Fait divers : EN FAMILLE

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    Le trafic de drogue semblait être l”activité principale des occupants de la concession. Tout le monde le savait et se taisait.

    Le commerce et la consommation des stupéfiants dans la Commune II du district de Bamako est un sujet qui se retrouve souvent au centre des causeries dans les "grins" de la capitale. Les Bamakois se souviennent encore des descentes des limiers du commissariat du 3è arrondissement dans les bars mal famés "Bobo Awa" et "Soloni Tondjan" à Médina-coura (voir l”Essor des 21 et 27 février derniers).

    Les gendarmes de la brigade territoriale de Bamako-coura viennent d”apporter leur contribution au renforcement de la sécurité de nos concitoyens en mettant au jour, dans la journée du samedi 17 mars, "les secrets du bonheur" de la famille T. à Bagadadji. Une perquisition dans les règles a permis de vérifier que cette famille était un nid douillet de dealers qui existait depuis environ une dizaine d”années.

    A Bagadadji, la famille T. est pourtant connue pour opérer dans tout ce qui fait planer, de l”herbe aux comprimés jusqu”à certainement la poudre. Elle reçoit et distribue indifféremment les drogues douces et toutes les autres variétés de stupéfiants. Au fil des années, tous les membres de la famille ont fini par devenir des vendeurs ou des consommateurs invétérés de substances hallucinogènes. Âpre au gain et adepte de l”argent facile, l”ensemble de la famille abandonna toutes les activités honnêtes, au profit d”un commerce criminel mais combien lucratif et exigeant, au fond, peu d”efforts.

    Ce cercle familial dévoyé était connu de tout le voisinage et sa célébrité avait largement dépassé les limites du quartier. Mais personne n”osait vendre la mèche aux forces de sécurité. Les voisins de tous âges craignaient -à juste raison semble-t-il- de mettre leur vie en péril. En effet, chez les T., comme dans les mafia, la violence, la raison du plus fort, régissent tous les rapports humains. Les T. étaient implacables lorsque les intérêts de la famille étaient menacés. Tout le monde avait peur d”eux. Les habitants du quartier, certainement pour masquer leur effroi d”un trait d”humour, ont baptisé "Colombie" la route que passe devant la concession des trafiquants de drogue.

    UN TERRITOIRE PROTÉGÉ.

    Personne ne pouvait se détendre véritablement dans la rue "Colombie". Dans la journée, passe encore mais à une certaine heure de la nuit, les honnêtes gens préféraient faire un grand détour que d”emprunter cette rue de triste réputation. La rue était donc abandonnée aux dealers et à leurs clients. Dans les faits, le coin est devenu le domaine réservé du trafic de drogue. Les vendeurs n”hésitaient plus à punir les innocents passants qui s”aventuraient sur "leurs terres". Ces négociants de chanvre indien avaient installé un territoire protégé au beau milieu de Bagadadji, un quartier central et emblématique de la capitale. Le centre d”approvisionnement, la famille était désignée par l”expression "poétique" "foire du haramu", le royaume des hors-la-loi.

    Samedi dernier, aux environs de 13 heures, la famille T. vécut un événement qu”aucun de ses membres n”avait prévu. Une information reçue par Alhader Maïga, le commandant de la brigade territoriale de Bamako-Coura, faisait état de la présence d”un dépôt de stupéfiants à Bagadadji, précisément chez les T. Les gendarmes n”ont pas perdu de temps, sachant que dans les milieux de la drogue comme ceux de la prostitution, l”information n”appartient pas seulement aux agents de renseignement. Les forces de répression, les consommateurs et les revendeurs de drogue se surveillent. L”alerte est donnée au moindre soupçon et la volière a tôt fait de s”égailler.

    Misant sur l”effet de surprise et la rapidité, les gendarmes ont donc opéré une descente en force dans cette famille évoluant en marge de la loi. Alhader Maïga et ses éléments ont bouclé d”emblée l”entrée de la maison. Personne ne pouvait échapper au filet tendu. Les occupants de la concession, pris de panique, couraient dans tous les sens. A défaut de s”échapper, certains s”étaient réfugiés sous leurs lits. Les autres se sont résignés et se sont laissés arrêter. Les brigadiers ont ainsi mis le grappin sur 13 personnes dont un vieux de 64 ans nommé Moussa Balla et ses garçons, Adama et Boubacar T.

    DES SEMENCES :

    Quand le calme est revenu, les pandores ont procédé à une perquisition en règle des chambres de la maisonnée. Leurs efforts ne furent pas vains. Ils découvrirent environ 200 kg de chanvre indien repartis entre 98 paquets de deux kg. Ils ont également récupéré une bouteille de semences de drogue et découvert quatre kilogrammes de cannabis emballés dans des sachets pour être directement confiés aux petits revendeurs détaillants.

    La nouvelle de l”opération conduite par les gendarmes dans la famille T. de Bagadadji, courut comme un feu de brousse pour parvenir rapidement aux oreilles des consommateurs de drogue. Ceux-ci piquèrent une vive colère à la perspective de devoir se trouver une autre "boutique" aussi bien achalandée. Certains accoururent et poussèrent l”outrecuidance jusqu”à attaquer les forces de l”ordre à coups de pierre. Les vitres d”un véhicule ont ainsi été brisées par les projectiles des toxicomanes mécontents de l”interpellation de leurs fournisseurs et de la confiscation de stocks représentant plusieurs semaines de consommation.

    Cette explosion de violence n”a pas empêché les gendarmes d”accomplir leur mission. Ils ont ramené à la brigade, les vendeurs et les colis de stupéfiants. Sur les 13 personnes interpellées, 7 ont été relâchées après audition. Les 6 autres, parmi lesquels le vieux Moussa Balla et ses garçons, s”expliqueront devant un juge d”instruction du tribunal de première instance de la Commune III. En attendant, ils dorment à la Maison centrale d”arrêt de Bamako.

    D. I. DIAWARA

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