Dans le cadre de la protection de l’environnement dans la commune rurale de Faléa, une convention a été signée entre les autorités administratives, la Fédération locale des orpailleurs du cercle de Keniéba, le Conseil de cercle de Keniéba, la Coordination des 21 chefs de villages de Faléa, les orpailleurs des trois sites. Ladite convention a pour objectif de mettre fin à l’utilisation des produits chimiques dans l’exploitation minière artisanale dans la commune rurale de Faléa. C’est grâce au concours financier du Programme d’appui à la gestion des industries extractives (PAGIE) et de la coopération allemande (GIZ) qu’a eu lieu la signature de la convention locale de la non utilisation des produits chimiques dans l’exploitation minière artisanale à Faléa. Et c’est grâce au concours de l’Action de Solidarité en faveur des 21 villages de Faléa (ASFA21)
Préambule
La présente convention est la suite logique des efforts déployés depuis 2010 par les organisations de la société civile, les autorités traditionnelles, la Conseil Communal de Faléa, le Conseil de Cercle de Keniéba, les services techniques de l’Etat et les autorités administratives locales face à la dégradation de l’environnement, de la biodiversité, du cadre de vie et de la santé des populations entraînée par le développement et l’extension des activités minières (industrielles et artisanales) ou autres mauvaise pratiques d’exploitation des ressources naturelles du territoire communal.
La consolidation et la pérennisation des acquis obtenus, principalement grâce à l’appui et à l’accompagnement de l’association ASFA21 (Action de Solidarité en faveur des vingt (21) villages de Faléa) ainsi qu’aux soutiens financiers de ses partenaires européens (notamment la GIZ et la FRL WA), nécessitent la formalisation de l’engagement de tous les acteurs locaux dans un document à caractère contraignant, partagé et librement adopté par tous.
– Nous, acteurs locaux de développement de la Commune Rurale de Faléa, parties prenantes à l’engagement collectif, libre et volontaire, contenu dans le présent document ;
– Bien informés et sensibilisés par ASFA21 et ses partenaires techniques et scientifiques sur les graves effets du mercure, métal lourd hautement toxique, aussi bien sur tant sur la santé humaine que sur l’environnement:
– Neurotoxique, néphrotoxique, cancérigène, immunotoxique, gamètotoxique, cause d’hypertension artérielle, de cardiopathie et de la maladie de Minamata (diminution du champ visuel et de l’audition, troubles de la parole, perte de la motricité, de la sensibilité et de la coordination, tremblements, crampes musculaires, lésions du système nerveux, malformations chez les nouveau-nés) pouvant entraîner la mort;
– Contamination des matrices de l’environnement (l’eau, l’air, le sol);
– Capacité à s’accumuler et à se magnifier à travers la chaîne alimentaire, en intoxiquant tout sur son passage, et à persister dans les écosystèmes sur plusieurs générations;
– Prenant en compte les leçons importantes tirées de la catastrophe sanitaire connue sous le nom de «maladie de Minamata». Cette catastrophe est survenue il y a cinquante (50) ans dans la ville côtière de Minamata au Japon. Suite à cette pollution provoquée par les eaux usées contenant du mercure qu’une entreprise pétrochimique déversait dans la baie, les poissons et un grand nombre d’habitants, ont été empoisonnes, faisant ainsi trente mille victimes dont 22.000 décès ainsi que d’autres conséquences irréversibles;
– Conscients de la nécessité et de la responsabilité qui incombent à toutes les communautés humaines de prendre localement des mesures idoines pour empêcher qu’un tel événement se reproduise chez elles, ni dans le présent ni dans le futur, contre les générations à venir;
– Considérant l’ampleur de la pollution de la Falémé par le mercure clairement révélée par une étude de référence, or ce fleuve est également alimenté par les cours d’eau déjà pollués en zones d’orpaillage d’une part et est lui-même le principal affluent du grand fleuve Sénégal, traversant la Commune Rurale de Faléa, une partie du Cercle de Keniéba, l’Est et le Nord de la République du Sénégal et bordant une petite portion de la Mauritanie avant de s’y jeter près de Bakel d’autre part;
