Sacré défi que celui qui attend l’actuel et les prochains gouvernements, condamnés à proposer un nouveau modèle énergétique qui doit tenir compte de l’évolution de plusieurs facteurs tant endogènes qu’exogènes.
Inquiet de la trajectoire des cours du coton, des contre-performances de l’amont aurifère ainsi qu’une consommation interne de produits énergétiques qui va crescendo… l’Exécutif parie désormais sur le renouvelable, dont la hausse de la contribution au mix énergétique national ne fera, selon nombre d’experts, que renforcer la sécurité énergétique du pays.
La détérioration de celle-ci tient sa source de la dépendance exagérée des énergies fossiles, d’une production en tendance baissière depuis près d’une décennie, d’un potentiel conventionnel résiduel qui évolue négativement et d’une consommation nationale qui ne fait que battre des records d’année en année. Pis encore, le Mali comme bon nombre de pays de l’UEMOA sait que désormais ce sont les marchés qui fixent l’état de la rente, qui ne dépend plus des niveaux de minerais.
D’où l’urgence d’une transition vers un nouveau modèle énergétique qui, au-delà de l’investissement dans les énergies renouvelables, doit impérativement remédier à une consommation effrénée de produits énergétiques, à une politique de subventions aussi coûteuse que préjudiciable et à des faiblesses apparues dans le secteur des hydrocarbures conventionnels. Voilà qui devrait être confirmé par le plan d’action du gouvernement qui semble vouloir donner la part belle aux énergies propres, aux réformes budgétaires qui passeraient nécessairement par une révision de la politique des subventions et à des réglages réglementaires aux fins de favoriser l’investissement dans les énergies.
Annoncé il y a quelques mois, un appel d’offres international pour la production de plus de 2000 mégawatts d’origine renouvelable serait en préparation dans les cuisines du gouvernement. L’offre aurait séduit bon nombre de firmes mondiales spécialisées dans le photovoltaïque et l’éolien. Mais le projet bute, semble-t-il, sur les montages financiers appropriés, l’exigence de rentabilité et une politique de soutien des prix aussi handicapante que destructrice de richesses.
Cette politique de subventions a coûté à l’État 47,7 milliards de FCFA en 2016, dont 25,3 milliards injectés dans le soutien indirect aux prix des carburants, du gaz et de l’électricité. Il faut dire que le sujet d’un quelconque renoncement à la politique de soutien aux prix est particulièrement sensible. Cependant, de l’avis de plusieurs économistes, des milliards de nos francs peuvent être économisés sans pour autant lever le pied sur cette politique de soutien aux couches défavorisées.
Lors de ses récentes recommandations au Mali, le FMI a appelé au remplacement progressif des subventions à l’énergie, qui sont coûteuses et bénéficient surtout aux ménages aisés, par un soutien direct aux personnes les plus défavorisées. Outre leur coût budgétaire, les subventions ont également abouti à une augmentation de la consommation énergétique intérieure aux dépens des exportations.
Par ailleurs, l’investissement dans les énergies renouvelables nécessite un cadre réglementaire précis, des incitations fiscales et juridiques à l’autoconsommation, des tarifs de rachat alléchants pour le surplus de production que les clients peuvent injecter dans le réseau, des débouchés nationaux à l’industrie du solaire et de l’éolien… C’est dire qu’il s’agit d’une vraie feuille de route dont il faut disposer pour faire avancer le dossier de la transition énergétique.
Confortée par une baisse des coûts à l’international en matière d’équipement photovoltaïque et éolien et d’une tendance mondiale vers les énergies propres, le Mali doit faire vite et efficacement. Il y va de sa sécurité énergétique.
Arouna Traoré