C’est arrivé dimanche dernier au service ORL de l’hôpital Gabriel Touré : Le Pr Alhousseïni Ag Mohamed a extrait une tranche de cola de la gorge d’un bébé de 28 jours

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    Le Pr. Alhouseyni Ag Mohamed, pour ceux qui ne le connaissent pas, est le chef du service Oto-rhino-laryngologie (ORL) de l’Hôpital Gabriel Touré. Il est donc le patron du Dr Mohamed Kéïta, inculpé et incarcéré, en même temps que son assistante en anesthésie-réanimation, Mme Dembélé Salimata Dao, à la suite du décès de l’avocate Mme Touré Aïda Niaré, pour «homicide involontaire».

    Dimanche 12 août, cet illustre praticien – il possède une renommée internationale car offrant ses compétences à des pays autres que le Mali – est intervenu pour extraire de l’oesophage d’un bébé de 28 jours une noix de cola. L’opération a été un franc succès. L’ORTM et L’Indépendant avaient été conviés pour la couvrir et en rendre compte au public. A l’heure H, le premier n’y était pas, mais le second s’y trouvait. Survenant quatre jours seulement après l’arrestation et l’emprisonnement des deux praticiens et au lendemain de «la grève illimitée» qu’ils ont occasionnée, cette intervention du Pr. Alhousseyni Ag Mohamed avait une valeur hautement instructive. Oui ou non nos praticiens sont-ils capables de réussir une telle opération ? Le succès du Pr. Alhousseyni Ag Mohamed oblige à répondre par l’affirmative. «Nous sommes habitués à ce type d’intervention… On a dit à ses parents que son état n’était pas bon pour l’évacuation. C’est son mari qui a insisté pour qu’elle soit évacuée». Ce sont là des propos qui nous ont été tenus par le Pr. Ag Mohamed.

    Dimanche 12 août, à l’hôpital Gabriel Touré. Il est 11h30. Le chef du service ORL, le Pr. Alhousseïni Ag Mohamed et son équipe au grand complet s’apprête à intervenir dans le bloc opératoire pour enlever dans l’œsophage d’un bébé de 28 jours une noix de cola. Une autre fillette de 5 ans qui a dans la gorge une piécette de dix francs CFA attendait impatiemment pour subir la même intervention. Cette dernière criait de toutes ses forces au moment où le Pr. opérait le bébé. A sa sortie du bloc opératoire, le Pr. Ag nous a expliqué que : «nous vous avons appelé pour voir un bébé de 28 jours qui a dans l’œsophage une tranche de cola. Nous venons d‘intervenir pour l’extraire. Il y a une autre fille également qui a dans l’œsophage une piécette de dix francs CFA. Nous interviendrons à ce niveau aussi. C’est pour vous dire que c’est un accident très fréquent de la même veine que celui de la défunte Mme Touré Aïda Niaré, je m’incline devant sa mémoire…

    Je suis déjà en congé, je m’apprête à aller à Gao et j’attends le dénouement de cette crise pour y effectuer le déplacement. Je quittais un mariage ce dimanche et j’étais de passage à l’hôpital lorsque j’ai vu ce cas se présenter. Immédiatement, j’ai pris les dispositions pour opérer le bébé. Entretemps, l’autre enfant est arrivé. J’ai fait prendre les dispositions administratives et médicales. J’ai fait venir, en l’occurrence, mon infirmier du bloc opératoire qui n’est pas de garde. J’ai appelé aussi l’équipe d’anesthésie de garde. Lorsque l’équipe était au grand complet, nous sommes partis en bloc opératoire pour endormir le bébé et procéder à l’extraction du corps étranger par voie endobicale (à travers la bouche). Quelque temps après l’extraction de la tranche de cola, l’enfant s’est réveillé. Ce n’est pas diabolique, c’est notre travail, nous le faisons tous les jours» a expliqué le Pr. Alhousseïni Ag Mohamed.

    S’agissant du second cas (l’enfant qui a la piècette dans l’œsophage), il a laissé entendre que son anesthésie est plus importante que celle du bébé. «Elle devait subir une oesophagoscopie. Elle a été intubée pour sécuriser les voies respiratoires».

    Dans les deux cas, le Pr. Ag a réussi avec succès à enlever les corps étrangers (voir nos photos). Entre midi et 13h, le chef du service ORL a terminé son intervention et les deux patients sont rentrés à la maison en notre présence.

    Interrogée par nos soins sur les circonstances de l’accident, Kadidia Diarra, ménagère à Daoudabougou et mère du bébé de 28 jours, Aminata Traoré, nous a répondu en ces termes : «Je suis allée au marché en laissant la petite à la maison. A mon retour, on m’a dit que nos voisins l’ont amenée à l’hôpital afin d’extraire une tranche de cola que son grand-frère de quatre ans a mise dans sa bouche. Immédiatement, je me suis dirigée vers Gabriel Touré et j’ai trouvé le Pr. Ag en train de s’occuper d’elle».

    Qui a donné à son grand-frère la cola ? «nos voisins sont des vendeurs de cola. C’est chez eux qu’il a certainement trouvé la tranche de cola. On m’a rapporté que lorsque l’enfant a longuement pleuré, son grand-frère a tenté d’extraire la tranche de cola qui s’est, malheureusement, glissée dans la gorge» a-t-elle répondu. Où est le père de l’enfant ? «Il est au marché de Kalaban-Coura où il vend des marchandises. Il n’a pas été encore informé de l’accident» nous a confié la maman du bébé.

    Le second enfant s’appelle Aminata Timbo. Agée de 5 ans, elle est évacuée à l’hôpital par un voisin garagiste répondant au nom de Drissa Diarra. Selon les dires de ce dernier, la fillette a mis dans sa bouche une piécette de dix francs CFA qu’elle avait dans la main. La pièce s’est, malheureusement, retrouvée dans l’oesophage. «L’enfant pleurait sans cesse et comme elle avait encore la faculté de parler, Aminata Timbo a expliqué à sa mère ce qui s’est passé. Et rapidement, nous l’avons amenée à l’hôpital où le Pr. Ag s’est bien occupé d’elle. Il y a eu plus de peur que de mal» nous a relaté le garagiste Drissa Diarra.

    En outre, pour le Pr. Ag, les corps étrangers dans l’œsophage ne sont pas des cas compliqués pour le service ORL. «Tous les jours, nous ne faisons que cela. Des hameçons, des prothèses dentaires, des arêtes de poisson, des boîtes de mentholatum, des boucles d’oreille, des pièces de monnaie et des noix de cola sont extraits de l’œsophage de nombreux malades. C’est notre travail quotidien. Avec la défunte Mme Touré, il n’y a eu aucune faute. Ce sont les médicaments et doses habituels qui lui ont été administrés pour l’anesthésie. Le Dr Kéïta ne l’a même pas touchée. Quand elle a quitté Bamako, son cœur battait. On a dit à ses parents que son état n’était pas bon pour l’évacuation. C’est son mari qui a insisté pour qu’elle soit évacuée» nous a expliqué le Pr Ag.

    Chahana TAKIOU

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