La décentralisation est en cours dans notre pays depuis près de deux décennies. La nouvelle option de gestion de l’administration des collectivités a découpé le territoire national en 703 communes. La mise en œuvre de la décentralisation implique un transfert des compétences et de ressources financières de l’Etat aux collectivités, donnant ainsi la possibilité à ces nouvelles entités administratives de générer des ressources locales, conformément aux directives définies par la loi n°96-058 du 16 octobre 1996 portant création des ressources fiscales des communes, cercles et régions dans notre pays. Depuis, l’Etat s’est quelque peu désengagé de la définition des politiques de développement local mais le transfert des ressources financières demeure un problème pour le moment sans solution.
Une étude commanditée par la Coalition « Publiez ce que vous payez », vient de le confirmer. Les résultats de cette étude ont été rendus publics vendredi à l’hôtel Massaley lors d’un atelier regroupant des responsables communaux.
La rencontre était placée sous la coprésidence du représentant du ministère délégué, chargé de la Décentralisation, Ibrahim Maïga, et celui de l’Association des municipalités du Mali (AMM), Bakary Séméga. C’était en présence de la présidente de la Coalition « PCQVP », Mme Barry Aminata Touré, et de plusieurs responsables d’ONG.
L’étude portant sur la problématique de la mobilisation et de l’utilisation de la taxe de développement régional et local (TDRL), a été conduite dans les Communes III et VI du District de Bamako.
Cette étude s’inscrit dans le cadre de la mise en œuvre d’un programme dénommé « Programme de renforcement des capacités de recherche et de plaidoyer en faveur d’une fiscalité équitable au Mali ». Ce programme est soutenu par l’ONG internationale Oxfam Novib. Il a permis de faire l’analyse des textes législatifs et règlementaires sur la fiscalité locale. L’application effective de la taxe de développement régional et local, son mécanisme de recouvrement et les contraintes liées à son application ont été passés au crible dans l’étude.
Pour la présidente de la Coalition, Mme Barry Aminata Touré, la mobilisation des ressources fiscales communales constitue un goulot d’étranglement dont les conséquences immédiates sont le ralentissement du processus de développement et de recherche du bien-être. Non pas parce qu’il n’y a pas d’opportunités, mais parce que tout simplement la mobilisation se heurte à l’incivisme généralisé des administrés, notamment en milieu urbain. Ainsi, l’étude révèle un effondrement du taux de recouvrement de la TDRL en Communes III et VI où il est passé respectivement de 68,35% en 2002 à 26,15% en 2012 et de 166,43% en 2006 à 21,33% en 2012.
Mme Barry Aminata Touré critique cette situation. « A ce niveau, il est difficile de parler de taxes destinées au développement régional et local comme son nom l’indique. La taxe ne doit pas être perçue comme une contrainte pécuniaire, mais une opportunité pour contribuer au processus du développement. Pour cela les agents des services de recettes doivent disposer des moyens nécessaires à faciliter leur travail de collecte. Le processus de la décentralisation doit aussi être correctement mis en œuvre par l’Etat afin que les collectivités puissent mettre à la disposition des communautés les services sociaux de base dont elles ont besoin », a-t-elle estimé.
Le représentant de l’AMM, Bakary Séméga, a salué une initiative susceptible de rehausser le taux de mobilisation des ressources locales. L’élu communal juge que le problème est plutôt urbain. Les collectivités rurales, constate-t-il, se montrent plus citoyennes et parviennent à mobiliser des ressources grâce à l’autorité de l’Etat. Les sous-préfets sont pour beaucoup dans cette dynamique. D’où, la nécessaire implication de l’Etat pour aider les communes à lever des fonds pour leur développement, préconise-t-il.
Le représentant du ministère délégué chargé de la Décentralisation a rappelé que la TDRL est née de la volonté d’harmoniser les taxes. C’est en 1987 qu’un séminaire national convoqué à Gao, a permis de jeter les bases d’un assainissement fiscal dans notre pays. A l’issue de ce rendez-vous national, les autorités de l’époque ont décidé de la création de la TDRL jugée appropriée au financement des politiques de développement local. Ibrahim Maïga a remercié la Coalition et son partenaire Oxfam Novib, et souhaité que l’étude soit étendue à plus de communes de notre pays.
L. DIARRA