourdi de deux cent à cinq cent grammes d’or, mais aussi de liasses impressionnantes de billets.

    Elle pouvait, aux dires de Hadja qui la connaissait très bien, amasser ainsi par voyage cinq à dix millions de francs maliens. Hadja ne manquait d’ailleurs pas d’amies opérant dans le même créneau qu’elle et ce fut d’ailleurs l’une de celles-ci qui lui mit le pied à l’étrier. Mâh (c’était son nom) avait elle-même débuté de manière assez fortuite. Remariée avec deux enfants, mais se trouvant pour la seconde fois en instance de divorce, elle était en visite chez une de ses amies Ami lorsqu’elle tomba par hasard sur Y. qu’on lui présenta comme un monsieur ayant le bras long. Il pouvait, assura Ami, rien qu’en donnant un coup de téléphone aider Mâh à accélérer la procédure de son divorce et s’en tirer à son avantage. Ce qui se révéla entièrement exact. En moins d’une semaine Mâh obtint ce qu’elle avait cherché pendant huit mois. Mâh n’égalait pas Hadja en beauté, mais elle avait un petit charme coquin et un jeu de cils qui ne laissait pas les hommes indifférents. Elle convint d’un rendez-vous chez Ami pour remercier celui qui venait de la tirer de son cauchemar. “Cauchemar” était en effet le mot qu’elle employait pour parler de son second mari, alcoolique invétéré, mais amant exceptionnel quand il voulait bien s’y mettre.

    UNE COTE EXCEPTIONNELLEMENT ELEVEE – Cependant, cela faisait très longtemps que cette dernière qualité n’importait plus à Mâh. Elle était lasse des crises de jalousie de son époux et surtout des injures qu’il lui lançait pour l’humilier devant ses enfants. Mâh avait vu sa vie devenir peu à peu intenable, mais sa demande de divorce traînait, son mari ayant de bonnes relations au sein du l’administration judiciaire et sachant en jouer habilement. Mâh avait toutes les raisons donc d’exprimer chaleureusement sa reconnaissance à Y. qui était un homme marié. Sa copine arrangea la rencontre et en femme libre, la laissa dans sa chambre avec son bienfaiteur particulier. Tous deux firent amplement connaissance, mais sans devenir amants ce jour-là, Y. étant à sa manière un gentleman. Ce Rubicon ils le franchirent une semaine plus tard dans une villa administrative inoccupée, mais meublée pour ce genre de rencontres. Quelques mois après, Mâh commença à connaître une prospérité certaine. Son amant, en plus de substantielles sommes d’argent, lui donnait des permis d’occuper pour des terrains très bien situés en lui suggérant de les revendre. Comme cet exercice était parfois trop compliqué pour elle, Mâh se trouva un jeune commerçant pour placer les lots en question. Par l’intermédiaire de cet associé, elle se fit remarquer par un “gros poisson” qu’elle ferra à Lomé. De ce généreux amant, elle eut ses cinq premiers millions comptants. Jamais elle n’avait ramassé une telle somme pour une seule nuit. Alors Mâh sauta définitivement le pas et intégra le milieu. Ce fut elle qui par l’intermédiaire de leur amie entremetteuse négocia discrètement pour Hadja son premier client. Dans le milieu des femmes adultères converties à la prostitution de luxe, la jalousie n’avait vraiment pas cours. Les règles du jeu étaient claires et chacune savait qu’elle récoltait le fruit de ses propres atouts. Mais certaines excitaient une convoitise particulière chez les hommes et bénéficiaient d’une côte exceptionnellement élevée. C’était le cas de Anta qui présentait la particularité de n’avoir pas subi d’excision, détail qui déclenchait des fantasmes torrides chez certains gros clients. Pourtant, la jeune femme, avant de devenir une courtisane très recherchée, avait été au départ une brave épouse. Son mari B.N. s’était retrouvé à la suite de mauvaises fortunes diverses dans une des charrettes acheminées vers les bagnes du Nord, au tout début des années 70. Il purgea huit ans de peine et retrouva Anta qui en son absence s’était montrée irréprochable. Pourtant ce n’était pas les propositions qui avaient manqué à cette femme de petite taille, aux grands yeux de biche. Mais son comportement impeccable avait fait taire les mauvaises langues et elle avait courageusement élevé seule ses quatre enfants. Libéré, B.N. retrouva une épouse exemplaire, mais le Nord avait laissé sur lui des séquelles physiques qui lui furent fatales et il mourut deux ans après avoir regagné son foyer. La veuve vertueuse ne mit pas longtemps à se trouver un mari avant de découvrir quelques mois après qu’elle avait épousé un vrai goujat. Elle le surprit en flagrant délit avec la bonne à qui le malotru avait déjà fait pratiquer un premier avortement. Anta libéra la jeune fille, rassembla ses affaires et alla demander le divorce. Devenue libre de tout attachement, elle mit tout juste deux mois à se trouver un troisième mari. Mais elle joua de malchance, le nouvel élu se trouva pris dans le tourbillon de la compression qui ravagea la société d’État qui l’employait. L’époux de Anta montra alors qu’il était un homme de faible caractère, incapable de supporter l’adversité. Il laissa pratiquement sa femme s’occuper de toutes les charges du foyer. Anta devenue malgré elle chef de famille glissa sans même s’en rendre compte vers le milieu des femmes adultères vénales.

