Hangars saccagés, des tonnes de bananes piétinées : c’est le triste bilan de la descente musclée, lundi, de policiers sur le marché de bananes de Djicoroni-Para, à l’effet de contraindre les occupants à vider les lieux.
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Le marché de bananes de Djicoroni-Para, situé à l’ouest de l’Usine céramique en Commune IV, fait encore parler de lui avec la descente musclée le 19 novembre 2007 d’une trentaine de policiers partis expulser les occupants des lieux. L’opération, la deuxième en l’espace de 5 mois, a occasionné d’énormes préjudices : destruction de hangars en tôle et en paillote des chambres froides et de plusieurs tonnes de bananes. Le tout évalué à plus de 3 millions de F CFA.
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« Nous sommes là depuis plus de 9 ans. Un beau matin, à notre grande surprise, nous avons vu des gens accompagnés de géomètres sur le site nous demandant de quitter les lieux. Ce jour-là, nous avons opposé une fin de non-recevoir à leur demande au motif que nous n’avons pas reçu de préavis. A notre surprise, le 4 juin 2007, des policiers, accompagnés d’huissiers, se sont présentés et ont procédé à la destruction des hangars se trouvant sur la parcelle. Les dégâts constatés ce jour-là frôlent les 5 millions de F CFA », explique, indigné, le porte-parole de la Fédération des organisations des producteurs de bananes, Youssouf Kéita.
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Objet du titre foncier n°282 du district, il est cependant établi dans un procès-verbal de constat de l’étude de Me Boubacar Kornio qu’il a été conclu, sur la parcelle querellée, un contrat de bail à usage professionnel avec Mamadou Lamine Dagnoko pour une durée de 10 ans renouvelable par tacite reconduction en date du 21 février 2001. C’est fort de cette garantie que M. Dagnoko a reparti l’espace entre les membres de la Fédération (5 sur 7 mètres par hangar en vue d’exploitation).
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Les membres ont alors construit des hangars conformément aux termes du contrat. « Nous savons que le domaine en question a été vendu. Mais qu’on ne nous prenne pas pour des dupes. Nous avons un contrat de bail dûment signé. Le plus écœurant, c’est qu’on ne nous a même pas saisis au moment de la vente pour nous demander si nous voulons l’acheter ou non. Au lieu de vendre la parcelle à quelqu’un d’autre, n’était-il pas bon de nous informer à toute fin utile ? » s’interroge M. Kéita.
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Les occupants du marché persistent et signent : ils ne bougeront pas d’un iota même au prix de leur sang. « Nous ne bougerons pas d’ici car nous n’avons d’autre place pour mener à bien notre activité. Nous sommes des chefs de famille et ce n’est pas les herbes qu’on va brouter. S’ils veulent nous tuer, nous allons tous mourir ici. Et les morts, ATT, qui clame haut et fort qu’il y a de l’emploi au Mali, les portera sur ses bras », menacent Moussa Traoré et Lassine Bagayogo, revendeurs de bananes.
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La descente des forces de sécurité sur le marché a suscité émoi et indignation chez les occupants dont bon nombre auraient regagné le pays dans l’espoir d’avoir quelque chose pour subvenir à leurs besoins. « J’étais installé en Côte d’Ivoire depuis des années. Mais à entendre le président ATT, le Mali c’est l’eldorado. C’est ce qui a précipité mon retour. Voilà aujourd’hui le résultat. Mon espoir, c’est ce commerce de bananes, mais il est en train de se fondre comme beurre de karité au soleil. Pourtant, dans ma famille, je nourris plus de 30 bouches », témoigne Djibril Kéita.
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En échos, Lancéni Kéita, notabilité à Djicoroni-Para, dira qu’il vaut mieux retirer à une personne sa famille que son lieu de travail. « C’est comme si on vous chasse de votre pays. Vraiment nous sommes désespérés surtout qu’on ne nous a pas indiqué d’endroit ». Parmi les producteurs de bananes, l’on dénombre 30 réfugiés ivoiriens, 10 rapatriés d’Espagne, 5 Libyens, 7 Marocains et des centaines de Maliens.
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Au début de l’imbroglio, les occupants avaient saisi la présidence de la République, les ministères de l’Agriculture et des Domaines de l’Etat, l’Assemblée nationale, le maire de la Commune IV, Issa Guindo, qui affirmait ne pas être au courant mais qu’il allait néanmoins s’impliquer pour une sortie de crise. A ce jour, elles demeurent muettes.
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Pour mémoire, la parcelle litigieuse appartenait à une entreprise de BTP dénommée Sonetra. A la liquidation de cette société, les anciens travailleurs ont constitué un GIE. C’est ce dernier qui a signé un contrat de bail avec les producteurs de bananes sur une portion de la parcelle qui est aujourd’hui au centre de la polémique.
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