Cambriolage au grand marché: L’enfer rallume à Bamako

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    La bande dite du pistolet-mitrailleur, essentiellement composée d’anciens « lieutenants » du tristement célèbre délinquant Soumaïla Dao dit Ba Kara, qui faisait régner la peur dans le district de Bamako avec des pillages systématiques de boutiques et de maisons de particuliers sous la menace armée, est de retour. Sa dernière opération date du cambriolage de la boutique d’un opérateur économique sise au grand marché au cours de laquelle ils ont emporté des objets d’une valeur de plus de 13 millions de nos francs. Ce forfait a provoqué la colère de la police du 1er arrondissement qui, à son tour, a frappé fort dans la tanière des lions.
    On le sait. Depuis un certain temps, des victimes et des témoignages se succédaient dans les commissariats de police du district de Bamako pour signaler les affres d’une bande de malfaiteurs fortement armée, opérant à bord de voitures aussi bien sur la rive droite du fleuve Niger que sur la rive gauche. La Direction générale de la police nationale informée, ordonne aux différentes unités de police d’organiser nuitamment des patrouilles parfois synchronisées à travers la ville de Bamako afin de mettre le grappin sur ces nouveaux maîtres de la Cité. Dans la nuit du 7 au 8 août dernier, quelques minutes après le passage de l’équipe de patrouille du commissariat de police du 1er arrondissement au grand marché de Bamako, la bande frappe à la boutique N°307 appartenant à Mamadou Bathily, sise à l’Avenue de la République, derrière l’ex-Périsac, non loin du tribunal de la Commune III. D’après le gardien des lieux, Abdoulaye Aziz Touré, que nous avons rencontré, vers 4 heures du matin, il revenait des toilettes quand il a entendu les bruits du moteur d’une voiture s’éteindre dans l’entourage de son lieu de travail. Quelques minutes plus tard, étant devant sa piaule pour gardien, il aperçoit un individu muni d’une barre de fer avec laquelle il tentait de fracturer la porte de la boutique de son patron. A peine a-t-il tenté de le dissuader qu’un des membres du gang le surprend par derrière, permettant à un autre de pointer un pistolet automatique sur sa tête avec la ferme consigne de rester « bouche collée » au risque de le faire passer par les armes. Abdoulaye Aziz Touré reste planté comme un poteau électrique jusqu’à la fin de l’opération. Au même moment, un des cambrioleurs armé de pistolet-mitrailleur somme un gardien du voisinage de retourner immédiatement dans sa chambre. Il s’agit de Hamadou Hamidou Maïga. Foudroyé par la peur, celui-ci se blottit au fond de sa maisonnette comme un poisson plongé dans un seau d’eau, tout comme deux autres jeunes gardiens des parages. Sachant que rien ne bouge plus, les cambrioleurs activent leur machine infernale. En un temps record, ils pillent la boutique de Mamadou Bathily en emportant à bord de leur véhicule des rouleaux de tissus de Bazin riche, marque Crystal et Sabougnouma, teintés et non teintés pour femme d’une valeur de plus de 13 millions de FCFA. Le commando s’évapore dans la nature, mais tout en laissant sur place un indice de taille que la police exploitera plus tard.
     
    Le gardien libéré sain et sauf
    Abdoulaye Aziz Touré rend grâce à Dieu lorsque ses ravisseurs l’ont libéré sain et sauf. Après la minute de panique, il téléphone à son patron pour lui annoncer la terrible nouvelle. Ensuite, il se précipite au commissariat de police du 1er arrondissement, territorialement compétent pour faire la déclaration. Le chef de poste alerte aussitôt l’équipe de patrouille dirigée par l’inspecteur de police Issa Niangaly. Toute opération cessante, celle-ci fonce sur les lieux où ils ne trouveront qu’une boutique sombrée dans la désolation, ses pilleurs ayant déjà réussi à se morfondre dans la nature. La police fait alors le constat des dégâts après avoir informé le commissaire divisionnaire de police Balla Traoré dont le territoire a été violé par des envahisseurs nocturnes. Celui-ci passe en revue ses hommes avant de lâcher sur le terrain sa brigade de recherche dirigée par l’inspecteur divisionnaire de police Kalifa Mounkoro épaulée par la section de la police judiciaire que dirige l’inspecteur Oumar Diarra dit Barou.
     
