Depuis le 18 août 2020, notre pays se trouve dans un processus de transition qui prendra fin le 26 mars 2024 par le transfert de pouvoir aux autorités élues. D’ici à cette échéance et conformément aux recommandations des Assises nationales de la refondation, les autorités de la Transition se sont engagées, dans deux chronogrammes convenus avec la Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’ouest (CEDEAO). Un engagement qui porte sur 5 réformes politiques et institutionnelles à entreprendre avant d’organiser des élections.
Ces réformes traduisent une ferme volonté de refonder l’Etat malien afin qu’il «réponde aux aspirations profondes et légitimes de notre peuple à la paix, à la sécurité, à la bonne gouvernance, au développement et à la stabilité institutionnelle durable au Mali». Et force est de reconnaître que, contrairement à ce que l’Elysée et ses «ambassadeurs africains» tentent de faire croire au monde, des avancées majeures ont déjà été réalisées. Il s’agit, entre autres, de la promulgation de la loi électorale qui comprend (entre autres) la création de l’Autorité Indépendante de Gestion des Elections (AIGE), dont l’installation est à un stade avancé ; la mise en place d’une commission composée d’éminentes personnalités de toutes les composantes de la société malienne, chargée de la rédaction de la nouvelle constitution…
Et cela malgré que notre pays soit «le seul pays au monde» dans lequel se superposent et se déroulent simultanément 4 types d’insécurité. «Le terrorisme, les conflits communautaires manipulés par les terroristes et leurs sponsors étatiques étrangers, la criminalité transnationale organisée et les actions violentes d’individus isolés», a énuméré le Colonel Abdoulaye Maïga à la tribune de l’ONU.
Et parallèlement à ce processus de retour à l’ordre constitutionnel, a-t-il rappelé, «le Mali continue de mener une lutte sans merci contre les acteurs de l’insécurité, en particulier les groupes extrémistes et qui sont responsables de toutes sortes d’abus contre nos paisibles populations». Ce qui fait que «les groupes terroristes ont été sérieusement affaiblis et la peur a même changé de camp».
N’empêche que ces «groupes criminels gardent encore et toujours une certaine capacité de nuisance dans leurs tentatives désespérées de porter atteinte à notre intégrité territoriale et de terroriser nos populations». Heureusement que les vaillantes Forces de défense et de sécurité (FDS) du Mali restent «déterminées à faire face à toutes les menaces, d’où qu’elles viennent»…
Le Premier ministre par intérim a profité de l’occasion pour mettre l’accent sur les efforts des autorités de la Transition pour recruter, former, équiper et renforcer les capacités opérationnelles des FDS.
M.B
« Tout ce qui est excessif est insignifiant. » Voilà ce que l’on pourrait rétorquer au Premier ministre malien par intérim, Abdoulaye Maïga, qui a multiplié les critiques virulentes à la tribune de l’Assemblée générale des Nations unies, notamment à l’égard du président nigérien, Mohamed Bazoum.
Le colonel Abdoulaye Maïga n’a pas été tendre avec ceux qui exigent un calendrier raisonnable pour la fin de la transition et indiquent la porte de sortie à la junte malienne. Il a ainsi tenu un discours au lance-flammes contre le secrétaire général de l’ONU, António Guterres, auquel il a dénié la qualité de « chef d’État » ; contre le président bissau-guinéen et président en exercice de la Conférence des chefs d’État et de gouvernement de la Communauté économique des États d’Afrique de l’Ouest (Cedeao), Umaro Sissoco Embaló ; et contre le président ivoirien Alassane Ouattara. Mais le Premier ministre malien a réservé sa charge la plus violente au président nigérien, Mohamed Bazoum, qualifié « d’étranger qui se réclame du Niger ». Un comble.
