Le Ministre Sada Samaké poursuit son vaste chantier de reformes : Vers un Renouvellement de la CENI !

0

Pour la gestion de la délicate question du maintien ou non de la Céni dans sa formation actuelle, question qui était soumise à la réflexion des experts du ministère de l’Intérieur et de la Sécurité, lors du cadre de concertation du 19 juin 2014, il y a lieu de mener une analyse au double plan juridique et politique pour permettre une compréhension bien partagée de la situation. C’est du moins à cet exercice que s’est soumis le ministre Sada Samaké, très actif sur ce volet.

 

Au plan juridiquela loi électorale sous son chapitre II et sa section 1 traite de la Céni. I faut retenir que les réclamations et observations de la plupart des intervenants lors de la réunion du cadre de concertation sur la situation de la Céni se fondent sur l’article 17 de la loi électorale qui dispose que «le mandat de la Céni  prend fin trois mois au plus après la proclamation définitive des résultats de l’élection générale, d’élections générales successives ou du référendum». De ce fait, les notions d’élection générale et d’élections générales successives qui apparaissent dans les dispositions de l’article sus visé ont été interprétées différemment par les intervenants sur la question. Ainsi, il ressort des débats deux positions : ceux qui réclament la démission de la Céni soutiennent que les élections générales sont un ensemble d’élections comprenant la présidentielle, les législatives et les communales. Le report des communales initialement prévues en avril 2014, semble justifier à leurs yeux la fin ou l’interruption d’un processus, partant, celle du mandat d’une Céni commise à ce processus, peu importe la nature et les raisons du report.

 

Mais, pour les intervenants au nom de la Céni, le parachèvement du processus engagé en 2012 justifie à suffisance la non recomposition de la Céni dont le maintien en fonction est justifié par le report et le récent financement de ses activités par le budget national. Entre ces deux positions, le report de la date des communales, donc finalement l’intervalle de temps séparant les élections législatives des élections communales, semble être l’élément qui pose plus de problèmes. Autrement dit, si les élections communales étaient tenues à la date initialement prévue (avril 2014), il n’est pas évident que le mandat de la Céni eût été mis à l’index avec autant d’engagement et d’arguments. Alors cette attitude relèverait plus du bon sens, de la tolérance ou du consensus politique que du droit, dans la mesure où la loi n’indique pas avec précision le temps qui doit séparer les différentes élections.

Cependant, aux termes de l’article 10 de la loi électorale, «les membres de la Céni sont nommés par décret pris en conseil des ministres avant le début des opérations de révision annuelle des listes électorales précédant l’année des élections générales». Cette disposition permet de retenir que les élections communales, devant être séparées des élections générales de 2013 (présidentielle et législatives) par au moins une révision annuelle des listes électorales, devraient être précédées de la nomination de nouveaux membres de la Céni conformément aux dispositions de l’article 4 de la loi électorale. S’agissant de la précision à apporter à la notion d’élection générale, celle-ci se définit par rapport à l’élection partielle. Si la loi électorale ne donne pas une définition de l’élection générale, son esprit laisse comprendre qu’elle indique par «élection générale» une élection qui concerne tout le territoire en même temps, par opposition à «élection partielle» qui peut concerner une seule ou quelques circonscriptions électorales (législatives partielles ou communales partielles).

 

Par ailleurs, la notion «d’élection générale, de succession d’élections générales, ou de référendum» est confirmée par l’article 3 qui dispose in extenso : «La Céni est chargée de la supervision et du suivi de l’élection présidentielle, des élections générales législatives et communales et des opérations référendaires». Il est à remarquer qu’au niveau de l’article 3, l’expression «élection générale» est utilisée uniquement pour les législatives et les communales qui peuvent être aussi partielles, contrairement à la présidentielle et aux opérations référendaires qui sont obligatoirement générales parce qu’il n’est pas prévu de partielle pour ces scrutins. Donc, l’élection présidentielle est une élection générale, les législatives concernant toutes les circonscriptions sont une élection générale, les élections communales concernant toutes les communes sont une élection générale. La succession d’élections générales prévue à l’article 17 ne pourrait alors désigner que la succession d’au moins deux de ces types d’élection. S’agit-il de succession d’élections générales à intervalles irréguliers (législatives tenues trois mois après la présidentielle, communales plus d’un an, mais moins de deux ans après les législatives) pouvant justifier la non dissolution de la Céni actuelle ?

 

Comme pour la première phase de notre analyse, la question de durée d’intervalle revient ; mais cette fois avec la nuance que les communales sont une élection générale à part, détachable des autres élections générales que sont les législatives et la présidentielle. L’histoire encore récente de nos processus électoraux permet de constater que les élections générales tenues en 1997 n’ont pas été suivies sous le même mandat de la Céni que les communales de 1999. Il en va de même de celles de 2002 par rapport aux communales qui les ont suivies en 2004 et ainsi de suite jusqu’en 2012, mais toujours avec un intervalle de deux ans. L’on peut alors conclure à ce niveau que, n’eût été le décalage intervenu dans le chronogramme électoral de la présidentielle et des législatives, ces élections seraient tenues en 2012 sous un mandat de la Céni différent de celui qui aurait géré les communales en 2014. Aussi, à titre de rappel, il faut préciser que le mandat des membres de la Céni démarre avec leur nomination par décret pris en conseil des ministres avant le début des opérations de révision annuelle des listes électorales précédant l’année des élections générales.

 

Au plan politique, la création de la Céni trouve sa motivation essentielle dans la méfiance de la classe politique vis-à-vis de l’administration électorale. Sa composition reflète naturellement une préoccupation par rapport à des intérêts politiques que la présence de la société civile (qualifiée de neutre) pourrait tempérer. C’est plutôt une décision politique consensuelle en la matière qui serait souhaitable au regard du contexte politique actuel. En ce qui concerne les suggestions, à la faveur de la recomposition du paysage politique et de la prorogation du mandat des Conseils des collectivités territoriales, il serait souhaitable de mettre en place une nouvelle Céni conformément aux dispositions de l’article 4 susvisé pour superviser et suivre les prochaines élections communales et régionales.

 

Au regard de tout ce qui précède, en décidant ainsi de la mise en place de la nouvelle Céni, le ministre de l’Intérieur et de la Sécurité, Sada Samaké, a vu juste. Et comme nous l’écrivions dans notre publication passée, cet homme d’écoute entend tout mettre en œuvre pour que ces futures joutes électorales régionales et communales soient une réussite totale. Condition sine qua non pour sortir notre pays de l’ornière.

Bruno LOMA

Commentaires via Facebook :