La crise couvait depuis la veille du premier tour de l’élection présentielle tenu le 27 juillet dernier. Mais, elle éclata ainsi, à la veille de la confirmation par le gouvernement du report de la date des législatives, initialement prévues les 28 octobre et 18 novembre 2018. Les sieurs Amadou Bah et Béfon Cissé, respectivement président et 1ier questeur de la CENI ont été destitués par une majorité des autres membres de la Commission conformément à l’article 59 du règlement intérieur de la CENI. Cela à l’issue d’une plénière extraordinaire tenue le lundi 23 octobre dernier. Ils sont accusés d’indiscipline budgétaire.
C’est désormais Me Issiaka Sanogo qui assure les destinées de la Commission Electorale Nationale Indépendante (CENI) avec M. Evariste Fousseyni Camara comme premier questeur. C’est ce qui ressort de la plénière extraordinaire, tenue le lundi 23 octobre 2018 et qui a réuni 8 des 15 commissaires de la structure. Le nouveau président et son questeur ont été présentés à la presse le jeudi 25 octobre 2018 à la Maison de la Presse. Cette rencontre a été mise à profit pour expliquer largement aux hommes de médias les errements des sieurs Amadou Bah et Béfon Cissé. En effet, il est reproché aux désormais anciens, président Amadou Bah et au questeur Béfon Cissé une indiscipline budgétaire.
«La responsabilité, le devoir et le service de la patrie nous imposent de vous livrer en ces moments importants de notre processus démocratique, la réalité de la CENI » a introduit ainsi Me Issiaka Sanogo, le tout nouveau président de la CENI. Pour lui, depuis quelques mois cette institution traverse une crise aigüe de gouvernance et de transparence qui avait abouti à une tentative de médiation du Conseil national des organisations de la société civile du Mali. «Ce jour-là, une majorité écrasante de commissaires mettaient en cause la violation du Règlement intérieur de la CENI, son manuel de procédure, le non-respect des décisions de la plénière, la gestion clanique de la structure et l’affairisme du président Amadou Bah et de son 1ier questeur M. Béfon Cissé » rappelle pour la circonstance le nouveau président de la CENI. En plus, il expliquera que c’est grâce à la grande sagesse des commissaires et à la promesse ferme de M. Amadou Bah de corriger l’ensemble de ces dysfonctionnements que la majorité des commissaires a accepté d’enterrer la hache de guerre à l’aube d’un processus électoral des plus hasardeux.
Mais malheureusement, pour notre interlocuteur, ces tares dénoncées par tous les démembrements de la CENI, réunis à Bamako, n’ont fait que s’amplifier à la veille de l’élection présidentielle. Me Issiaka Sanogo a déploré le retard de paiement des salaires et indemnités qui, selon lui est dû à la mauvaise gestion de l’ancien président. «Nous sommes à quatre mois d’arriérés pour les indemnités de l’ensemble des démembrements de l’intérieur et de l’extérieur sans compter les arriérés des indemnités des commissaires. A ce jour les 661 délégués de Niafounké et de Tenenkou ne sont pas payés».
Les autres membres du bureau de la CENI présents à cette conférence de presse ont tous unanimement appuyé le nouveau président dans leur intervention. Pour eux, les sieurs Bah et Cissé se comportaient comme dans leur propriété privée. «Ils prenaient seuls les décisions sans consulter les autres membres du bureau. Toute chose qui constitue une violation flagrante du règlement intérieur. Aussi, les deux destitués émettent des chèques sans souches. Egalement, ils engageaient des dépenses sans consulter les autres membres. Cette situation a été de nature à créer une tension de trésorerie et le personnel des délégations régionales sont sans salaires depuis quatre mois. Car, les sieurs Bah et Cissé auraient utilisés l’argent des salaires pour l’achat des véhicules. Ainsi, selon nos sources, la CENI, au moment de son installation, devrait acquérir des voitures sur deux ans. Mais au lieu de cela, elle a acheté toutes les voitures prévues. Mieux, le président et le questeur se sont permis de payer le fournisseur en une tranche et en intégralité. Alors même que rien ne les pressait. Notre source soutient que les deux hommes auraient perçu des ristournes sur ce marché de passation. Donc, ils auraient sciemment payé le fournisseur sur les maigres ressources de la CENI, privant beaucoup de cadres de la structure de leurs salaires et autres indemnités de service. Aussi, les délégations régionales seraient à 4 mois sans salaire. Ainsi, il serait un total de 747 millions 900 mille F CFA pour lesquels aucun autre commissaire se semble avoir d’explication sur l’utilisation à l’exception des sieurs Bah et Cissé.
Selon les explications de Me Issiaka Sanogo, ces manquements et errements dans l’exécution du budget 2018 de la CENI ont été constatés lors de la plénière du 3 octobre 2018 à laquelle ont participé 14 des 15 membres de la CENI. Le président étant en déplacement. Cette plénière a alors souverainement décidé et conformément à son Règlement intérieur de la mise en place d’une Commission ad hoc. Cela à l’effet de caractériser les manquements et indisciplines budgétaires constatés.
Ainsi, après analyse des faits par la plénière, une audition des intéressés, la Commission ad hoc a caractérisé les griefs comme constitutifs de violation des principes de bonne conduite de la CENI.
En somme, eu égard à l’extrême gravité des fautes, la plénière du 22 octobre 2018 a décidé de retirer aux sieurs Bah et Cissé, leurs responsabilités, respectivement de président et de 1ier questeur de la CENI. Wait and see.
Dieudonné Tembely