Escroquerie : Le marabout envoûteur se fait appeler Mohamed Haïdara

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    Une sagesse mandingue dit : « le sorcier peut oublier, mais jamais sa victime. » Un escroc hors pair, âgé de 54 ans, se faisant passer pour un « marabout » faiseur de miracles, après avoir spolié un cadre de plus de 40 millions et pour lesquels il était activement recherché par la police, a terminé sa course au fond des filets de l’interpol de Bamako au début du mois de mai courant. Il n’en croit pas toujours ses yeux.

    L’escroc se fait appeler Mohamed Haïdara en lieu et place de Sidi Lamine Kounta, natif de Konan, dans la région de Mopti, domicilié à Banankabougou vers la Friperie Bakeba en Commune VI du district de Bamako. Courant octobre dernier, l’escroc et deux de ses complices, au cours de leur chasse à travers la ville de Bamako, ont aperçu un homme à côté de sa voiture entrain d’acheter du poisson non loin du flanc de la colline de Badalabougou.

     L’homme est un haut cadre du Mali dont l’identité n’a pas été révélée. Le délinquant en chef, habillé en boubou, avec sur la tête une écharpe, des lunettes noires aux yeux pour cacher son handicap visuel ainsi qu’un un chapelet en main et ses compagnons abordent le voiturier. Ils lui expliquent qu’en venant de la grande mosquée de Bamako, leur véhicule est tombé en panne en cours de route.

    Leur interlocuteur qui partait chez lui, accepte de les conduire. Arrivés aux alentours de la Tour de l’Afrique à Faladié, il a voulu les débarquer pour continuer son chemin. Mais, le marabout lui demande de l’accompagner à son domicile non loin de la friperie Bakeba, car, cette visite pourrait lui être très utile. Chose demandée, chose accordée. A leur arrivée, le faux marabout lui fait des bénédictions dans les mains. Il lui demande ensuite son numéro de téléphone pour toutes fins utiles.

    Le cadre n’en voit aucun inconvénient. Il retourne à son domicile, le cœur satisfait d’avoir rendu service à un de ses semblables. Le lendemain, un des complices du « marabout », du nom de Lamine Cissé l’appelle sur son portable sur instruction de son maître. Le petit soir, le cadre répond au rendez-vous. On le fait entrer dans une maison fumée d’encens. Quelques minutes plus tard, l’homme est devenu comme envoûté. Il accepte sans murmure tout ce qu’on lui demandait.

    Dans le pays des diables

    Les délinquants, sachant que leur sujet a mordu à l’appât, l’ont conduit au pied d’une colline à Moribabougou où ils devaient entrer en communion avec les diables du grand maître. Dans le noir, des complices du « marabout » se mettent dans la peau de diables avec des insecticides (timors ou autres) qu’ils pulvérisent au contact de la flamme d’une allumette ou d’un briquet.

    Le client de fortune qui ne comprend rien de cette supercherie, est complètement ébloui. Pour prouver que leurs djinns sont omnipotents, ils se rendent vers Baguinéda, sur la route de Ségou où ils se livrent aux mêmes scenarii. Requinqué à bloc, le cadre commence à débourser de l’argent. Il vide tous ses comptes bancaires et s’endette auprès de ses proches et amis pour gagner gros.

     Chaque jour que Dieu fait, le marabout faisait espérer son client. Mais, les sous tardent à tomber dans la cagnotte du client. Finalement, il commence à désespérer. Les soucis ont raison de lui de plus en plus. Il maigrit et l’humeur s’assombrit de jour en jour. Ses parents ne comprennent rien de son attitude. Ceux-ci le pressent de questions pour savoir de quoi il souffre.

    L’homme, par finir, lâche le morceau. Avec ses parents, le pauvre se lance aux trousses de ses escrocs. Il porte plainte contre eux au niveau du tribunal de première instance de la Commune VI. Le procureur de la République saisit le commissariat de police du 7e arrondissement par un soi-transmis. Le nommé Lamine Cissé, un des complices, est arrêté et déféré à la maison centrale d’arrêt de Bamako. Quant aux autres membres de la bande, ils se sont morfondus dans la nature.

    L’Interpol au secours

    Le procureur de la République près le tribunal de la Commune VI, très déterminé à arrêter le chef de bande, délivre une délégation qu’il adresse à l’Interpol de Bamako pour le chercher partout où il se trouve. Le commissaire principal de police Makan Coulibaly en service à l’Interpol de Bamako-Mali prend l’affaire en main. Spécialisé dans les grandes enquêtes, le policier met ses connaissances en pratique. Il procède par des recoupements dans les milieux de la pègre bamakoise.

    Au bout du compte, il apprend que le nommé Sidi Lamine Kounta alias Mohamed Haïdara se trouverait à Konan, dans la région de Mopti. Faut-il se déplacer pour aller le cueillir ? Le professionnel des enquêtes impossibles, ne juge pas nécessaire. Au cours de ses investigations, il découvre le nom d’une des victimes de l’escroc, résidant en Espagne. Ce dernier s’appellerait Jean. Un de ses informateurs se déguise en ce monsieur. Celui-ci lui téléphone pour annoncer son arrivée à Bamako et qu’il voudrait louer ses services pour une affaire importante.

    Le piège du policier réussit à merveille. L’escroc s’en presse d’atterrir à Bamako. Il loue une villa à Kalaban-Coura pour mieux appâter son client. Le commissaire principal de police Makan Coulibaly ayant su qu’il pouvait déclencher l’offensive, assiège son nouveau domicile où il le cueille comme un fruit mûr. Conduit à l’Interpol, le bandit n’a pas pu nier les faits au cours de son interrogatoire. L’officier de police ficèle son domicile pour le conduire devant le procureur de la République près le tribunal de la Commune VI.

    D’après des informations, l’homme serait l’escroc qui a, par le biais de l’escroquerie, détourné près de 400 millions de FCFA à la BIM en 1991. Il est un récidiviste notoire connu des archives de plusieurs commissariats de police et de brigade territoriale de gendarmerie du Mali. Le commissaire principal de police Makan Coulibaly promet de faire tomber le reste de la bande dans les jours à venir. Il a notre bénédiction.

    O. BOUARE

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