Agence Nationale de Gestion des Stations d’Epuration du Mali :-50 millions de francs CFA volatilisés – Risque d’empoisonnement des populations

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L’indéboulonnable Directeur de l’Agence Nationale de Gestion des Stations d’Epuration du Mali (ANGESEM), Lamine Théra dit « Mafa » risque gros. Au cours de leurs fouilles archéologico-financières, les « cherches-leurres » de l’Administration ont, à leur corps défendant, découvert un trou de 50 millions de francs CFA dans la caisse de l’Agence.

A l’origine de ce gouffre financier, le dysfonctionnement constaté à tous les niveaux, ou presque, de l’Agence Nationale de Gestion des Stations d’Epuration du Mali. Il va de la violation, pour le moins flagrante des procédures d’exécution des dépenses publiques, à la non-transparence dans la gestion des ressources…

A en croire le rapport d’enquête, l’ANGESEM n’a jamais respecté les autorisations qui l’ont créée. L’arrêté du 31 décembre 2008 portant institution de la régie d’avances de l’Agence indique l’ouverture d’un compte bancaire pour recevoir les avances faites au régisseur. Mais dans la pratique, l’ANGESEM procède, directement, à l’alimentation de sa régie sans passer par le compte bancaire ouvert à cet effet.

Au même moment, l’analyse des dépenses de la régie fait apparaître que celle-ci a effectué des dépenses unitaires supérieures au plafond de 100.000 FCFA. Le trou, ainsi, creusé dans la caisse se chiffre à 1,88 million de nos francs.

S’y ajoute le paiement sans pièces justificatifs de la somme de 1,75 millions de francs CFA. Quant aux frais de missions, qui constituent la majeure partie des dépenses de la régie, ils ne font pas l’objet de budget prévisionnel. Le hic qui fait tilt, c’est que sur 14 ordres de mission payés, seuls 3 ont été soutenus par un budget prévisionnel. Un flop magistral.

Entre mangement et « mangecratie »
A en croire nos sources, l’ANGESEM ne dispose ni d’un mécanisme formalisé d’évaluation des besoins ni de fichiers fournisseurs. De ce fait, elle n’est pas à mesure de donner l’assurance que ses commandes correspondent à des besoins de service et qu’elle effectue ses achats courants aux meilleurs prix. Même les factures, les bordereaux de livraison ou les attestations de services faits ne portent pas la mention de la date. Et cela, en violation des dispositions du décret n°04-1866 du 24 septembre 2004 fixant la nomenclature des pièces justificatives des dépenses. Ce non-respect des procédures d’exécution des dépenses publiques induit un risque de réutilisation des mêmes documents. Et si ceci expliquait justement cela ?

Bien plus, l’ANGESEM n’a pas pris d’acte relatif à la nomination d’un comptable-matières ni à la nomination des membres de la commission de réception en violation de l’article 22 du décret du 18 septembre 1991 portant réglementation de la comptabilité-matières. Pourquoi ?

Seul le Directeur de l’ANGESEM peut y répondre. Une certitude : dans les faits c’est le dirlo de l’Agence, l’Agent comptable, le chef de la section approvisionnement ou un de ses agents qui composent la commission. Cette pratique, indiquent les enquêteurs constitue un cumul de fonctions incompatibles d’ordonnancement de comptabilisation et de réception.

En outre, l’ANGESEM ne tient pas les documents de base de la comptabilité-matières tels que les fiches-détenteur, les états d’inventaires, les fiches d’entrée ou de sortie de matériels bien qu’elle achète des quantités importantes d’articles. Aussi, les actifs de l’Agence ne sont pas sécurisés. Ce n’est pas tout.

A en croire les fouineurs, dans les deux marchés de réhabilitation de la station d’épuration de Mopti, le Dossier d’Appel d’Offres (DAO) inclut le coût du contrôle et de la surveillance des travaux avec un prix forfaitaire. Cette pratique est contraire au code des marchés. Du coup, il apparaît un conflit d’intérêt dans la mesure où l’entrepreneur paye le bureau de contrôle qui est censé le contrôler.

Quant au contrat de suivi des travaux de réalisation de la station d’épuration de Sotuba, c’est le branle-bas. Conclu en avril 2008 pour une durée de 3 ans, entre l’Etat malien et le consultant Royal Haskoning, ce contrat d’assistance technique n’affichait en octobre dernier (soit à 7 mois de sa fin) qu’un taux d’exécution de 45%.