– Notant la préoccupation de l’Etat concernant les impacts calamiteux du mercure et de ses composantes sur les orpailleurs et leurs familles ainsi que les populations riveraines, en particulier les catégories les plus vulnérables, c’est à dire les femmes et les enfants, par leur intermédiaire les générations futures aussi;
– Constatant ses efforts en cours pour la mise en place de cadres juridiques et réglementaires et d’actions assurant une gestion rationnelle et un contrôle rigoureux de cette substance chimique très dangereuse;
– Agissant ainsi dans le cadre de la Convention de Minamata sur le mercure, signée à Kumamoto au Japon ; le 10 octobre 2013, ratifiée par le Mali, le 17 mai 2016, et entrée en vigueur, le 16 août 2017;
– Prolongeant par notre initiative au niveau local le Programme National réduction de l’usage du mercure et des produits chimiques dans l’orpaillage au Mali (2012 à 2015);
Sommes convenus de ce qui suit:
Article premier: Objectifs de la Convention
Les objectifs poursuivis par la Convention sont les suivants:
– S’inscrire dans le cadre des préoccupations et des actions de l’Etat en matière de santé publique ;
– Renforcer ses efforts dans le domaine de la protection de la santé humaine et de l’environnement contre les émissions et les rejets anthropiques de mercure et de composés du mercure
– Contribuer à une protection efficace des orpailleurs, de leurs familles, de toutes les populations de la Commune Rurale de Faléa, de leur environnement et cadre de vie contre les méfaits désastreux de l’usage du mercure dans les activités d’orpaillage artisanal ;
– Aider à promouvoir l’utilisation de technologies adaptées et pratiques d’extraction et transformation de l’or sans recours aux produits chimiques ;
– Favoriser le développement de l’orpaillage par la labellisation et la certification en commerce équitable de l’or.
Article 2: Nous nous engageons résolument à abandonner l’utilisation du mercure et des composés dans nos activités d’extraction et de traitement de l’or (amalgamation totale ou partielle du minerai, brûlage de l’amalgame à l’air libre, etc.).
Article 3: Nous cessons immédiatement tout acte de dépôt et d’éparpillement des déchets du mercure dans l’environnement immédiat et dans la nature.
Article 4: Nous nous abstiendrons d’effectuer désormais toutes opérations d’approvisionnement et activités de commerce (achat, vente, stockage) du mercure ou de ses composantes.
Article 5: Nous nous mobiliserons et nous nous concerterons dans les plus brefs délais pour mettre sur pied au niveau de chaque placer une structure spéciale de surveillance et de contrôle pour empêcher leur utilisation sur l’ensemble des sites de la Commune.
Article 6: Nous communiquerons systématiquement aux services techniques de l’Etat et structures de recherches scientifiques et universitaires, publiques et privées, nationales et étrangères, toutes les informations recueillies sur le territoire communal (circuits et réseaux commerciaux, quantités en circulation, localisation des stocks et lieux de dépôts des déchets, cas de manifestations des symptômes du syndrome de Minamata, etc.).
Article 7: Nous renforcerons par une plus forte implication les actions de l’Etat, des associations et des ONG et toutes autres initiatives en matière d’information, de sensibilisation et d’éducation sanitaire relatives au mercure et ses composés.
Article 8: Nous rechercherons les voies et moyens pour acquérir les nouvelles technologies adaptées d’exploitation artisanale de l’or sans aucun recours aux produits chimiques, maîtriser et promouvoir leur utilisation sur tous les sites d’orpaillage de la Commune.
Article 9: Nous mettrons en place très prochainement un Comité de suivi et d’évaluations périodiques de l’application de la Convention.
Article 10: Le Ministère de la Santé et de l’Hygiène Publique, le Ministère de l’Environnement, de l’Assainissement et du Développement Durable, le Ministère en charge des Mines et du Pétrole, la Chambre des Mines du Mali, le Haut-Conseil des Collectivités Territoriales (HCCT), le Conseil Economique, Social et Culturel (CESC), la Commission des Mines de l’Assemblée Nationale du Mali, les Organisations de la Société Civile (OSC) impliquées dans la gouvernance démocratique du secteur minier et la protection de l’environnement, sont les Dépositaires de la présente Convention.
En foi de quoi nos représentants soussignés, dûment mandatés et autorisés à cet effet, ont signé la présente Convention.
Fait le 29 janvier 2018