    La piste Kaou, l’homme aux pistolets
    « Aucun crime n’est parfait », dit-on. Les cambrioleurs à la fin de leur opération avaient commis l’erreur de prononcer le nom de Salim, un des lieutenants de Ba Kara, récidiviste notoire, connu des archives de tous les commissariats de Bamako et de l’administration pénitentiaire pour ses activités criminelles. Celui-ci qui traînait encore le pas derrière les autres. Le gardien livre cette information à la police. Celle –ci exploite cette piste. Sous les ordres du divisionnaire de police Balla Traoré, l’inspecteur divisionnaire de police Kalifa Mounkoro et ses hommes se mettent en contact avec les autres commissariats de police du district, notamment celui du Vautour, le Contrôleur général de police Moussa Sissoko et de son insaisissable Epervier du Mandé, l’inspecteur de police Papa Mambi Keita. Cette franche collaboration se solde par la capture du suspect, domicilié à Médina-Coura non loin de l’ex-Diarra N°2 par le commissariat de police du 3e arrondissement dans la journée du jeudi 10 août dernier aux environs de 19 heures. Sommairement interrogé, le délinquant tente dans un premier temps de nier les faits. Mais, c’était sans connaître la perspicacité des enquêteurs devant lesquels il se trouvait. Broyant du noir dans sa cellule, le délinquant ne supporte plus. Dans la matinée du vendredi, 11 août, il lâche le morceau. Il dénonce les autres membres de la bande avec lesquels il a opéré dans la boutique de Mamadou Bathily au grand marché, dans la nuit du 7 au 8 août dernier. Il s’agit de Oumar Keita dit Kaou, Ousmane Traoré dit Ousmaneba et Drissa Doumbia. Il dénonce également leurs receleurs partenaires tapis au quartier populaire de Darsalam en Commune III du district. L’inspecteur divisionnaire de police Kalifa Mounkoro et ses hommes ouvrent les hostilités en fouinant dans toutes les zones criminogènes de Bamako en collaboration avec leurs homologues des autres commissariats de police. Ils parviennent à mettre la main sur Ousmane Traoré. Des déclarations des deux caïds, il ressort que Oumar Keita dit Kaou et Drissa Doumbia ont remis une bonne partie du butin à une femme du nom de M’Bamankan Doumbia, gargotière, domiciliée à Darsalam en Commune III du district de Bamako. La police procède à l’arrestation de celle-ci. C’est à l’issue d’un long interrogatoire que cette dernière a accepté de collaborer. Elle reconnaît avoir reçu des tissus de Bazin des mains de son frère Drissa Doumbia et de Oumar Keita dit Kaou contre la modique somme de 20000FCFA. Elle en a donné à ses sœurs Fatoumata Doumbia, Moussodjè Doumbia et Mariam Togola, vacancière à Doumbiala et qui entretenait des liaisons intimes avec l’un des ténors de la bande, le nommé Ousmaneba. Celles-ci sont arrêtées à leur tour. Comme leur sœur, elles reconnaissent avoir reçu ces tissus de valeur. Quelques jours après, d’autres receleurs, des teinturiers en service à Darsalam, viennent rallonger la liste. Mais, sommairement interrogés, ceux-ci rejettent en bloc les faits qui leur sont reprochés, car, il y a de cela 5 ans qu’ils ne rencontrent pas Kaou et ses « employés ». Qu’à cela ne tienne, ils sont gardés à vue pour les besoins de l’enquête. Quant aux fugitifs, tous les commissariats de police de Bamako sont mobilisés pour les faire tomber, car, ils constituent en réalité un véritable danger dans le district de Bamako. D’après des renseignements, le nommé Kaou qui se baladerait dans les rues de Bamako sur une Jakarta neuve, est armé de deux pistolets, prêt à dégainer à tout moment. Mais, il courbe l’échine le mercredi, 23 août suite à un accrochage entre lui et les forces de frappe du divisionnaire de police Balla Traoré qui l’ont mis hors d’état de nuire en plein jour au niveau du ministère de l’éducation nationale pendant qu’il était en possession d’une arme de guerre de grande portée qu’il aurait achetée avec un Guinéen en transit à Bamako. La police découvre sur le délinquant plusieurs gris-gris sensés le protéger contre tout malheur dans l’exercice de son métier de voleur. Ce qu’il avait oublié, c’est que le divisionnaire de police Balla Traoré et ses hommes ont la possibilité de faire descendre le diable du ciel. La preuve, Kaou en a eu pour son compte. Sommairement interrogé, Kaou déclare que la bande est composée d’un certain Papa, très agressif, de Salim Sanogo, et d’un certain Vieux sans d’autres précisions. Une équipe de policiers dirigée par l’Epervier du Mandé investit le terrain en vue de mettre fin à cette peste qui pollue l’atmosphère de la ville de Bamako. S’agissant de Drissa Doumbia, il se serait enfui au Sénégal après un séjour à Kita avec la complicité de certains de ses parents. En attendant de mettre la main sur cet oiseau voyageur, des têtes continuent de tomber dans le panier du divisionnaire de police Balla Traoré.
     
    Ils font figure de majesté dans les annales de la criminalité bamakoise
    Oumar Keita dit Kaou, Ousmane Traoré dit Ousmaneba, Salim Sanogo et Drissa Doumbia ne sont pas des inconnus de la justice malienne. On se rappelle, en avril 2004, la même bande constituée de Soumaïla Dao dit Ba Kara, Oumar Keita dit Kaou, Seydou Sanogo dit Zoh, Ibrahim Camara, le chauffeur de taxi de la bande, Abdou Coulibaly dit Capo, Madoudjan, Sabou et Alassane Maïga, avait transformé les rues des quartiers de la Commune II en un véritable enfer. Plus de 42 cas d’attaques à main armée à moins d’un mois ont été signalés au commissariat de police du 3e arrondissement. Dans la nuit du 3 au 4 avril 2004, le Lion de Djonkala, l’inspecteur divisionnaire de police Moussa Diarra, alors chef de la brigade de recherche et ses hommes déclenchent l’offensive. Sans grande difficulté, ils ont réussi à éteindre l’enfer en mettant le grappin sur ces prédateurs sans foi ni loi. Ils sont déférés à la maison d’arrêt pour attaques à main armée, association de malfaiteurs et vol qualifié. Malheureusement, plusieurs d’entre eux sortent de la volière de Bamako-Coura sans comparution devant le juge. Les mêmes délinquants renaissent de leurs cendres et se regroupent pour reprendre du service. Sans compter que notre infatigable police était sur leur chemin.
    Comme on ne cessera jamais de le dire, rien ne peut expliquer l’impunité accordée à un malfaiteur. Il est temps que nos magistrats prennent toute leur responsabilité dans l’application de la loi à ceux qui tuent et pillent des biens des honnêtes citoyens. Sinon, tôt ou tard, chacun répond devant l’histoire de ses actes.

    O. BOUARE

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