Affaire Youssouf Coulibaly contre FITINA : Les travailleurs attendent toujours leurs droits et salaires

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    Depuis fin octobre 2009, le Tribunal de Première instance de Kati a donné raison à Youssouf Coulibaly et ses collègues dans l’affaire qui les oppose à FITINA-Sa pour réclamations d’arriérés de salaires et de droits sociaux. Malgré cette décision de justice et la grosse exécutoire du 16 novembre de la même année, les travailleurs licenciés attendent toujours de rentrer dans leurs droits. Ont-ils été oubliés par la justice ? Leur ex-employeur serait-il au dessus de la loi ?

     

    Le 28 octobre 2009, les travailleurs licenciés de la société Fil et Tissu Naturel d’Afrique (FITINA-Sa) croyaient être arrivés au bout de leur calvaire. Ce jour, en effet, en son audience publique ordinaire, le Tribunal de travail de Kati, «statuant publiquement contradictoirement et en premier ressort : condamne la société FITINA-Sa à payer à Youssouf Coulibaly et à 200 autres, les salaires et indemnités tel qu’il résulte de l’état des salaires et indemnités de licenciement du 9 février…». Le Tribunal de travail de Kati, par cette même décision, condamne en outre la société FITINA-Sa à payer aux requérants la somme de 30 millions à titre de dommages et intérêts, et ordonne l’exécution provisoire pour la totalité des salaires et indemnités.

     

    Le 16 novembre 2009, une grosse a été délivrée au Conseil des plaignants pour que le jugement soit mis à exécution. Depuis, rien. Les plaignants courent toujours derrière leurs salaires et droits.

     

    Les faits

     

    Le 10 avril 2008, Youssouf Coulibaly et les autres travailleurs ont saisi le Tribunal aux fins de paiement de divers droits, dommages et intérêts contre leur employeur, FITINA-Sa. Comme arguments, ils soutiennent avoir été engagés en 2004, pour les uns ; et en 2005, pour les autres, par la FITINA-Sa. En 2007, toujours selon leurs explications, ils sont licenciés collectivement pour motif économique. Considérant alors que ce licenciement ne respecte pas les formes et conditions prévues par la loi, ils assignent leur employeur en justice et demandent la condamnation de celui-ci à leur payer la somme de 131 213 817 F.Cfa au titre d’arriérés de salaires, un mois de salaire au titre de l’indemnité spéciale, et 100 millions en guise de dommages et intérêts. En outre, ils sollicitent l’exécution provisoire du paiement de la  moitié des droits.

     

    La FITINA-Sa contre-attaque, d’abord en contestant la liste des requérants, arguant que certains des travailleurs ont quitté la société bien avant le chômage technique. Ensuite, en soutenant que l’usine ayant été arrêtée le 15 février 2007, elle n’avait pas à payer des salaires pour la période allant du 15 février au 26 mai 2007. Par ailleurs, selon la FITINA-Sa, les requérants n’apportent pas la preuve d’une année de présence dans l’entreprise, et donc ne peuvent pas prétendre à l’indemnité de licenciement. En outre, la FITINA estime que les travailleurs ne peuvent prétendre qu’aux salaires nets, c’est-à-dire après prélèvements des cotisations sociales, et sollicite, par jugement ADD (Avant Dire Droit), la désignation du Directeur régional du travail de Koulikoro pour la détermination du nombre des travailleurs et leurs droits respectifs après prélèvements de la cotisation INPS.

     

    Le 31 décembre 2008, ce jugement ADD a été rendu. Et c’est sur sa base que les parties ont convenu de la liste des travailleurs en cause, des droits, indemnités et salaires devant revenir à chacun des travailleurs en cause. Concernant les dommages et intérêts, le Tribunal condamne la société à payer la somme de 30 millions (au lieu des 100 millions demandés) et ordonne l’exécution provisoire pour l’ensemble des salaires et divers autres droits.

     

    Mais, malgré le caractère péremptoire de ce jugement qui ordonne une exécution provisoire, la société FITINA n’a pas encore déboursé le moindre sou. Au contraire, selon des travailleurs rencontrés, elle se livrerait à certaines manœuvres en vue de diviser l’unité de ses ex-employés. Le PDG, sollicité à plusieurs reprises, aurait refusé de les rencontrer, ne serait-ce que pour leur apporter un soutien moral. Pire, la Direction de l’usine aurait recruté, clandestinement, certains de ces travailleurs qu’elle avait pourtant licenciés, sur la base de «petits contrats» de trois mois ; ce qu’ils estiment être une violation de la législation du travail.

     

    A les entendre, depuis 2007, depuis donc quatre longues années, ils vivent dans le besoin, incapables de satisfaire le moindre de leurs besoins, car privés de salaires et de tout revenu. Le jugement rendu en leur faveur leur avait donné de l’espoir, notamment par son ordre d’exécution provisoire. Mais, force est de constater que ce jugement rendu depuis octobre 2008 n’a pas eu plus d’effet, comme si la société FITINA jouissait de solides protections. En tout cas, elle ne semble pas être près de se plier à la volonté de la justice. Aux travailleurs donc de prendre leur mal en patience. Quitte à mourir par dénuement.

    Cheick TANDINA

     

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