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Son seul péché est d’avoir exhumé un secret de polichinelle : la montée en puissance des jihadistes depuis le retrait du Mali de la force française Barkhane, et le risque, réel, de voir la ville de Ménaka, frontalière de son pays, passer sous le contrôle des terroristes. À mots à peine couverts, Mohamed Bazoum a pointé l’incapacité de la junte malienne à obtenir des résultats probants en matière de sécurité, laquelle a servi de prétexte au double coup d’État. Il a également fustigé l’inefficacité des mercenaires de Wagner dans la lutte contre le terrorisme, en dépit de leur déploiement sur le terrain aux côtés des Forces armées maliennes (FAMA).
Surenchère langagière
On se souvient qu’en juillet 2021, le président nigérien avait vertement critiqué la propension des colonels maliens à renverser les régimes démocratiquement élus, après des revers militaires. « Il ne faut pas permettre que les militaires prennent le pouvoir parce qu’ils ont des déboires sur le front […], que les colonels deviennent des ministres ou des chefs d’État », avait-il déclaré lors d’une conférence de presse commune avec son homologue français Emmanuel Macron. Des propos qui avaient suscité la « vive protestation » des autorités maliennes.
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Manifestement, les critiques du président nigérien leur sont restées en travers de la gorge, et elles cherchaient l’occasion de lui rendre la pareille. En le qualifiant « d’étranger qui se réclame du Niger », Abdoulaye Maïga persiste dans la surenchère langagière à laquelle il nous a habitués, au mépris des sacro-saintes règles de bienséance qui caractérisent les relations entre les pays « frères » d’Afrique. Au-delà du fait que ce discours incendiaire va malheureusement à l’encontre des « solides relations d’amitié et de fraternité » entre les peuples nigérien et malien, il porte surtout les germes d’un prochain affrontement fratricide entre les deux pays.
Pseudo-nationalistes
On s’étonne que des gens qui se proclament panafricanistes à longueur de discours en soient réduits à traiter d’autres Africains « d’étrangers ». En vérité, le panafricanisme bruyant dont se targuent les militaires maliens, ainsi que leurs soutiens stipendiés par les Russes, se heurte ainsi à leur véritable nature : ce sont de pseudo-nationalistes assoiffés de pouvoir.
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Nous sommes d’autant moins surpris que des sources bien informées nous ont indiqué qu’en prenant connaissance du communiqué final publié à l’issue du sommet extraordinaire de la Cedeao, le 22 septembre dernier à New York, le chef de la junte malienne, Assimi Goïta, aurait exulté. Comme un caïd de cours de récréation, le président de la transition aurait été manifestement content d’apprendre l’annonce de la venue prochaine de trois chefs d’État pour tenter d’obtenir la libération des 46 soldats ivoiriens toujours détenus à Bamako.
Instabilité chronique
Ni la condamnation, « avec fermeté », de l’incarcération de ces militaires ivoiriens par la Conférence des chefs d’État et de Gouvernement de la Cedeao, ni la dénonciation du « chantage » exercé par les Maliens dans cette affaire, n’ont gâché son plaisir. Bien au contraire : le plus important pour lui, c’est que de vrais chefs d’État, qui n’ont pas eu besoin d’usurper la souveraineté nationale chez eux, feront le déplacement de Bamako pour le supplier de libérer les « militaires otages », selon la terminologie des officiels ivoiriens. Lui qui entend troquer son uniforme militaire contre un costume respectable de président élu à la faveur d’une farce électorale qu’il compte organiser à l’issue de la transition.
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Les militaires au pouvoir au Mali oublient une chose : les pays de la Cedeao auxquels ils ont pris l’habitude de s’attaquer avec virulence ont suffisamment de leviers pour créer, et entretenir, une instabilité chronique au Mali. Parce que des millions de Maliens vivent dans ces pays-là, le pouvoir malien aurait tort de considérer le refus de l’escalade des autres chefs d’État comme une faiblesse. Personne n’a intérêt à ce que la situation dégénère, ou se transforme en une guerre de pauvres.
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