Et comble de la « bouffecratie » à l’Agence Nationale de Gestion des Stations d’Epuration du Mali, c’est le viol des règles de la comptabilité publique d’année en année.

En 2009 et en 2010, précisent les enquêteurs, les comptes administratifs et les rapports d’exécution des budgets 2008 et 2009, certifiés par un cabinet privé pour un montant de 7,99 millions de francs CFA ne donnent pas une image fidèle des opérations. En raison des nombreuses irrégularités relatives à la non-conformité des pièces de dépenses, à la mauvaise imputation comptable et à la réalité de certaines opérations.

Bref, ce sont ces dysfonctionnements qui sont à l’origine du gouffre, constaté dans la caisse de l’ANGESEM : 50 millions de francs CFA.

Le Dirlo en taule position
Outre le mécontentement quasi-général des populations de Sotuba (lire encadré), les enquêteurs reprochent à l’ANGESEM d’avoir dépensé en 2009 et en 2010 la bagatelle de 165,22 millions de francs CFA. Initialement, destinée à des services ou des activités autres que ceux légalement prévus sans l’autorisation du ministre des finances. Autrement dit, l’argent coule de source et dans d’autres sources. Comme le Djoliba dans son lit.

Autres gaffes relevées dans la gestion du dirlo de l’AGESEM Lamine Théra, alias « Mafa », le non-reversement au trésor public d’un montant qu’elle a encaissé au titre des remboursements de crédits accordés aux agents pour l’achat de motos. Non plus, ce montant n’a pas été comptabilisé par l’Agent comptable. Rien qu’au cours de cette opération, les caisses ont saigné à hauteur de 1,10 million.

Arrive la non-justification de 3,15 millions de nos francs, au titre de la vente des dossiers d’appel d’offres pour l’exercice 2009. Un reliquat que le dirlo de l’Agence brandit comme un trophée de chasse pour combler les trous de caisse. Cette pratique n’est pas de nature à tempérer les curiosités.

Par ailleurs, la totalité des fournitures de bureau achetées pour un montant de 8,40 millions de nos francs n’a pas fait l’objet d’une réception bien que les sous aient été, intégralement, payés au fournisseur. Les articles qui n’ont pas fait l’objet de réception se chiffrent à 3,72 millions de francs CFA. Évaporé !
Aussi, certains biens achetés pour un montant de 5,24 millions n’ont pu être inventoriés. Au même moment, les enquêteurs ont relevé des irrégularités et non des moindres liées au manque d’orthodoxie financière dans un marché : la surfacturation évaluée dans cette prestation s’élève à 11,98 millions de francs CFA pour les motos, les accessoires de motos et les climatiseurs.

Décidemment, le patron de l’ANGESEM, Lamine Théra et les siens sont mal barrés. Le gouffre financier creusé au niveau de cette structure dépasse l’entendement. Pire, le service n’arrive plus à respecter ses engagements.

En clair, l’Agence Nationale de Gestion des Stations d’Epuration du Mali dans son histoire n’a jamais connu une telle hémorragie financière. Pire, elle n’a jamais été confiée à un homme, aussi controversé que Lamine Théra : pendant 4 ans, les caisses ont coulé. Les détournements ont été comptabilisés en plusieurs dizaines de millions de nos francs.

L’ANGESEM n’a pas seulement perdu de sa superbe. Elle a été vidée de son âme, vendue au diable. Et jusqu’aujourd’hui, son Dirlo n’affiche qu’une image de ruine et de désolation. Et pour cause : jamais, les gaffes au sein de ce service n’ont atteint un tel degré.

Jugée, pourtant, stratégique par le gouvernement dans sa politique d’assainissement et de traitement des eaux usées dans notre pays, l’ANGESEM n’a pas échappé à l’appétit vorace de ses responsables. Par petite touche, ils ont « sucé » les caisses, érigé le népotisme en mode de gestion. L’espoir tant suscité auprès des populations, a viré au cauchemar.

Face à toutes ces irrégularités à l’origine de la perte sèche de 50 millions de francs CFA, les enquêteurs recommandent la transmission du dossier aux autorités judiciaires. Afin, que Lamine Théra, puisse s’expliquer sur la disparition des ces fonds. Mais aussi, rendre à L’ANGESEM ce qui n’est pas à lui.
Nous y reviendrons dans nos prochaines parutions.
Jean pierre James

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