Agence Nationale de Gestion des Stations d’Epuration du Mali :Des dépenses sans rapport avec les besoins réels

0

En dilapidant la bagatelle de 50 millions de francs CFA, en jetant en pâture l’Agence Nationale de Gestion des stations d’Epuration du Mali (ANGESEM) à des proches tout en attribuant des marchés de fournitures à plus de 165 millions de nos francs et dans des conditions pour le moins floues, la direction a, au fil des jours, nourrit l’hostilité des partenaires. Mais surtout, celle de travailleurs, qui n’hésitent plus à réclamer la démission du dirlo, jugée salutaire pour l’avenir des stations d’épuration au Mali, désormais, en dessous des normes de traitement des eaux usées.

« Après toutes ces imprudences commises à tort ou à raison dans la gestion des stations d’épuration et des ouvrages annexes, le Directeur de l’ANGESEM doit avoir le courage de rendre le tablier. Ne serait-ce que pour le salut de son âme ».

En colère, un travailleur de l’Agence Nationale de Gestion des Stations d’Epuration du Mali –qui a requis l’anonymat –passe, outre la solidarité collégiale, pour fustiger ce qu’il appelle, volontiers, les « indélicatesses de Lamine autour de la gestion de’ l’ANGESEM ». Et d’ajouter, avec un sourire crispé : « Nous espérons qu’il le fera, avant que d’autres scandales n’éclatent au sein de l’Agence ».

Bref, en quelques jours, l’indéboulonnable dirlo de l’ANGESEM est passé de la grâce à la disgrâce. Du statut de « gestionnaire» des stations d’épuration du Mali à celui de « saigneur » des ouvrages annexes de l’Agence. Et sans transition, aucune.

Même au sein du ministère de l’environnement et de l’assainissement tout comme au niveau des services rattachés, les cadres n’hésitent plus à prendre leur distance, vis-à-vis d’un homme, devenu, subitement, encombrant.

L’ANGESEM a mis sa tête à prix. C’était, suite à l’absence de la gestion des risques liés aux substances toxiques issues de l’exploitation des stations d’épurations qui faisait que l’ANGESEM n’était pas à mesure de donner l’assurance qu’elle protège la santé de son personnel et préserve l’environnement. S’y ajoute, la colère et l’indignation des populations de Sotuba et de la Cité du Niger qui souhaitent le voir ailleurs qu’à la tête de l’ANGESEM. Au motif que tous les jours, elles sont exposées aux odeurs pestilentielles de la station d’épuration de Sotuba qui déverse dans le fleuve Niger des eaux usées sans un traitement efficace.

Pourtant, une étude de l’Institut national de la sécurité et de la santé au travail des Etats-Unis précise que le sulfure d’hydrogène présent dans toutes les stations d’épurations présente un danger immédiat pour la santé et la vie. Si les conditions de traitements des eaux usées ne sont pas respectées.

Plus grave encore, les travailleurs menacent même d’observer « des journées mortes » soit, pour contraindre le dirlo de l’Agence à revenir sur sa gestion et son choix dans l’attribution des marchés de l’ANGESEM. Et ce n’est qu’un début.

A l’origine de la descente aux enfers du « locataire » de l’Agence Nationale de Gestion des Stations d’Epuration du Mali, l’usurpation de ses prérogatives dans l’attribution des marchés. S’y ajoute, la violation des procédures d’exécution des dépenses publiques, d’année en année et l’absence de mécanisme formalisé d’évaluation des besoins et des fichiers fournisseurs.

Avec ce système, le dirlo de l’ANGESEM ne peut donner l’assurance que les commandes de la structure correspondent à des besoins de service et qu’il effectue des achats courant aux meilleurs prix. D’où, la réutilisation des mêmes documents.

A en croire nos sources, cette pratique permet au « prince » de l’ANGESEM de masquer la preuve de ses épreuves.

En choisissant Royal Haskoning pour le suivi des travaux de la station d’épuration de Sotuba, l’inamovible dirlo de l’ANGESEM, Lamine Théra semble avoir confondu « société la mieux distante » et « société la plus parlante ».

Par ce choix périlleux, le prétendant « incontournable en matière de contrat à l’Agence » vient de créer l’effet inverse.

