De retour de son petit commerce de Bazin :Elle tombe dans le piège des philo-mans

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    Bamako est devenue la ville où règne la délinquance sous toutes ses formes. Après les vols et les viols, c’est l’escroquerie qui préoccupe cependant les acteurs sur le terrain. Malgré l’intervention des autorités et ses récits de sensibilisation propagés par les médias, les escrocs des temps modernes continuent de faire des victimes.

    La fille dont il est question se nomme couramment « La vieille » comme l’on appelle plusieurs adolescentes aujourd’hui dans la vie quotidienne. Elle remplace parfois sa mère, Safi, dans leur boutique de Basin quand celle-ci est préoccupée pour des raisons familiales ou en cas d’autres activités indispensables à leur commerce. Ce jour-là comme d’habitude, celle-ci, empêchée pour des raisons personnelles, Lavielle l’avait représentée dans la boutique.

    Après une longue journée de marchandage, elle décida de rentrer à domicile le petit soir venu, l’heure où la plupart des commerçants se retirent du grand marché. Malheureusement le marché n’avait pas été bon, mais il n’était pas aussi mauvais que ça, puisque L rentrait avec quelques 35 ou 40.000 FCFA sur elle pour sa mère Safi qui crevait de pauvreté et l’attendait avec impatience afin de régler quelques comptes financiers.

    Arrivée dans son quartier à Djicoroni, juste au détour de la rue qu’elle habite, L croisa un jeune homme marchant à pas lents et légers, qui lui demanda si elle connaissait une femme habitant dans cette rue du nom d’Oumou. Puis il ajouta : « c’est ma grande sœur, je lui ai plusieurs fois rendu visite dans cette rue, mais aujourd’hui je me suis bizarrement trompé de son domicile. » La fille très ébahie par ces propos et très humaniste répondit qu’elle ne connait aucune femme du nom d’Oumou bien que native de cette rue. Puis elle lui proposa de l’appeler sur son téléphone. Le jeune homme riposta, disant que sa chère « grande sœur » est sur répondeur, qu’il a tenté mille fois en vain de la rejoindre… Lorsqu’ils étaient en pleine conversation un autre jeune homme roulant une Djakarta, ralentit à leur côté, puis l’autre Monsieur en discussion avec la fille lui posa la même question : « Hé toi mon gars, connais-tu une femme du nom d’Oumou dans cette rue ? » ce dernier répondit non et s’arrêta tout à coup au lieu de s’en aller. Et c’est en ce moment qu’ils commencèrent à jouer le jeu, les deux complices s’étaient enfin retrouvés autour de leur proie facile. La fille quant à elle ne savait plus à qui adresser la parole lorsque le piéton demandait au motocycliste : « mon ami, je vois que tu es trop occupé à cette heure-ci, car ta mère vient juste de faire un accident routier et elle est hospitalisée, tu y dois te rendre tout de suite, suis-je en train de te mentir ? » le motocycliste sans hésitation répondit que c’est vrai. Puis le piéton ajouta qu’il a 150.000 FCFA sur lui. Le motocycliste répondit oui. Puis le piéton s’adressa alors à L qui surveillait la scène toute ahurie. Il lui proclama que sa mère avait fait un accident routier dans les temps passés. L répondit que c’était vrai. Puis il lui confirma qu’elle revenait du marché et qu’elle a plus ou moins une somme de 50.000 FCFA sur elle. L répondit encore que c’était vrai. « C’est combien au juste ? » demanda le piéton. L répondit que c’est environ 40.000 FCFA.

    Dès l’instant le piéton se dirigea vers la Djakarta, souleva la selle et fit sortir un coupon de tissu blanc, le déchira en deux autres coupons. Puis il leur demanda tous les deux de lui remettre toutes les sommes qu’ils possédaient ; c’est-à-dire les 40.000 FCFA de L et les 150.000 FCFA du motocycliste si c’était vrai. L’ordre fut aussitôt exécuté, il emballa chacune des sommes dans un coupon, puis leur remit chacun sa part en les rassurant que Dieu leur a ouvert la voie du bonheur. Puis il précisa à L qu’elle devait soigneusement se laver les mains avec du savon avant d’ouvrir son emballage afin que la multiplication de son argent soit bien réussie. Enfin il ajouta : « une fois ton argent reproduit tu trouveras une bague d’alliance là-dessus, celle-ci est la bague du succès, tu as vraiment intérêt à prendre soin d’elle.»

    Très soulagée, L courut à son domicile, salua sa mère et plongea dans sa chambre toute souriante, puis ressortit chercher du savon pour se laver les mains comme l’avait recommandé son devin. Après l’assainissement elle alla ouvrir l’emballage et découvrit un tas de papier rangés comme ses billets de banque, mais elle ne fut pas stupéfaite elle les remballa en se disant : « ce n’est pas encore transformé, je vais attendre quelques minutes.» Puis elle s’assit d’à côte. Durant cette attente sa mère l’interpella voulant savoir comment a été le marché. Elle répondit à cette question par un simple sourire enfantin dans l’espoir de retrouver l’argent reproduit dès son retour dans sa chambre. Mais ça n’eut pas été le cas, l’argent n’était pas encore reproduit pour une seconde fois. L se réconforta et se dit que la reproduction n’allait plus durer. Elle s’assit encore.
    Puis quelques minutes après elle consulta l’emballage et retrouva les mêmes billets en papiers rangés. C’est en ce moment qu’elle comprit la gravité de la situation ; elle interpella sa mère, lui expliqua qu’elle avait croisé un homme. Dès lors, celle-ci lui coupa la parole et ne l’écouta plus. Elle avait bien su que ce n’était que des philo-mans.
    Djibril Samaké

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