    Elle était complètement démunie quand on lui trouva un rendez-vous avec son premier client, un homme que l’on disait généreux et discret. Confuse, Anta expliqua à son interlocuteur qu’elle était venue pour “prendre crédit ». L’homme comprit alors qu’il avait à faire à une débutante. Il se montra particulièrement généreux avec la jeune femme en lui donnant un cadeau d’un demi-million de francs. De quoi tenir plusieurs mois. Il se montra aussi correct en ne lui demandant rien en retour. Ils ne se rencontrèrent que trois mois plus tard. Anta se retrouvait à nouveau dans le besoin. Cette fois-ci, le généreux donateur lui signa un chèque d’un million et posa dessus un billet d’avion aller-retour Bamako-Lomé. Le marché était clair. La femme hésita deux jours, mais finit par accepter. A son retour, ce fut une femme transfigurée que son mari chômeur retrouva. Anta avait mis ainsi le doigt dans l’engrenage.

    UN MARKETING IMPECCABLE – Dès lors plus rien ne comptait pour elle qu’amasser une fortune qui la mettrait définitivement à l’abri du besoin. Son époux croyait qu’elle avait, avec l’aide de ses amies, trouvé une filière commerciale particulièrement juteuse. Ragaillardi par la nouvelle aisance qui s’installait dans son ménage, l’homme ouvrit boutique pour écouler ce que sa femme négociante lui ramenait. Anta était suffisamment vigilante pour sauver les apparences et suffisamment habile pour faire un commerce qui alimentait la boutique gérée par son époux. Ce dernier ne se doutera jamais de vraies activités de sa femme. Anta avait donc pris un virage définitif et le revers de fortune que connut son premier protecteur n’allait rien changer son destin. Avant d’émigrer vers le ciel moyen oriental pour un nouveau départ, l’amant ruiné rendit un dernier service à sa maîtresse. Il diffusa autour de lui la bonne parole. Anta, disait-il, était d’une sensibilité amoureuse peu commune. Elle était habile à guider son partenaire et se montrait expansive au moment décisif. Des qualités qui donnaient à l’amant la sensation d’être lui-même un étalon hors-pair. Ces compliments mettaient en appétit tous les candidats. Tout le monde sait qu’une femme moyennement jolie sachant flatter ha¬bilement l’ego d’un mâle peut obtenir n’importe quoi de celui-ci. Or, Anta avait deux atouts. D’un, elle était mieux que “moyennement jolie” ; de deux, elle excel¬lait dans l’art très particulier de flatter tous ses partenaires. Ceux-ci retiraient donc de leurs relations avec elle l’assurance qu’ils étaient capa¬bles d’amener au septième ciel n’im¬porte quelle femme, pourvu que cette dernière soit un tant soit peu experte dans l’art amoureux. Les candidats se bous¬culaient par conséquent autour de la jeune femme pour connaître et faire connaître le grand frisson. Naguère si vertueuse, Anta s’était transformée sans état d’âme en véritable ges¬tionnaire de sa nouvelle et sulfureuse réputation. Son marketing était impeccable, et sa méthode imparable. Elle mettait les hommes en com¬pétition en faisant savoir qu’il ne suffisait pas de postuler pour être accepté. Et elle avait l’intelligence de se ménager physiquement. Avec elle, il n’y avait pas tromperie dans la prestation. D’une nuit tumultueuse, elle sortait aussi exténuée que son parte¬naire. Elle prenait alors une semaine de récupération, au cours de laquelle elle n’acceptait aucun engagement. Sa rareté contribuait à la rendre encore plus recherchée et faisait monter les offres autour d’elle. Anta disposait grâce à sa réputation d’une liberté totale de choix, ne se déplaçait que pour un seul client et pour une seule nuit. Elle demandait en outre un billet d’avion aller-retour sur la capitale de son choix et une mise ne descendant pas en dessous de deux millions de francs.

