La Cour d’assises vient de juger une des affaires les plus passionnantes de sa présente session. En effet, le mercredi 27 octobre, la Cour avait à juger une tentative de trafic international de drogue, doublée d’une corruption de fonctionnaire.
Les accusés s’appelaient Youssouf Fofana, Ismaël Barry, Fousseyni Fofana, Mariam Camara, Harouna Magassy, Karounga Paul Soumano, Modibo Traoré et Ousmane Diarra. Les faits qui leurs sont reprochés remontent au 29 octobre 2009. Ce jour-là, la Brigade Mobile d’Intervention des Douanes de Bamako est informée de l’imminence d’une opération d’expédition de cocaïne à destination de Dakar par le vol d’Air Mali de 22 heures. Aussitôt, la brigade fonce sur l’aéroport de Bamako-Sénou. Arrivé, l’équipe douanière aperçoit le véhicule dont l’indication lui avait été donnée par l’informateur. Ainsi, deux hommes à bord de la 4X4 Toyota immatriculée V-9790-MD, répondant aux noms de Youssouf Fofana et Ismaël Barry, sont appréhendés au parking de l’aéroport sans que pour autant, les douaniers retrouvent la fameuse drogue. Interpellés, Youssouf et Ismaël citeront Harouna Magassi, Fousseyni Fofana et les fonctionnaires de Police Karounga Paul Soumano et Modibo. Parmi les personnes citées, figurent également Mariam Camara et Ousmane Diarra à l’encontre desquels les recherches sont restées infructueuses. Alors, ils sont conduits à la douane où ils seront entendus avant d’être jetés en prison. Le 27 octobre, ils étaient tous à la barre, ainsi que les deux douaniers qui avaient procédé à leur arrestation, dans une salle d’audience qui refusait du monde.
A la question du président de la Cour de savoir s’ils reconnaissaient les faits, ils répondront tous par non. Selon les accusés, les éléments de la douane qui ont procédé à leur arrestation n’ont fait qu’inventer cette histoire. La preuve est qu’aucune drogue n’a été retrouvée sur eux. Ismaël Barry dira au président que le passage l’arrêt de renvoi qui dit que lui et Youssouf Fofana auraient dénoncé les autres comme étant leurs complices n’est qu’une invention des douaniers. Pour preuve, il demandera au président: "Comment les douaniers ont-ils pu arrêter les autres sans se faire accompagner par ceux qui les avaient dénoncés? Comment est-ce qu’ils ont pu avoir leur adresse et leur signalement?" Ils diront tous à la barre avoir été torturés par les douaniers.
Quant aux deux douaniers chargés de l’affaire, ils affirmeront être arrivés aux environs de 21 heures au moment où le groupe constitué de Youssouf Fofana, Ismaël Barry, Fousseyni Fofana, Mariam Camara, Harouna Magassy, Karounga Paul Soumano, Modibo Traoré s’apprêtait à faire embarquer à bord du vol 30 Kg de cocaïne dissimulés dans deux sacs à main. Le président, trouvant cette déclaration contraire à ce qui s’est passé, demandera aux douaniers pourquoi, alors, la drogue n’a pas été trouvée. Les douaniers iront alors du coq à l’âne, provoquant un tollé général dans la salle. Ils supposeront que la nommée Mariam Camara, qui n’a pas été retrouvée, se serait sans enfuie avec la drogue…
Quant aux avocats des accusés, au nombre de six, ils feront savoir que cette affaire ne devait même pas être jugée. Pour la simple raison que les accusés n’ont pas été retrouvés en possession de la drogue sensée être expédiée au Sénégal. Aucune preuve n’a été montrée à la Cour prouvant le chef d’accusation de trafic de drogue. Un des avocats défenseurs a même traité les douaniers d’incompétents, d’où leur échec lamentable dans cette affaire. Ces propos vont provoquer la colère des douaniers qui ont menacé d’appeler du renfort pour régler le compte de l’avocat.
Après les débats, les accusés seront déclarés non coupables par la Cour. Il sera aussi ordonné aux services des douanes de restituer aux accusés le véhicule saisi, la somme de 5000 dollars et d’un million de franc CFCA pris sur eux au moment de leur arrestation.
A.Guindo