Le syndicat national des chauffeurs et conducteurs routiers du Mali (SYNACOR) ne veut plus aller avec le dos de la cuillère pour obtenir la libération de leurs collègues, pour la plupart arbitrairement arrêtés et jetés dans les geôles sénégalais et dont un est lamentablement décédé le mois dernier. Déjà ils ont lancé un ultimatum relatif au blocage du trafic sur l’axe Bamako-Dakar à partir du 30 juin prochain. Un drame à éviter !
Inutile de le rappeler, la fluidité des échanges entre le Mali et le Sénégal reste une préoccupation commune et constante des autorités des deux pays. Pour rappel, pas plus tard que le mois de mai dernier , s’est tenue à Kayes une conférence transfrontalière avec la participation des deux Premiers ministres, M. Souleymane Ndéné Ndiaye (Sénegal) et Mme Cissé Mariam Kaïdama Sidibé(Mali) qui étaient accompagnés des membres de leur gouvernement, dont les ministres en charge du secteur des transport, de l’investissement et du commerce. Lesquels ont réaffirmé la ferme volonté des deux chefs d’Etat de raffermir davantage les relations séculaires d’amitié, de bon voisinage et de fraternelle coopération existant entre les deux pays.
Au-delà de ces rencontres diplomatiques, les autorités des deux pays peinent à trouver de véritables palliatifs aux obstacles qui plombent la vitalité des échanges transfrontaliers entre le Mali et le Sénégal. A savoir, les procédés tracassiers des différents postes de sécurité à l’encontre des usagers, singulièrement des transporteurs du dit axe routier. En la matière, les voisins sénégalais émergent sérieusement.
Accusations à la pelle de trafic de drogues !
En plus des tracasseries de tous genres, l’autre problème qui entravait la bonne fluidité du tronçon Dakar-Bamako était la pléthore de postes de contrôle qui y existaient. Grâce au concours des deux Etats, conformément aux directives de l’UEMOA de nombreux postes ont été supprimés au grand dam des services de forces de sécurité et des douanes, qui ont vu leurs recettes fondre comme de la glace. Depuis lors, ces agents en faction au niveau de cet axe routier ont trouvé de nouvelles méthodes, à la limite légales pour soutirer de l’argent aux routiers. Dont la plupart consistent à des soit disant saisies de drogues sur des véhicules maliens, cars, camions, citernes…
« Au début en tant que syndicat, lorsque nous avons été alertés par certains de nos militants sur les machinations et fausses accusations des douaniers sénégalais nous avons affirmé que le problème de drogue ne relève pas de notre compétence que les concernés par des moyens légaux se défendent eux-mêmes » affirme Daouda Samaké, SG du SYNACOR, avant d’ajouter qu’avec les multiplications des cas dont certains totalement abusifs, ils ont été dans l’obligation d’agir.
Aux dires de Mama Djiré, trésorier adjoint du même syndicat, le mode d’opération des gabelous sénégalais contre les transporteurs maliens est connu de tous. « Ils dissimulent de la drogue dans certains véhicules maliens, soit par l’intermédiaire d’un passager ou avec la complicité des vendeurs au bord de la route. Au poste, ils découvrent comme par magie les colis suspects à des endroits bien spécifiés que le chauffeur ignore parfois comme compartiment de bagages de son véhicule, généralement ces genres de bagages sont sans propriétaires et c’est le conducteur qui ramasse les pots cassés » témoigne notre interlocuteur. Aux dires d’autres usagers de la route, cette attitude d’abus de pouvoir des douaniers sénégalais trouve son explication en raison du fait que l’Etat sénégalais accorderait de promotion (accès au grade supérieur) à tout agent qui aurait saisie de la drogue. Et du coup, les transporteurs maliens sont devenus des victimes expiatoires des délits dont ils ne contribuent à commettre ni à l’aval encore moins à l’amont.
Le laxisme de l’Etat malien !
A en croire Daouda Samaké, secrétaire général du SYNACOR, de nos jours leur organisation syndicale a pu recenser au niveau seulement des prisons de Tambacounda, Kaolack et Dakar, près d’une trentaine de nos compatriotes routiers, écroués certains dans des conditions inhumaines comme des délinquants de grand chemin. Raison pour laquelle ils sont peu à peu entrain de perdre la vie dans ces cellules (le cas de Madou Coulibaly de la compagnie « Ben and Co », décédé le mois dernier dans une prison de Dakar). Même là, selon toujours notre interlocuteur, cette liste des chauffeurs emprisonnés n’est pas exhaustive, d’autres seraient incarcérés dans différentes maisons d’arrêt des régions du Sénégal.
Quelle a été donc l’attitude du syndicat des chauffeurs maliens pour obtenir la libération de leurs confrères ?
Aux dires du secrétaire général du SYNACOR, après avoir été alerté par certains de leurs militants, ils ont touché les autorités publiques, pour engager des actions en vue de la libération de tous les camarades conducteurs routiers du Mali détenus dans les prisons sénégalaises. Cela, avant d’adresser au MET, avec ampliation au MTFP le 12 mai dernier un préavis de grève de 72 heures allant du 26 au 28 mai 2011.
Ainsi, pour amener le SYNACOR à surseoir à son mot d’ordre, le département de tutelle sous la coupole du Directeur National des Transports Terrestres, Maritimes et Fluviaux a adopté entre autres : la création d’une commission de Suivi-Evaluation (qui devait dégager une feuille de route, une semaine après la rencontre) et la programmation d’une rencontre (72 heures après), entre le SYNACOR et le CMTR sous l’égide du CNPM.
Hélas, depuis lors l’Etat traîne dans le respect de ses engagements. « Ce n’est que le jeudi 16 juin dernier que nous avons été reçus par le CMTR qui nous a demandé de lui fournir notre liste pour une mission conjointe à Dakar » souligne Daouda Samaké, avant de poursuivre que d’ici la fin de ce mois de juin s’ils n’obtiendraient pas la libération de leurs camarades, ils seront dans l’obligation (après consultation de leur base) d’enclencher une grève générale sur l’axe Bamako-Dakar.
Affaire à suivre.
Moustapha Diawara