Belle créature dans la voiture du mari : Une raclée des plus mémorables

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    Les cris de bête blessée à mort de Roucky alertaient Ablo qui dévalait les escaliers comme un bolide lancé à toute vitesse. Il découvrait sa petite amie nue étendue sur le dos, agitant nerveusement sa tête et ses pieds, se débattant pour s’extraire des griffes de son épouse qui ne donnait point l’air d’arrêter le combat.

    Tout sautait comme une chaudière sous pression. La jalousie soudaine revêtait le manteau d’une scène terrible lorsque, surveillant d’un coin de l’œil, l’épouse découvrait une petite lumière qui s’allumait et s’éteignait dans l’habitacle de la voiture aux vitres teintées garée devant le portail. Qui pouvait être ? Pas son mari qui d’un air joyeux faisait le nœud de sa cravate dans la chambre principale de l’étage. Son appréhension lui décrivait des détails terrifiants sans qu’elle puisât les chasser. Sourire aux lèvres, nœud de cravate, lumière dans la voiture provenant probablement d’un téléphone portable, qui sait si une splendide créature ne tentait pas d’enlever son amour. Une hostilité tatillonne, maniaque, tenace apparaissait envers la personne qui attendait son mari à cette heure de la nuit. Cette présence non déclarée sur le siège avant de la Kia s’apparentait à une attaque déguisée. Elle nourrissait le sentiment d’être lésée, ridiculisée, bafouée. Sa colère intérieure était si forte qu’une explication était absolument indispensable.

    Splendide créature

    La porte de la voiture violemment ouverte laissait apparaître une jeune femme du genre correspondant à l’idéal féminin de son mari. Roucky était ce que l’on pouvait imaginer de très ravissante dans le genre ébène à Bamako, grande et fragile. Ses longs cheveux noirs retombaient sur le dos. Elle portait un pantalon Jeans moulant qui mettait en valeur un postérieur d’une rondeur époustouflante et un polo ajusté avec une belle affection de la mode actuelle qui révélait une taille d’une admirable minceur.

    Founè poussait une exclamation irritée. Bien qu’elle ne fût pas vilaine femme, elle n’atteignait pas à la cheville sa rivale. Mais la nature lui avait doté de force physique pour rendre la pièce de la monnaie à sa façon. Avec ses solides bras, elle entraînait Roucky hors du véhicule, l’administrait des coups de poings au visage, à la poitrine, partout sur le corps. Les rares coups que sa victime parvenaient à placer n’avaient pas une force déstabilisatrice. Au contraire, ils renforçaient Roucky dans son sentiment de supériorité et dans sa volonté de faire son vis-à-vis une chaire à pâtée. Et le comble de l’humiliation était de déchirer ses vêtements : ainsi à poils devant les badauds, les hommes, elle en mourait de honte. Ainsi pensé, ainsi exécuté.

    Les cris de bête blessée à mort de Roucky alertaient Ablo qui dévalait les escaliers comme un bolide lancé à toute vitesse. Il découvrait sa petite amie nue étendue sur le dos, agitant nerveusement sa tête et ses pieds, se débattant pour s’extraire des griffes de son épouse qui ne donnait point l’air d’arrêter le combat. Il giflait furieusement sa femme, se redressait et serrait les dents en vue de répéter le même geste en mettant cette fois-ci plus de puissance quand une voix rocailleuse l’ordonnait de s’en abstenir sous peine de manger son bras et sa main. Cette voix était celle de son père qui était encore éveillé alors que les aiguilles de montre marquaient 22 h 42 mn.

    Les belles âmes qui ne pouvaient supporter cette nudité humaine accouraient qui avec pagne, qui muni de pantalon, de chemisette. Et l’épouse trompée, dont le regard brillait d’un éclat mouillé sous ses deux mains, disparaissait dans un tourbillon de dentelles bleues. Le mari se confondait en plates excuses, assortie de proposition de raccompagner chez elle sa petite amie adossée au mur de clôture et qui avait revêtu des habits visiblement amples. Roucky s’efforçait héroïquement de sourire. Mais son sourire manquait de conviction. Elle se tenait sur ses gardes et ne voulait pas être prise au dépourvu. Elle regardait de droite et à gauche, soupirait en pensant : « Drôle de début de soirée en amoureux ».

    Rêve brisé

     Roucky rêvait d’admirer la boîte de nuit, de savourer les délicieux repas du restaurant et les pâtisseries fondantes du chic espace culturel dépeint par les fins connaisseurs comme un « petit paradis ». Comme annoncée, une table leur était en réservée et elle brûlait d’envie songeait de danser des heures durant, de pousser un petit cri ravi en voyant la chambre envahie de roses – ses fleurs préférées -, s’étouffer d’admiration en prenant à deux le bain du matin. Le rêve se brisait comme un château de cartes.

    Et Ablo croyait avoir trouvé en elle une perle rare qui ne rechignait pas devant le risque, en daignant s’afficher en sa compagnie jusqu’à sa porte. Roucky comprendrait qu’il fût un vrai mâle capable d’attirer dans sa tanière une splendide créature. Mais ses pronostics ne prévoyaient un pugilat qui tournerait en défaveur de sa petite amie.

    Puisque celle-ci ne se décidait pas à se lever, il s’engouffrait dans le véhicule et actionnait la clé de contact. Les mains crispées au volant, il l’invitait à nouveau de rendre place dans la voiture. Les phares trouaient la nuit. A peine la tête relevée, son regard se posait sur un homme qui se tenait immobile devant le capot et faisait des deux mains le signe de ne point bouger. Cheveux et barbe poivre sel, confortablement vêtu d’un grand boubou blanc qui dissimulait mal son ventre rebondi, il fût l’auteur de sa vie et lui comblait de tous ses besoins matériels.

    Morte de douleur

    Un événement inattendu et déplaisant qui nouait littéralement Ablo, contraint de poser pieds à terre. Il n’avait pas les ressources qu’il fallait pour se frotter à lui. Le papa, en Afrique et singulièrement au Mali, représente un tabou contre lequel il est moralement interdit de se révolter. Sans placer le moindre mot, il obtempérait à l’injonction de garer la Kia dans le garage et de rentrer se coucher.

    Boudeuse et douloureuse, l’épouse trompée faisait chambre à part. Soudain, en bas, un bruit de moteur déchirait le silence de la nuit. Les hurlements des freins d’un taxi qui s’immobilisait derrière le mur de clôture de la maison. La jeune femme, morte de douleur, trébuchait sur ses hauts talons et ne manquait pas de tomber. Elle se cramponnait au bras du chauffeur venu à son secours. Hargneuse et désespérée, Roucky écrasait juron sur juron pendant tout le long trajet conduisant chez elle.

    Georges François Traoré

     

     

     

     

     

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