Faits divers à Niono : Le glas sonne pour Balla

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    Le chef de la bande s’était longtemps faufilé entre les mailles du filet. Il a chuté pour avoir trop voulu profiter de son forfait.

     

     

    Le temps des malfaiteurs opérant en solo semble bel et bien révolu. Il se trouve encore quelques incorrigibles solitaires qui montent et exécutent eux-mêmes leurs coups. Mais la plupart des malfrats estiment que leurs chances de réussite et l’importance de leur butin seront beaucoup plus conséquentes s’ils opèrent en bandes. A l’intérieur de ces groupes s’instaure habituellement une répartition du travail, répartition parfois sophistiquée qui inclue toutes sortes d’individus depuis les guetteurs qui se contentent de surveiller l’arrivée d’un éventuel gêneur jusqu’au cerveau qui monte les coups et décide de tout.

     

     

    L’organisation et la dangerosité de ces bandes , bien sûr, de la personnalité des individus qui les composent. Et de leur secteur d’activité. Certaines optent délibérément la voie de la violence comme les voleurs de motos qui agressent les propriétaires pour prendre leurs engins. D’autres ont des méthodes plus douces. Comme celle de notre présent récit et qui a choisi tout simplement de dévaliser les boutiques les plus prospères de son lieu de résidence. La bande qui sévissait à Niono, ville rizicole de la quatrième Région administrative du Mali, ciblait tout particulièrement les magasins situés dans le centre ville. Et plus précisement celles du grand marché.

     

     

    Le gang des dévaliseurs était composé de quatre très jeunes malfrats, tous natifs de la ville de Niono, sauf un seul qui serait originaire de San. Ce dernier s’appelle Moussa Touré allias  Balla. Il est connu pour être le chef de la bande. Agé de 26 ans, il est dans la « vie civile »  exploitant agricole de son état. Les trois autres de la bande se nomment Ousmane Diakité (19 ans) apprenti chauffeur, Mamadou Diarra (18 ans) apprenti tailleur et enfin Seydou Koné (18 ans) élève dans un établissement scolaire de la ville.

     

     

    La bande commettait ses forfaits avec une audace extraordinaire. Car elle ne changeait pratiquement jamais de cibles. Elle s’attaquait la plupart du temps aux boutiques appartenant aux plus riches commerçants du grand marché. Ses passages répétés dans ce lieu avaient d’ailleurs provoqué l’exaspération des victimes qui avaient déposé de multiples plaintes au commissariat de police de la ville. Mais tout cela en vain depuis plus d’un an.

     

     

    UN PUR HASARD – Pourtant, la police n’était pas restée inactive tout ce temps. Ses informateurs lui avaient mis la puce à l’oreille concernant la composition supposée de la bande. Mais il avait été impossible aux agents de prendre en flagrant délit les malfaiteurs, ni d’avoir des informations précises sur la manière dont ils écoulaient leur butin. Les policiers, qui organisaient traditionnellement des patrouilles au grand marché bien avant les cambriolages, avaient accentué leurs descentes lorsque les vols ont commencé. Mais ces efforts étaient restés improductifs. Cependant, comme le disait le fabuliste, « patience et longueur de temps » finissent par produire leur effet. La chance a fini par sourire aux limiers vers la fin du mois dernier. Dieu faisant bien les choses, le chef de la bande Moussa Touré dit Balla est tombé dans les filets des enquêteurs et de la manière la plus banale que l’on puisse imaginer. Peu avant son interpellation, la bande avait changé sa manière de procéder et avait abandonné le grand marché sous la pression des patrouilles de police en ce lieu. Les malfrats avaient cambriolé un domicile particulier (celui de deux dames habitant le quartier B de la ville) et s’y étaient emparé d’un téléphone portable, d’un bracelet en argent et des coupons de bazin.

