Bakari Mangane, chef bureau prévisions et alerte métrologique a Mali-Meteo : “Nous entamons la phase critique”

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La 2e phase de l’hivernage 2024 au Mali, qui vient d’être entamée en ce mois juillet, s’annonce plus humide avec “des cas de foudres et d’inondations qui restent très élevés cette année”, selon les prévisions de l’Agence nationale de la météorologie (Mali-Météo).  Le chef bureau prévisions et alerte métrologique à Mali-Météo, Bakari Mangane, dans l’entretien ci-dessous, donne plus de détails sur cette phase. Le prévisionniste fait avant un point sur l’installation de l’hivernage et sa répartition sur l’ensemble du pays.

Mali Tribune : Comment se présente la campagne pluviométrique à ce jour ?

Bakari Mangane : La campagne a été installée du point de vue pluviométrique. En ce sens que le niveau du Front intertropical (Fit) est haut et se trouve actuellement au niveau de Taoudenni jusqu’à l’extrême nord du pays. Ça veut dire que tout le pays est soumis à une entrée de mousson ces jours-ci qui permet la concrétisation d’une saison pluvieuse. Les paramètres météorologiques sont favorables dans la plupart de nos grandes villes, régions.

Mali Tribune : Est-ce que ces quantités de pluies reçues sont bien reparties sur l’ensemble du pays ?

B M. : On a eu affaire à des orages isolés qui donnent des pluies fines, souvent des pluies en bonne quantité. Dans leur évolution aussi la répartition n’est pas bonne. Il y a certaines localités qui sont plus arrosées que d’autres au cours de la formation de ces orages isolés.

Il y a d’autres localités au niveau du Sahel occidental, c’est-à-dire vers Nara, Nioro, Diéma, un peu vers Yélimané et Kayes central qui sont encore en attente de leur saison. Ces localités ont connu de la pluie, mais pas en quantité suffisante du début de la campagne à maintenant.

Mali Tribune : Ces zones doivent-elles s’inquiéter ?

B M. : C’est normal parce que la campagne commence au sud, c’est-à-dire vers la région de Sikasso pour remonter un peu vers Bamako jusqu’à Koulikoro, ensuite Ségou, Mopti.

Ces derniers temps, ces localités ont été vraiment arrosées par la pluie. Maintenant c’est la phase critique. C’est aussi la phase de semi. Comme vous le savez, la saison a commencé très tôt dans les localités de Sikasso, Koutiala, une partie de Bougouni et les localités de Yanfolila, Kolondiéba. Ces localités ont été suffisamment arrosées jusqu’à ce que les activités agricoles aient vraiment démarré. La physionomie de la saison se porte bien dans ces zones.

Quand vous remontez au niveau de Kita, Kayes-Sud notamment la localité de Kéniéba, ces localités ont reçu beaucoup de pluies. Elles font partie de la zone la plus humide du Mali après Sikasso évidemment. Les activités agricoles ont aussi commencé de ce côté-là.

Mali Tribune : Quid de Bamako et ses environs ?

B M. : Bamako et alentours ont été suffisamment arrosés. Quand vous faites le cumul de la quantité de pluies tombées du début de la campagne à maintenant, cette quantité permet suffisamment de démarrer les activités agricoles aux alentours de Bamako.

Le cas de Bamako ville est spécifique. Certaines parties ont été bien arrosées. Une grande partie aussi n’a pas reçu de pluie. Ça s’explique parce que c’est une grande ville. Bientôt, la saison va amorcer sa deuxième phase.

Mali Tribune : A quoi doit-on s’attendre durant cette deuxième phase ?

B M. : C’est la phase la plus humide de la saison qui commence ce juillet, août, septembre. Dans cette phase humide que nous venons d’entamer, les inondations sont aussi très élevées. Ça été signalé lors de notre bulletin de la prévision saisonnière pour 2024. Le cumul pluviométrique dans ces localités reste très élevé parce que ça dépasse la normale. Aussi, on a eu des cas de foudres qui ont causé des dégâts et des pertes en vies humaines au début de la campagne. Il y a eu 4 morts dans la localité de Soungolo, région de Koutiala. Il y a encore les grondements, les éclairs, même des cas de foudre qui sont très élevés cette année.

Mali Tribune : Des conseils pratiques à tenir durant cette période ?

B M. : Dans l’ensemble, la saison s’annonce bonne pourvu que la population prenne en compte la conduite à tenir d’abord même sur le choix des semences : choisir des semences qui peuvent supporter l’humidité, des variétés qui peuvent aller jusqu’au-delà de 3 à 4 mois.

Aussi, les localités doivent se préparer dès qu’il a eu un premier grondement ou éclair, déjà un premier signal de cellule orageuse : se mettre à l’abri tout de suite et ranger aussi les objets lumineux, parce que ça attire la foudre. Ensuite, je conseille aussi aux paysans et producteurs surtout au niveau de nos villages qui aiment aller s’abriter sous un arbre pendant qu’il pleut.  Les grands arbres sont l’un des obstacles les plus élevés qui attirent la foudre. L’idéal c’est de trouver une maison, un enclos fermé.

Il faut ajouter à cela les objets électriques. Quand il pleut, il faut débrancher tous les appareils électro ménagers dans nos maisons.

Pour l’usage du téléphone, il faut les éteindre carrément surtout pour nos enfants qui aiment jouer sur leur téléphone en ce moment-là. C’est extrêmement dangereux parce que ça attire la foudre. Il y a lieu de mettre un accent sur ce point en particulier. C’est aux chefs de famille de passer vérifier non seulement les installations électriques et prendre les téléphones des enfants et les éteindre carrément jusqu’à ce que l’orage passe.

Pour l’autre caractéristique de la saison, il faut dire que nous aurons affaire à une saison qui peut aller au-delà du 31 octobre. Elle peut aller jusqu’à la première décade du mois de novembre 2024.

On encourage davantage les producteurs et nous les assurons que la campagne a de beaux jours devant elle. On leur demande de se préparer et encore de travailler pour booster la production agricole.

Un dernier conseil, c’est d’éviter de réaliser des champs dans les zones à bas-fonds parce que cette année il y aura beaucoup d’eaux. Il est souhaitable de chercher des endroits un peu en hauteur où on peut cultiver nos différentes cultures. Il faut aussi déboucher les canalisations.

Du point de vue de changement climatique, la conduite à tenir est l’adaptation. C’est-à-dire faire des grandes tranchées là où il y a les écoulements d’eau et les sécuriser. Le Mali aussi regorge d’endroits qui captent de l’eau de façon naturelle, il suffit seulement d’agrandir le bassin de la retenue d’eau et de sécuriser davantage.

Les paysans peuvent continuer à faire leur travail champêtre pendant cette période. Ces tranchées vont servir d’endroit pour capter de l’eau pendant la saison des pluies. Lorsque la saison va se retirer, ces zones vont constituer une source d’approvisionnement en eau pour non seulement les braves femmes en matière de maraîchage, jardinage, d’élevage mais aussi pour les animaux

Propos recueillis par

Kadiatou Mouyi Doumbia

 

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