Affaire des moustiquaires: Le traumatisme s'installe

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    Cela fait deux jours de suite qu’un avis d’appels d’offres du Ministère de la Santé apparaît dans le quotidien national, " Essor ". Le jeudi 05 août et le vendredi 06 août 2010, l‘avis a, en effet, été publié. Cela intervient après l’annulation par les autorités compétentes d’un avis qui tenait lieu de marché gré à gré entre le département et une poignée d’opérateurs économiques de la place.

                Sommé ainsi, le département a cru devoir lancer le présent avis. Curieusement, il est largement ouvert contrairement au premier qui avait fait une large part à des néophytes du secteur. Dans la précipitation, les rédacteurs de l’avis d’appels d’offres parlent de " moustiques " en lieu et place de " moustiquaires ". L’avis est repris dans les deux parutions de l’Essor avec les mêmes incohérences.

                Toute chose qui témoigne de leur amateurisme, sinon de leur soudaine cupidité, car indique t – on, il y aurait à manger et à boire dans cette affaire de marché.

                Dans l’avis, il et question de cinq cent mille (500.000) moustiquaires, le mot moustiques n’étant pas indiqué d’autant plus que cela signifierait la disparition de toute une génération à cause du paludisme.

                Dans un pays voisin au nôtre, le Burkina Faso, avec l’appui des partenaires, ce sont huit (08) millions de moustiquaires qui furent gracieusement distribuées aux populations. Dans les prochains jours, le Gouvernement burkinabé s’apprête à élargir cet éventail. Des campagnes publicitaires sont actuellement menées dans ce sens. Elles invitent, toutes, les populations à sortir massivement afin de s’approvisionner. Du sérieux donc !

                Au Mali, les moustiquaires fournies par l’Etat sont traditionnellement acheminées dans les régions suivant des lots définis par l’avis d’appels d’offres. Problème, il n’y a souvent aucune certitude sur la destruction finale des moustiquaires. Aucun contrôle digne de nom, faute de magasins appropriés et de contrôleurs, n’est opéré. C’est pourquoi les différents marchés et rues de Bamako sont envahis par des vendeurs ambulants de moustiquaires. En toute impunité. Dès lors, l’on se rend compte que leurs fournisseurs ne pourraient être que des professionnels du secteur, agents de l’Etat.

     

    Petit rappel de l’affaire

    C’est le 11 mars dernier que la DAF (Direction Administrative et Financière) du Ministère de la Santé lança ledit marché public. Il était intitulé " Dossier de Consultation Restreinte ". Il était relatif à la fourniture sur sites de 500.000 moustiquaires imprégnées d’insecticides (MII) de longue durée d’action destinées au Programme National de Lutte contre le Paludisme (PNLP).

    Le premier lot faisait état de 210.000 moustiquaires et était destiné à la région de Sikasso et au magasin central du programme de Bamako. Le second parlait de 80.000 moustiquaires pour pouvoir gérer le District de Bamako et les régions de Gao et Kidal. La région de Ségou était prévue dans le troisième lot avec la fourniture de 25.000 moustiquaires. Celle de Koulikoro devrait recevoir 45.000 moustiquaires. Mopti aurait atteint la barre des 70.000 unités. Enfin, Tombouctou devrait recevoir cet équivalent.

                Au mépris des lois de la République, de tous les textes régissant les marchés publics, car le montant était colossal et avait l’obligation de suivre les procédures normales, le Secrétaire Général du Ministère adressa des invitations à seulement sept (07) opérateurs économiques de la place.

                L’on ignore les raisons exactes d’une telle discrimination mais tout laisse penser qu’il y avait anguille sous roche. Une odeur de corruption soufflait, en effet. Les invités avaient pour noms : Moulekafou Abdoul Wahab (Afrique Auto), Body Distribution SARL, Abdala Transport et Commerce (ATC), TRanshadibo SARL, Mamadou Simpara dit N’fa (Permanet) et les Etablissements Bee Sago de Gassama Amady.

                Les invitations étaient signées du responsable des lieux, Ousmane Touré. Ce qui devrait signifier qu’en sa qualité de Secrétaire général du département, il avait un pouvoir d’inviter les opérateurs économiques cités à concourir. La DAF qui avait lancé ledit marché public céda, donc, ses prorogatives au Secrétariat Général du Ministère. D’où le pot – aux – roses !

                Peu de temps après, le marché fut distribué  en catimini

                Sans surprise, les premiers cités eurent des parts importantes. Certains d’entre – eux ne remplissaient même pas les conditions munimales. D’autres, des novices du secteur, ayant tout simplement leur bonne entrée au département, n’ont pas fourni les documents nécessaires. Ils devraient, donc, être disqualifiés. Malgré tout, ils furent choisis et gratifiés.

                Gouvernance économique oblige, les établissements Bee Sago, présents dans le secteur depuis plus d’une vingtaine d’années, aux expériences avérées et reconnues tant par les usagers que les partenaires, refusa de se soumettre à une telle injustice.

                C’est dans ce sens que les services de l’Etat, en charge de la régulation des marchés publics furent saisis. La suite, on la connaît.

    L’indélicat marché fut annulé et le Ministère fut sommé de le reprendre ouvertement.

    Depuis quelques jours, un avis d’appels d’offres y fait référence mais avec la grosse erreur de moustiques " en lieu et place de " moustiquaires " ".

                Pour accéder au dossier, il faudrait payer la coquette somme de trois cent mille (300.000) F CFA. Toute chose qui laisse croire que le marché en question pesait lourd.

                La question est de savoir maintenant comment le marché serait réellement géré par les autorités de tutelle. Présentement, l’homme qui lança le premier avis, Ousmane Diarra de la DAF, dort en prison. Son service est décapité par les interpellations. Celui des fameuses invitations est en poste, Ousmane Touré. Saura t – il sortir du traumatisme qui frappe les siens ?

     

    B. Koné

          

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