Quand le major Kissani Sacko, commissaire du poste de police de Sabalibougou, s’attaque à l’insécurité, le chef de village et les jeunes du quartier ne sont jamais loin. Le mérite revient en partie à l’Institut malien de recherche action(IMRAP) qui a présenté le 30 juin 2016 à Bamako son rapport sur « la mutation des valeurs sociétales et le renforcement de la confiance entre forces de défense et de sécurité ».
L’officier de police servant à Sabalibougou avait suivi attentivement la projection d’un film où civils et forces de défense expriment leurs mécontentements. Entres autres, le film souligne comment certains habitants du Nord estiment que les Forces de défense et de sécurité(FDS) ont fuit en 2012, en les abandonnant aux mains des occupants djihadistes. «Et si les envahisseurs n’avaient pas été hébergés au sein de la population ?», rétorque dans le film un agent de sécurité.
Au Sud du pays (et à Bamako particulièrement), la peur qu’inspirent les porteurs d’uniforme chez les citoyens est une des causes de la méfiance. Policiers et gendarmes se voient ainsi opposés le plus souvent aux civils qu’ils sont censés protéger ou avoir comme collaborateurs, tel qu’a témoigné le commissaire de Sabalibougou qui était accompagné du chef de village et du leader des jeunes du quartier.
Le rapport qui souligne aussi l’abandon des valeurs sociétales maliennes interpelle les décideurs sur les problèmes liés à l’éducation et à la citoyenneté. Mais un retour en arrière n’est pas possible, selon Baba Hakib Haïdara, le médiateur de la République. Pour lui, un renouveau des valeurs culturelles doit tenir compte d’une culture scientifique.
Le rapport présenté officiellement est le résultat d’un vaste processus de recherche-action participative mené par l’IMRAP et son partenaire Interpeace autour des solutions pour la paix au Mali. Ce processus a bénéficié du soutien du Royaume de Danemark et de la contribution du Royaume de Norvège.
L’IMRAP, après la publication de l’Autoportrait, a sillonné l’ensemble des régions maliennes ainsi que les camps de réfugiés en Mauritanie et au Niger. Au sein d’espaces de dialogue ouverts et sécurisés, près de 2 000 Maliens de la base aux élites ont approfondi le diagnostic et élaboré des solutions pour faire face à la « Mutation des valeurs sociétales » et « l’insécurité chronique », notamment la crise de confiance entre les Forces de défense et de sécurité et les populations civiles.
Selon Nènè Konaté, la Directrice exécutive d’IMRAP, le rapport qui a été transmis aux autorités maliennes repose sur la conviction que les solutions aux défis auxquels les Maliens sont confrontés doivent être élaborées et appropriées par eux-mêmes. Cela pourrait permettre d’avoir des solutions efficaces et durables.
Soumaila T. Diarra