Les électeurs d’une partie du Mali seront sollicités par des milliers de candidats pendant au moins deux semaines, durée de la campagne pour l’élection des conseillers communaux, afin qu’ils votent pour les différentes listes en compétition. Ces élections se tiennent au moment où l’insécurité a atteint un niveau inquiétant jamais égalé sur toute l’étendue du territoire. La partie septentrionale du pays connait toujours un regain de tension entre communautés empêchant la tenue des élections dans la plupart de ses localités. Malgré ce constat alarmant fait par certains acteurs politiques et de la société civile le gouvernement est demeuré intraitable sur la date du 20 Novembre 2016. Voici quatre grands défis à relever pour une élection apaisée.
Après son intransigeance à organiser coûte que coûte ces élections communales le 20 Novembre 2016, en dépit de la sonnette d’alarme tirée par l’Opposition et une partie de la société civile, le gouvernement aura du pain sur la planche pour assurer une bonne organisation et faire en sorte qu’il n’y ait pas de conflits post électoraux. Déjà il peine à mettre en place les autorités intérimaires dans les cinq régions du nord. Il joue un gros risque dans l’organisation des présentes communales du 20. C’est pourquoi, il est d’une impérieuse nécessité de relever ces quatre défis majeurs, pour minimiser les conséquences d’une élection déjà contestée en amont.
Le Premier défi à relever est celui de la sécurité : Le gouvernement aura le devoir d’assurer la sécurité du matériel électoral avant, pendant et après les opérations de vote pour que la volonté populaire exprimée dans les urnes soit celle proclamée comme résultat final. Le Gouvernement devra également assurer la sécurité des électeurs afin qu’ils se rendent dans leurs bureaux de vote pour accomplir leur devoir civique sans anicroche. Ces efforts sécuritaires sont les conditions sine qua non pour des élections apaisées, fiables et dont les résultats seront acceptés par tous les candidats.
Le deuxième défi à relever est celui de la bonne organisation : l’on se rappelle qu’en 1997, la jeune démocratie malienne chèrement acquise au prix d’énormes sacrifices, a failli s’effondrer à cause de la mauvaise organisation des élections législatives. Il y a lieu de s’inquiéter quand on sait que beaucoup de circonscriptions électorales sont difficiles d’accès à cause de l’insécurité. Comment se passeront les différents processus, de l’acheminement du matériel électoral, à la sécurité des agents électoraux qu’il s’agisse des présidents de bureau de vote, des assesseurs, des délégués de la Cour constitutionnelle, de la CENI, des partis politiques ou des candidats indépendants, ou de l’acheminement des résultats dans les lieux de centralisation des résultats. Même si la MINUSMA pourrait voler au secours du Mali, mais la question demeure là où elle n’est pas présente ? Seul le Gouvernement est à mesure de répondre à cette question. Dans tous les cas de figure, Il a tout intérêt à relever cet autre défi majeur pour ne pas donner de prétexte aux opposants à ces élections de tout remettre en cause.
Le troisième défi à relever est celui du taux de participation : ces élections communales seront les deuxièmes du quinquennat d’IBK. Les premières élections organisées par le régime ont été celles des législatives de 2013 qui ont permis de renouveler l’Assemblée Nationale. La mobilisation pour une grande participation des électeurs devra être le crédo d’un Président dont l’élection, de l’avis de tous aura été un véritable plébiscite en 2013. Un désintérêt des électeurs et une faible affluence devant les bureaux de vote seront un cinglant désaveu pour le Président de la République et son Gouvernement. La question de l’inscription volontaire ou d’office des électeurs reste posée quant au mode de calcul du taux de participation dans un pays où le vote reste libre et non obligatoire.
Le quatrième défi et non le moindre, est celui de l’acceptation des résultats par tous : l’après-élection dans la plupart des pays africains, a souvent donné lieu à des contestations, voir de rejet systématique des résultats proclamés par les autorités en place. Le Mali a jusque là fait preuve de maturité en évitant les conflits électoraux, comme celui du COPPO, le Collectif des Partis Politiques de l’Opposition en 1997. Mais, la particularité de ces présentes élections communales est qu’elles se tiennent à un moment où la classe politique reste divisée sur les grandes questions de préoccupation nationale. Ces élections se tiennent également au moment où l’insécurité est grandissante et générale. Le Gouvernement pourra-t-il prendre des mesures à la dimension de ce grand rendez-vous électoral pour que le lendemain de la proclamation des résultats soit une fête dans les QG de campagne des candidats ?
En définitive, la seule équation connue est que ces élections permettront aux collectivités concernées de se doter des nouvelles autorités après plus de 7 ans de gestion des conseils communaux sortants.
Youssouf Sissoko