    UNE RECONVERSION ASSUREE – La somme ferait suffoquer un citoyen moyen, mais elle représentait une broutille pour les fournisseurs de haut vol aux fortunes aussi faramineuses que fulgurantes. Ces nouveaux riches se faisaient une fierté de sortir la courtisane la plus recherchée et rien que pour pouvoir s’en vanter, ils ne regardaient guère à la dépense. Les femmes adultères vénales ont encore de beaux jours dans ce pays, mais la concurrence commence à être très rude pour ces dames qui ont atteint un certain âge et qui voient arriver sur le marché un contingent de plus jeunes qu’elles. K.M., une amie de Anta et dont la froide intelligence a toujours fait l’admiration de ses “collègues”, ne s’en émeut pourtant pas. Même si elle reconnaît que c’était plus facile dans les années 80. Mariée et mère de deux enfants, un garçon et une fille (qui vient d’ailleurs de se marier), elle s’est construite trois villas qu’elle a mises en location avant de s’acheter une quatrième pour s’installer à demeure. Comme son mari a pris entretemps deux autres femmes, elle se félicite de n’avoir pas sur le dos en permanence ce coureur de “petit pagne” que les belles croupes attrapent sans peine. L’homme, qui est loin d’être un naïf, n’ignore pas ce que sa première femme fait et dans quel milieu elle évolue. Mais il y a comme une espèce d’arrangement tacite qui s’est installée entre eux depuis quinze ans. Chacun peut vaquer à ses affaires sans avoir à rendre compte à l’autre. L’itinéraire de K.M. n’est pas fondamentalement différent des destins de celles de ses autres “collègues”. Au départ de sa “voca¬tion” se trouvent les déviations de son époux. Mais en femme de caractère, elle s’adapta très vite. Elle fait aujourd’hui des navettes régulières au Moyen-Orient où elle s’est positionnée dans un créneau particulier : les aphrodisiaques pour hommes et femmes. A côté de cette marchandise, notre dame place aussi des conseils spéciaux auprès de toutes les femmes que les aventures tarifées intéressent, mais qui ne savent pas très bien comment s’y prendre. K.M. avait assuré sa reconversion et elle ne craignait donc pas le jour où elle serait amenée à arrêter son commerce si particulier de faveurs. Elle ne redoutait non plus ces nouvelles envahisseuses dont la fraîcheur physique, dit-elle, ne résistera pas à l’épreuve du temps. Mais, soupirait notre dame, le milieu n’est plus ce qu’il était. Les hommes sont non seulement moins généreux (pas plus de trois cent mille francs la nuit pour les plus prodigues), mais aussi moins attachés aux palmarès des femmes qu’ils fréquentent.

    Ils sont prêts, selon K.M. à s’enflammer pour des petites jeunes sans expérience et sans spécialité. K.M. répète souvent que si les choses continuent à aller dans le mauvais sens, on verra bientôt les femmes payer pour trouver du plaisir. “On est déjà arrivé à cela, soupire-t-elle, parce que vous ne pou¬vez pas vous faire une idée du nombre de bourgeoises qui s’offrent les servi¬ces d’un gigolo. Rien que d’y penser, je me dis que cette tendance est encore plus condamnable que notre cas. Mais tant que l’adultère fleurira, on verra de tout. En tout cas, j’aime mieux avoir vécu ma situation que de vivre celle de ces épouses et mères qui payent pour s’attirer les faveurs de jeunes ayant l’âge de leur fils. Le mien de fils a terminé ses études en France et il n’entendra jamais aucun de ses camarades se vanter un jour d’avoir eu une aventure avec moi. De bonnes dames qui sont pourtant en apparence plus honorables que moi ne peuvent dire cela”. La remarque venimeuse de K.M n’est pas de la diffamation pure, cela nous pouvons le garantir. Et le dossier des femmes banqueuses, nous l’ouvrirons la prochaine fois. Si vous le voulez bien.

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