Lamine Théra –Royal Haskoning : même odeur

En effet, comme le choix de Royal Haskoning, qui n’avait ni l’expertise ni la surface financière requise a été confirmé par Lamine Théra, l’ANGESEM s’est vu, de facto, obligée de débourser la bagatelle de plus de 100 millions de francs CFA pour le suivi des travaux de réalisation, seulement, de la station d’épuration de Sotuba. Et le hic, c’est que ce contrat d’assistance, conclut à prix d’or en avril 2008 pour une durée de 3 ans, n’affichait en octobre 2010, soit 7 mois de sa fin qu’un taux d’exécution de 45%. Pourtant, des dizaines de millions ont été déboursées pour ce contrat.

S’agissant des opérations de l’ANGESEM, elle a dépensé un montant de 165,22 millions de francs CFA initialement destiné à des services autres que ceux prévus. Et cela, sans l’autorisation du ministre des finances. Plus grave, les comptes administratifs et les rapports d’exécution des budgets certifiés par un cabinet privé pour une enveloppe de 7,99 millions de nos francs ne donnent pas une image fidèle des opérations. Pour la simple déraison que les pièces de dépenses ne sont pas conformes. Autrement dit, les dépenses sont sans rapport avec les besoins réels de l’ANGESEM. Pire, l’argent coule de source et dans d’autres sources. Un retour des vieux démons, qui n’augure rien de bon pour le Trésor Public.

« C’est inacceptable pour un pays comme le nôtre, dont les ressources proviennent, essentiellement, des taxes, de l’or et surtout du coton, dont les coûts sont soumis aux fluctuations internationales », rétorque un travailleur de l’ANGESEM.

Pour lui, seule la destitution ou la démission de Lamine Théra pourra mettre fin à cette tendance suicidaire au sein de l’ANGESEM. Non seulement pour la relance de l’économie nationale ; mais aussi, pour l’ambitieux programme d’assainissement du gouvernement.

Par ailleurs les travailleurs de l’ANGESEM sont sur les dents. Selon eux, leur message est clair : « le suivi des travaux de la station d’épuration de Sotuba et la réhabilitation de celle de Mopti demandent une technicité particulière ainsi qu’une spécificité absolue. Mais la société Royal Haskoning qui a bénéficié le marché ne dispose pas de données fiables, suffisantes et indispensables à l’exécution d’un tel marché », déclarent-ils. Avant d’asséner leur quatre vérité : « Vraiment notre directeur a surpris plus d’un à l’ANGESEM. Il étonne et détonne… »

En confiant cette structure à Lamine Théra, le gouvernement était loin d’imaginer le pire. La preuve : de sa nomination à nos jours, les irrégularités se succèdent. Sans discontinuer. Alternant, parfois avec les youyous des casseroles. Une addition trop salée pour celui en charge de l’ANGESEM.

Pour certains proches de l’indéboulonnable Lamine Théra, il est victime d’une campagne, lancée par des responsables de l’ANGESEM, décidée à s’adjuger son poste. Ceux-ci, indiquent nos interlocuteurs, auraient débloqué des sous pour lancer ce qu’ils appellent une « campagne anti-ANGESEM et anti- Lamine ».

En attendant la preuve de cette affirmation, la démission du directeur de l’ANGESEM revient au devant de l’actualité. Sans tambour, ni trompette. Après, le passage du Vérificateur dans cette structure et la publication du rapport 2010, l’homme n’est plus en odeur de sainteté avec des responsables du service.

« Pour la première fois, j’ai vu les travailleurs très remontés contre leur directeur qu’ils considéraient, jusque-là, comme un chef de bonne foi et un homme de confiance », rassure notre source, qui précise, au passage, que c’est le signe d’un désaveu cinglant.

Bref, tout se passe, aujourd’hui, comme si le dirlo de l’ANGESEM est devenu persona non gratta.

De l’avis de nos interlocuteurs, il n’est ni en odeur de sainteté avec ses collègues, ni avec le ministre de l’assainissement et de l’environnement, son employeur.

Pour les uns comme les autres, Lamine Théra n’a plus le choix : ou il rend son tablier, ou il sera démis de ses fonctions. Car, disent-ils, trop c’est trop !

En gestion comme à la guerre, l’erreur ne se pardonne guère. Elle se paie chère. Très chère.

En revanche, toutes nos démarches pour rencontrer le directeur de l’ANGESEM se sont soldées par un échec. Nous y reviendrons

Jean pierre James

Commentaires via Facebook :