Au démarrage des ultimes discussions, lundi dernier, le texte de compromis comprenait 950 bouts de phrases entre crochets, soit plus d’une centaine de points de divergences plus ou moins profondes entre les 195 pays parties à la Convention sur les changements climatiques. Quatorze ministres ont été nommés «facilitateurs» et ont encadré des groupes de travail spécifiques, qui devaient remettre leurs copies au lus tard jeudi matin.
Parmi les points «chauds», la question des financements, avec 18 points de divergences. A Copenhague, en 2009, les pays du Nord s’étaient en effet engagés à augmenter leur aide aux pays en voie de développement à 100 milliards de dollars par an à partir de 2020, pour les aider dans leur lutte contre le réchauffement climatique.
Le Sud veut que cette aide s’accentue au-delà de cette date et exige une plus grande transparence dans la définition de ce qui entrera ou non dans le décompte de cette somme.
Autre point de divergence important, le principe de «différenciation», qui suppose que les pays les plus responsables du réchauffement climatique soient aussi ceux qui devront faire les efforts les plus importants, notamment financiers, pour en atténuer l’ampleur et permettre de s’adapter à ses conséquences.
Plus de 110 pays, dont le nôtre, comme tout le Groupe Afrique, ont également réaffirmé leur volonté d’inscrire un objectif de réchauffement limité à 1,5°C à l’horizon 2100, contre les 2°C actuels. Cette formulation est présente entre crochets dans le texte de travail, même s’il semble qu’elle ait peu de chances de figurer dans le texte final.
Autre point à éclaircir, la fréquence à laquelle les engagements des Etats seront révisés, un délai de 5 ans ayant été proposé, sans aucune date fixée pour la 1ère révision.
Enfin, le caractère contraignant de l’accord est loin d’être garanti, car les Nations Unies n’ont aucun pouvoir de contrainte sur les Etats. L’idée de sanctions en cas de non-respect pourrait même pousser certains pays à claquer la porte et l’idée de François Hollande d’installer un «Conseil de sécurité climatique» pour faire respecter les engagements mettra certainement des années avant de devenir réalité.
Officiellement, l’agenda de la COP 21 prévoit une conclusion des négociations mercredi, suivie de vérifications légales et linguistiques et de l’adoption des décisions jeudi, avant l’adoption de l’accord vendredi. Mais, même adopté, l’Accord Climat de Paris ne sera pas signé le jour même par les parties, mais début 2016, lors d’une cérémonie organisée par les Nations Unies.
Ensuite, d’autres conférences suivront, pour préciser les termes de l’accord et le mettre en œuvre à partir de 2020, la prochaine échéance étant fixé à décembre 2016, lors de la COP 22 qui se tiendra au Maroc.
En marge de la COP 21, l’Afrique a mené un vibrant plaidoyer en direction des bailleurs de fonds pour ses deux projets-phares en matière de lutte contre les effets néfastes des changements climatiques, la sauvegarde du bassin du fleuve Niger et la Grande muraille verte.
Pour maintenir en vie le bassin du fleuve Niger, il faut mobiliser environ 3,100 milliards de dollars dans les 10 années à venir, selon les représentants des 9 pays membres de l’Autorité du Bassin du Niger (Bénin, Burkina Faso, Cameroun, Côte d’ivoire, Guinée, Mali, Niger, Nigeria et Tchad) et un peu plus que ce montant pour lutter contre la désertification dans les 11 pays de l’Agence panafricaine de la Grande muraille verte (Burkina Faso, Ethiopie, Ghana, Mali, Mauritanie, Niger, Nigéria, Sénégal, Soudan, Tchad et Togo).
L’Ambassadeur de l’ABN, Mme Cissé Mariam Kaïdama Sidibé, ex Premier ministre du Mali et ancienne Secrétaire Exécutive du CILSS (Comité inter Etats de lutte contre la sécheresse au Sahel) a appelé nos partenaires techniques et financiers à faire preuve de solidarité avec les 130 millions d’habitants de l’espace ABN.
Elle a également exhorté les pays développés, qui se trouvent être les principaux pollueurs dans le monde, à assumer leurs responsabilités s’ils ne veulent pas continuer à faire face aux vagues migratoires des populations de l’espace. “Il est normal qu’on paye aux populations de ces zones ce qui leur a été arraché: la paix, la santé, l’alimentation”, a-t-elle martelé.
Mme Cissé s’est félicitée des engagements pris par la Banque Mondiale et la Banque Africaine de dDveloppement d’assurer à hauteur de 25 % le financement du Plan d’investissement climat présenté par l’ABN pour sauver le bassin du fleuve Niger et a invité les Etats membres à inscrire 10% de l’enveloppe dans leurs budgets respectifs.
Quant à Mme Christine A. Gbedji-Vyaho, ministre de l’Eau du Bénin et Présidente du Conseil des ministres de l’ABN, elle a espéré que les institutions financières et les partenaires privés uniront leurs efforts pour sauver le bassin du fleuve Niger.
Ramata Diaouré