     

     

    Quelques jours plus tard, un pur hasard livra littéralement Balla à ceux qui le poursuivaient. Ce jour là, le chef de la bande, qui ignorait encore que la chance l’avait abandonné, s’était rendu dans un lieu de réjouissances populaire en ville. Sans s’en rendre compte, il s’arrêta à côté d’une jeune fille qui était la jeune sœur d’une des dames dont il avait cambriolé la maison. A un moment donné le téléphone du malfrat se mis à sonner. La jeune fille ne put retenir un sursaut de surprise. Elle avait reconnu la sonnerie du téléphone volé à sa grande sœur. Pour la bonne raison qu’une sonnerie très particulière et identifiable entre mille avait été programmée sur l’appareil.  La jeune fille qui n’avait pas de plan précis en tête se rapprocha du malfrat pour bien l’identifier. Puis elle regarda autour d’elle . Mais il n’y avait ni agent de police, ni connaissance qui aurait pu l’aider à neutraliser le malfrat.

     

     

     UNE AFFAIRE QUI LA DEPASSAIT – Après réflexion, la jeune fille décida de jouer d’audace. Elle s’approcha du jeune homme et l’aborda directement pour lui dire qu’il détenait par devers lui le téléphone volé à sa grande sœur et qu’elle avait identifié par sa sonnerie. Surpris par le courage de la jeune fille,  Balla ne put dans un premier temps placer même un mot. Puis il reconnut les faits sans détour. Il devait certainement se maudire lui-même d’avoir gardé le téléphone de sa victime au lieu de le revendre en « bon voleur ». Pour éviter d’être humilié en public, Balla fit une proposition à la jeune fille.  Il lui déclara que non seulement il était prêt à rendre le téléphone, mais qu’en plus il était disposé à lui donner à elle-même un autre appareil, beaucoup  sophistiqué et beaucoup plus cher que celui de la grande soeur.

     

     

    En se montrant aussi arrangeant, Balla espérait clore cette affaire à l’amiable avec la sœur de sa victime. C’était sans compter avec toute la malice de la jeune fille. Elle accepta la proposition sans hésiter à la satisfaction du voleur.  Mais aussitôt après elle se rendit à la police pour relater à celle-ci les faits dans les plus petits détails. Ce qui permit aux agents de monter le piège qui leur permettrait de coincer le malfaiteur au moment même où il devait remettre le téléphone proposé à la jeune fille.

     

     

    C’est ainsi que le mardi 27 Août à 21h 30 Balla a été cueilli dans la rue au quartier B, où il était allé rencontrer la jeune fille pour honorer son engagement. L’opération était dirigée par le commissaire principal lui-même Moussa Fanta Diarra accompagné pour la circonstance du chef de la brigade de recherche Boubacar B. Koné. Arrêté et conduit au commissariat par la police Balla ne tardera pas à dénoncer ses complices que sont les dénommés Ousmane Diakité, Mamadou Diarra et Seydou Koné. A l’interrogatoire, la bande reconnut être l’auteur de plusieurs vols perpétrés entre 2012 et 2013 dans les boutiques au grand marché, mais aussi chez des particuliers dans d’autres quartiers de la ville. Les voleurs ne se sont pas fait prier pour donner les noms de leurs victimes et les sommes qu’ils ont pu dérober chez elles.

     

     

    Aujourd’hui, après ces arrestations, la question qui est sur toutes les lèvres dans le secteur est de savoir pourquoi  très jeunes avaient-ils pu piller ainsi de 2012 à nos jours les boutiques et les domiciles des paisibles populations sans être appréhendés ? Le commissaire principal Moussa Fanta Diarra impute cette longue impunité au manque de collaboration des populations elles-mêmes. L’efficacité d’une police, précise-t-il, dépend en partie de l’appui que peuvent apporter les citoyens sur les biens et la tranquillité desquels veillent les forces de l’ordre. « Nous saisissons une fois de plus cette occasion pour inviter les populations à collaborer sincèrement avec la police qui est là uniquement pour les protéger »,  a insisté le commissaire principal.

     

     

    Une chose est sûre : la jeune fille qui a mené Balla jusqu’au piège tendu par la police a donné un exemple probant de la collaboration police-citoyens. Elle a réagi avec beaucoup d’à propos dans une situation pas facile à maitriser et surtout elle s’est bien gardé de vouloir résoudre seule une affaire qui la dépassait. Grâce à cette lucidité, l’affaire s’est bien terminée et les habitants de Niono ont toutes les raisons de pousser un soupir de soulagement.

     

     

    C. O. DIALLO AMAP NIONO

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