La semaine de l’environnement au Mali et… ses contradictions : L’Etat malien en flagrant délit de violation de sa politique environnementale

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Usages abusifs par les compagnies minières de produits chimiques très corrosifs sous le silence complice des plus hautes autorités du pays ; constructions anarchiques de monument dans le lit du fleuve par l’Etat lui-même et au mépris du code domanial ; occupation par l’Etat et par les «nantis» des servitudes des cours d’eau… Ces constats qui contrastent avec la volonté politique affichée de l’Etat malien de sauvegarder l’environnement émanent de la Commission Nationale des droits de l’Homme.

C’est demain 1er juin, que seront lancées les activités de la semaine de l’Environnement au Mali. La semaine proprement dite s’étend du 04 au 18 juin prochain.  Occasion de voir la place qu’occupe véritablement l’environnement dans la politique  de l’Etat malien. Attention, vous serez déçus

Que fait donc l’Etat malien au moment où il vous exhorte à protéger votre environnement ? Eh bien, il viole lui-même ses propres lois ET recommandations. De quoi le discréditer aux yeux de l’opinion publique nationale et internationale.

Le rapport de la Commission Nationale des Droits de l’Homme (CNDH-Mali) révèle tous les manquements graves de l’Etat aux principes environnementaux. Le document a le mérite de situer véritablement les responsabilités quand on sait que ce sont les populations qui sont les plus généralement tenues responsables de la destruction de l’Environnement au Mali. Dans les faits, Si l’Etat n’est pas directement auteur de ces violations, il en est complice. C’est, du moins ce que révèlent les auteurs du rapport. Tour d’horizon

Le cas des compagnies minières :
« Au Mali, le constat est amer : les compagnies minières utilisent des produits chimiques hautement corrosifs, qui dégradent le sol mais, nous ne constatons aucun rapport de l’Etat rendu public sur la situation. Mieux, les mines et les carrières dégradent le paysage si ce n’est une destruction pure et simple du site qui est transformé en cratères géants. Or, le réaménagement du site est prévu».

En clair, les compagnies minières au Mali ne sont pas respectueuses de la protection de l’Environnement ni de la santé des populations. L’Etat malien non plus d’ailleurs. Le rapport poursuit…

Les  fabricants de matières plastiques
« A cela, il faut ajouter les déchets plastiques qui s’enfoncent dans le sol, en modifiant sa composition pendant longtemps. On sait que les plastiques pour la plupart ne sont pas auto bio dégradables; les emballages doivent être fabriqués à partir de matières les rendant aptes au recyclage ou à la transformation compatible avec les exigences de la protection de la santé publique et de l’environnement.

Aussi, «tout producteur de matières plastiques est tenu d’apposer son label sur celles-ci et de communiquer régulièrement les quantités produites et autres caractéristiques physico-chimiques  à l’administration compétente avant leur livraison sur le marché… D’une manière générale, de nombreux textes existent sur l’environnement, mais l’applicabilité pose problème et les seuls citoyens ne sont pas en cause.

Les textes prévoient donc des contraintes normatives  environnementales à l’endroit des  fabricants de matières plastiques. Evidemment, ces producteurs n’ont jamais été iniquités. 

La construction des routes
« Dans la plupart du temps, c’est l’Etat lui-même qui viole ses propres textes. Ce phénomène se retrouve au niveau de la construction des routes. Nous constatons que tous les arbres qui ont la malchance de se trouver en bordure d’une route en construction sont coupés sans qu’il n’y ait reboisement de l’artère après les travaux. Ce phénomène a tendance à créer des
déserts urbains, dans un pays sahélien où il fait souvent 45° à l’ombre. D’ailleurs, il n’y aura bientôt plus d’ombre sur nos routes. Cela est préjudiciable pour la santé de la grande majorité des populations qui empruntent à pied les routes pour vaquer à leurs occupations quotidiennes, surtout pour les couches vulnérables que sont les enfants de familles à revenus faibles qui se rendent à l’école à pied. S’il n’ya plus d’arbres sur les artères empruntés souvent à  pied par les petits écoliers et la grande majorité de la population qui n’a pas les moyens d’emprunter les transports publics de plus en plus chers. L’exemple le plus palpable se trouve être la construction de la route Sebenikoro-Nouvel échangeur.

Sans conteste, les problèmes liés à la pollution font peser de graves menaces sur les populations. Certes les textes de lois sont à la hauteur des souhaits, mais les moyens, le niveau de culture, l’absence d’engagement politique font que l’application fait largement défaut. Il faut encore plus de rigueur dans l’application des mesures et plus de sensibilisation au niveau des populations».
Sans commentaire !

Le cas du monument du cinquantenaire
« Ce non respect des textes par les autorités se retrouve, aussi, dans la gestion des berges des cours d’eau et autres fleuves. Le code domanial prescrit une servitude à partir des berges ; cette servitude ne doit pas être empiétée.

L’Etat en dépit de cela a fait des aménagements dans le lit même du fleuve Niger pour l’élévation d’un monument. Les populations ont emboité le pas. Aussi, c’est toute la berge du fleuve à Bamako qui fait l’objet d’empiètement au mépris du code domanial… (…).

A cela s’ajoute l’occupation des berges des marigots, cours d’eau, rivières et fleuves, au mépris du code domanial, qui impose une servitude inaliénable et imprescriptible, faisant partie du domaine public. Cette occupation, quand elle vient de l’Etat, a de quoi inquiéter et c’est ainsi que le lit du fleuve Niger à  Bamako a été obstrué par l’Etat pour élévation d’un monument alors que les places idoines ne manquent pas. Cette occupation par l’Etat et par les « nantis », empêche, souvent le citoyen ordinaire, d’avoir accès à l’eau source de vie pour tout être humain ».

Vous en souvenez-vous ? Quand les populations ont haussé le ton suite aux travaux de terrassement du lit du fleuve destiné à abriter le monument du Cinquantenaire, l’ex ministre en charge de l’urbanisme a fait une sortie maladroite pour annoncer que des études ont été menées avant les travaux et qu’il n’y avait aucune violation de la loi. Elle a assuré que les berges du fleuve seront bientôt aménagées. En clair, le gouvernement, par la voix de cette ministre légitimait par le mensonge la destruction de l’Environnement par l’Etat au nom du Monument du Cinquantenaire et des Hôtels construits dans la servitude du fleuve. 

«L’Environnement : le talon d’Achille des autorités actuelles»
Au Mali, dit-on, l’on est désormais habitué (par la force des choses) à la célébration solennelle de journées dédiées à certaines activités ou couches sociales : Journée de la femme rurale ; journée de l’enfant ; journée de l’alphabétisation et… D’importants montants sont débloqués pour les besoins de la cause : des pagnes et t-shirts confectionnés ; des manifestations folkloriques organisées ; chants, danses, discours et… plus rien après !

 La « journée dite de  l’Environnement » n’échappe pas à la règle. Elle constitue une journée comme une autre, juste une bonne  occasion pour les organisateurs de récolter quelques dividendes en nature ou espèces sonnantes et trébuchantes. Laissons les auteurs du Rapport conclure : 

«En définitive les problèmes liés à la pollution font peser de graves menaces sur les populations par la prolifération entre autres des moustiques et des rats vecteurs de maladies ou d’infections très contagieuses ou mortelles.

Des mesures vigoureuses doivent être prises pour que la réalité des textes, soit conforme au vécu quotidien des citoyens sur le terrain, afin que l’environnement ne soit plus perçu comme le talon d’Achille des autorités actuelles».
Sans commentaire !
B.S. Diarra

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