Les chansonnettes et les comptines ont toujours eu une emprise émotionnelle sur l’enfant, même si de nos jours elles ont tendance à être délaissées.
A la claire fontaine, Alouette, Dodo l’enfant do, sont quelques berceuses qui ont franchi les âges sans jamais se galvauder. Encore dans certaines de nos écoles, nos familles, ces comptines et de nombreuses autres chansonnettes traditionnelles sont fredonnées par les tout-petits comme « Ma yo na den ta ! Sou sou sou deni I da den ! » Qui dans notre société n’a pas fredonné ou ouï ces deux derniers refrains au moins une fois dans une famille typiquement malienne ? Il s’agit d’un air que l’on retrouve dans le répertoire musical de toutes les ethnies de chez nous. Il est transmis de bouche à oreille, d’une génération à l’autre. Comme ici chaque pays, chaque région du monde a ainsi développé depuis des siècles son répertoire de chansons enfantines qui constituent un inestimable patrimoine immatériel. Une berceuse chantée par une mère à son enfant par exemple sera reprise par cet enfant à sa descendance quelques années plus tard. Ces chansonnettes sont comme des soins corporels qu’une mère prodigue à son bébé. Les échanges physiques, apparaissent non seulement du point de vue du registre visuel, mais aussi sonore, explique Coulibaly un psychologue que nous avons rencontré.
Selon ce spécialiste le nouveau-né dispose d’un potentiel de communication qui lui permet de transmettre à la maman ou une autre personne attentive ses intentions et ses besoins. Il explique également qu’une carence maternelle n’existe pas du seul fait de l’absence de la mère, elle dépend des réactions de l’enfant, de l’attitude de la mère et de son entourage aussi. On accorde toujours une attention particulière à l’enfant en raison de sa fragilité et de l’affection qu’il procure aux parents, précise Mme Ouattara qui portait son enfant. Ainsi, l’attention d’une mère à son enfant l’amène souvent à chanter, explique-t-elle. Souvent, les mamans ne sont pas soucieuses de ce précieux moment de communion entre elles et leurs bébés. Beaucoup de femmes ne comprennent pas non plus le sens des gestes et de la mimique de l’enfant au-delà des simples besoins biologiques assure-t-elle. Ceci est perceptible notamment chez les femmes travailleuses. Celles-ci sont, le plus clair de leur temps, accaparées par leur travail. Certes il y a un temps pour le travail, mais il faut accorder plus de temps aux enfants, conseille Mme Ouattara. La mère joue un important rôle dans le développement des aptitudes de communication de l’enfant explique Coulibaly, le psychologue. L’essentiel des échanges corporels, visuels et sonores de la mère, sont toujours apaisants. Ils contribuent à maintenir ou à restituer un bien-être chez l’enfant.
Amour illimité. Cet ensemble de pratiques et d’us culturels qui entourent la naissance et la socialisation de l’enfant n’est pas un fait de hasard témoigne, Facoh Diarra sociologue à l’Institut des Sciences Humaines. Les nouvelles relations que l’enfant commence à avoir avec la mère après la naissance ne sont pas seulement d’ordre biologique. Elles sont aussi importantes pour son développement futur et son intégration sociale. Les soins et les attentions de la mère, les nuances de comportement dans son regard et sa position auprès de l’enfant, les tonalités de sa voix, se développent au fur et à mesure. C’est pourquoi, dans notre société, une vieille femme ou une femme expérimentée accompagne et assiste toujours une femme nouvellement accouchée au moins 40 jours, mais cette durée dépend des ethnies. Selon Facoh Diarra, dans la tradition de la naissance ceci permet à la nouvelle maman d’apprendre s’occuper convenablement de son bébé. Il s’agit notamment de la tétée, des soins corporels, des bercements rythmiques, de l’alternance des regards apaisants, des caresses et des chansonnettes. L’amour de la mère est toujours illimité surtout dans ses formes idéalisées que la société malienne a toujours su garder jalousement. Cette relation mère-enfant, s’ouvre largement aux représentations socioculturelles des pratiques de soins sociaux et donne une continuité des expériences de la communication interactive avec la mère. Le sociologue affirme que l’existence réelle de cette forme culturelle dans la pratique traditionnelle malienne est la diffusion constante du sentiment maternel. Les berceuses ont toujours eu une permanence émotionnelle même si cela n’est plus d’actualité chez les mamans d’aujourd’hui, se désole le sociologue tout en ajoutant que les héros épiques des grandes empires comme le nôtre étaient aussi calmés et endormis par leurs mères ou leurs amoureuses, grâce aux berceuses Ce sont autant de traditions qui se rapportent à la fois aux survivances du vécu affectif de la mère, l’amour et de l’attention sans limite à l‘égard de son enfant.
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Psychologie : ces petites phrases qu’il faut éviter avec nos enfants
Tu vas me rendre folle…
Non seulement, la mère sous-entend “tu es insupportable”, mais en plus “tu veux me faire du mal”. L’enfant se sent à la fois rejeté pour ce qu’il est et culpabilisé (il voudrait “rendre folle sa mère”). D’une certaine manière, elle fait passer à son enfant l’idée qu’elle ne l’aime que gentil et assujetti à son désir. Ce chantage affectif systématique est nocif, il oblige l’enfant à renoncer à son propre “moi” pour se plier à celui de sa mère. Il vaudrait mieux dire : “Ce que tu as fait est méchant” ou “Je n’aime pas ton comportement”. Une autre solution serait d’inverser la tonalité de la demande : “Essaye d’être plus gentil ». Ou bien encore : “Je suis étonnée de te voir faire cette chose si méchante” (ou si bête).
C’est pour ton bien !
Comment réagirions-nous si notre conjoint nous répétait à longueur de journée : “Si je te le dis, c’est pour ton bien.” ? Le problème survient, comme d’habitude, dans l’excès, lorsque le parent finit par savoir mieux que son enfant et en toutes occasions, ce dont il a besoin. L’enfant “transparent” perd ainsi le droit d’avoir son propre avis. Or, dès l’âge de raison, il sait assez bien ce qui lui convient et ce qui est bon pour lui. Il a le droit de ne pas aimer les haricots même si “c’est plein de vitamines”. Il peut préférer se promener bras nus, même si sa mère a froid, ou encore passer l’après-midi devant sa console de jeux, plutôt que de faire une promenade en forêt. Il vaudrait mieux parfois ne rien dire. Ou alors mettre l’enfant devant le fait accompli : “Je sais que tu n’en as pas envie, mais tu viens quand même, un point, c’est tout !”. Cette attitude passe mieux si l’on a pris le temps d’écouter ses réticences.
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