Ousmane Cissé, l’auteur de l’attaque contre 5 casques bleus Mali en 2019, a comparu à la barre des assises de Bamako, le mardi 24 janvier 2023, pour association de malfaiteurs, meurtre, vol qualifié et de détention illégale d’arme à feu. Reconnu coupable des faits, il a été condamné à la peine de mort, au payement de 5 millions de F CFA d’amende et 2 millions à l’Etat malien.
Courant le mois de février 2019, 5 militaires guinéens respectivement nommés adjudant Théa Michel, caporal Ismaël Bangoura, sergent Haba Yves, lieutenant Mohamed Lamine Sylla et caporal Kadiatou Bah, tous engagés au sein de la Mission multidimensionnelle intégrée des Nations unies pour la stabilisation du Mali (Minusma) ont quitté leur camp de base à Kidal en vue de se rendre en Guinée-Conakry pour y passer leurs congés.
Arrivés à Bamako, ils ont emprunté un taxi-brousse d’immatriculation guinéenne RC-0931-S. C’est le chauffeur dudit taxi qui est allé les chercher jusqu’à leur résidence à Baco-Djicoroni Golf, Bamako pour les conduire à l’auto-gare de la Guinée sise à Djicoroni-Para, Bamako avant de prendre le départ.
Le vendredi 22 février 2019, aux environs de 21 h, les 5 militaires sus cités habillés en tenue réglementaire, le conducteur Aboubacar Barry et un autre civil du nom de Boubacar Guindo, ont entamé leur voyage en direction de la frontière Mali-Guinée où, après 27 km de trajet, à la hauteur de la forêt de Frétoumou, le véhicule a buté sur un tronc d’arbre, traversant la chaussée, obligeant le chauffeur de s’arrêter. Subitement, des individus armés ont surgi des buissons faisant des tirs de sommation dans un premier temps et en second lieu ils ont tiré à bout portant, des rafales d’armes automatiques (Kalachnikov) sur les militaires guinéens de la Minusma dont trois ont succombé sur le champ et les deux autres blessés y compris le chauffeur.
Ce dernier est parvenu malgré tout, à alerter le poste de contrôle forestier situé environ à 3 ou 4 km des lieux de l’attaque pendant que les assaillants dépouillaient les victimes de leurs sommes d’argent, téléphones et autres biens avant de fuir à bord d’un minibus de couleur blanche dans le sens de Siby-Bamako.
Des investigations minutieusement menées par la Brigade territoriale de Ouenzzindougou de la gendarmerie nationale saisie de l’affaire, ont permis d’appréhender, le 7 mars 2019, Ousmane Cissé en possession du téléphone du conducteur du taxi braqué du nom d’Aboubacar Barry. Interrogé sur les faits, il a dénoncé à son tour Moussa Bolly, Hamadoun Barry dit Hama et Demba comme étant les présumés auteurs du braquage susdit.
Une perquisition à leur domicile a permis de retrouver une arme de MAT 49 numéro : FSS.154 de fabrication française et un chargeur vide. A l’issue de l’enquête ouverte, les sieurs Ousmane Cissé, Moussa Bolly, Hamadoun Barry dit Hama et Demba ont été poursuivis et inculpés devant le magistrat instructeur pour les chefs d’infraction d’association de malfaiteurs, meurtre, vol qualifié et de détention illégale d’arme à feu.
Moussa Bolly, Hamadoun Barry dit Hama et Demba n’ont pu être identifiés tout au long de la procédure. Dès lors, il y a lieu de dire n’y avoir lieu à suivre contre les inculpés susnommés demeurés inconnus et ce, en application de l’article 211 alinéa 1 du code de procédure pénale.
Tant à l’enquête préliminaire qu’à l’information, l’inculpé Ousmane Cissé a systématiquement nié les faits qui lui sont reprochés. Au soutien de sa dénégation, il a déclaré avoir obtenu le téléphone portable du conducteur du taxi Aboubacar Barry, victime du braquage, tantôt par échange avec le sien de marque “Tecno type F3” et une somme de 10 500 F CFA, tantôt avec un Pakistanais (sans autre précision), tantôt un certain Demba (SAR) résidant à Kati-Draal et tantôt enfin l’avoir acheté à 15 000 F CFA avec un vendeur ambulant dont il ignore l’identité.
Il affirmera n’avoir jamais connu les nommés Moussa Bolly, Hamadoun Barry et Demba à plus forte raison les dénoncer. Il a ajouté qu’il n’est nullement impliqué dans les faits incriminés qui ont occasionné la mort et des blessures de militaires guinéens.
Dans son réquisitoire, le ministère public a relevé qu’il s’agissait d’un “rare dossier scientifiquement monté. Il s’agit de l’analyse criminelle des pièces retrouvées ayant permis d’établir un lien de connexité entre l’inculpé et les assaillants”. Le Parquet général a également souligné le statut des victimes et relevé l’engagement du Mali à protéger les membres des Nations unies en application de l’accord entre les Nations Unies et le Mali relatif au statut de la Minusma.
Après les débats, l’accusé a été reconnu coupable et condamné à la peine de mort et au payement de 5 millions de F CFA d’amende. L’Etat malien s’est constitué partie civile et a obtenu les réparations à hauteur de 2 millions de F CFA.
Notons que c’est la deuxième fois que des attaques contre la Minusma sont au cœur d’une accusation judiciaire qui aboutit à un procès et à des condamnations au Mali. Le 24 mars 2021, la Cour d’assises de Bamako avait jugé et déclaré coupables 9 individus, dont 8 par contumace, pour une attaque commise contre des casques bleus en mai 2015 à Bamako.
Marie Dembélé