Chronique satirique : Vers un scrutin bâclé par consensus ?

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Le scrutin du 28 juillet ne sera ni transparent ni juste. Mais il est demandé aux candidats de l’accepter pour les beaux yeux de la patrie. Y consentiront-ils ?

 

Bureau de vote au Mali. © Georges Gobet/AFP
Bureau de vote au Mali. © Georges Gobet/AFP

Le scrutin du 28 juillet ne se passera pas pour le mieux dans le meilleur des mondes. Le président de la Transition n’en doute pas. Il a convoqué, la semaine dernière à Koulouba, les candidats pour le leur dire de vive voix et entre deux yeux. Aux 10 candidats (sur 28) qui ont daigné interrompre leur campagne pour aller l’écouter là-haut, Dioncounda Traoré a clairement dit ce que je résume comme suit: “Il n’y a pas d’élection parfaite dans l’univers; la nôtre se fait sous la dictée de la communauté internationale car nous n’avons été capables ni de nous libérer des jihadistes armés ni  de financer le processus électoral. Nous n’avons pas non plus les moyens de prendre seuls en charge notre avenir. Nous vivons sous utelle étrangère. Donc, celui qui doit gagner va gagner; les autres sont priés, pour l’amour d’Allah et du Mali, de ne pas ruer dans les brancards !”.

 

 

Ce que Dioncounda Traoré dit là est d’une infinie sagesse mais un candidat battu, qui voit s’éloigner le festin et les boissons fraîches du palais, entend-il la voix de la sagesse? Ventre affamé n’ayant point d’oreilles, les propos du président ont toutes chances de tomber dans des oreilles de sourds. En tout cas, qu’il soit sourd, affamé ou muet, tout candidat, avant même d’être  candidat, a entendu le président français, François Hollande, répéter que la présidentielle malienne se tiendrait en juillet 2013 et que là-dessus, il se montrerait “intraitable”. Reprenant le micro à Hollande, le président ivoirien de la CEDEAO, Alassane Dramane Ouattara, a martélé que le respect du calendrier établi – juillet 2013 – est absolument nécessaire. Dans la foulée, MackySall, le chef de l’Etat sénégalais, a assuré urbi et orbi que le monde entier s’effondrerait si le Mali ne votait pas en juillet. Quand on lui a demandé si un vote pouvait se tenir avec des listes et des cartes électorales affreusement bidonnées, le premier des Wolofs a répondu  que le Mali revenait de trop loin pour se préoccuper de ces détails de luxe. Laurent Fabius, le ministre français des affaires étrangères, partage le même avis; selon lui, quels que soient la qualité et le niveau de distribution des cartes Nina, le scrutin aura lieu et le Mali devra se contenter du président qui aura raflé la majorité des votes effectifs. Aucune de ces hautes autorités ne conteste l’organisation défectueuse du scrutin mais toutes estiment qu’il vaut mieux avancer le nez dans guidons, sans se poser des questions. Après tout, laissent-elles entendre, le Mali n’a jamais été la Norvège et nous avons bien toléré, par le passé, des dictateurs fieffés. En clair, si le “Vieux Commando” a inventé  le consensus de la marmite, pardon !, le consensus politique, nous nous apprêtons à vivre, après lui,  un scrutin bâclé par consensus.

 

 

Sans être Nostradamus, l’antique devin, on peut prédire beaucoup plus de naufragés que de survivants. Le bâteau électoral malien prend, en effet, eau toutes parts sur une mer démontée et sous un ciel secoué de tonnerres. Le président de la CENI, Mamadou Diamountani, pour se dédouaner à l’avance du flop électoral qui se profile à l’horizon, commence à claironner que son institution ne peut remplir sa mission dans des délais si courts. Il rate une bonne occasion de se taire car ce n’est pas au moment où l’ennemi se trouve à nos portes  qu’il faut apprendre à tirer. Le même Diamounténé n’assurait-il pas à la télé, quelques jours après la chute du “Vieux Commando”, que 2 petits mois suffiraient à la CENI pour jouer tout son rôle? Et pourquoi 12 mois plus tard n’est-il toujours pas prêt ? Révolté que l’illustre personnage souffle ainsi le chaud et le froid, le colonel-ministre de l’Administration Territoriale, Moussa Sinko Coulibaly, a expliqué que la CENI, chargée d’une simple mission de  supervision, n’organise pas le scrutin qui, a juré l’officier, se tiendra bel et bien dans les délais prévus. Je m’attendais à voir le sieur Diamounténé démissionner sur-le-champ mais il n’en fit rien. Du coup, il perd toute possibilité de justification après le vote.

 

 

Pourquoi donc cette précipitation générale à organiser vaille que vaille le scrutin en juillet ? Les raisons sont multiples. La France, qui a botté le train aux jihadistes du nord-Mali, en a marre de supporter le fardeau d’une guerre qui lui coûte un million d’euros – 650 millions de FCFA- par jour alors que son économie bat de l’aile. L’ONU, qui a décidé de prendre le relais de la valeureuse France, est une démocrate très sourcilleuse: elle ne veut pas traiter avec “un régime issu du putsch” du 22 mars. Par cette diplomatique expression, l’ONU vise non seulement l’ex-junte militaire mais aussi le président et le gouvernement de Transition, autorités qui n’auraient pas pris le pouvoir sans le putsch et qui, d’ailleurs, ne refusent pas grand-chose au capitaine Sanogo. A l’instar des Américains, les autres bailleurs de fonds veulent voir la tête du nouveau président malien avant de desserrer les cordons de la bourse. Enfin, tout ce beau monde juge inutile d’aider notre pays tant qu’il n’aura pas fait la paix avec les rebelles touaregs; or lesdits rebelles, se sachant couvés par les puissances occidentales, refusent de négocier avec un  régime de Transition appelé, à bref délai, à débarrasser le plancher…

 

 

Bref, on revient à ce que Dioncounda Traoré a déclaré aux candidats : un président sera “élu” à travers un scrutin bidon; mais prière de ne pas le contester ! Problème : certains candidats se croient déjà élus; quand ils apprendront leur défaite, il risquent fort de piquer un infarctus du myocarde.D’autres candidats sont trop âgés pour se permettre de rater le coche encore une fois : il leur faudra alors attendre 2024, fin du second mandat du futur président, pour prendre leur revanche; or Allah n’a  signé avec personne, candidat ou non, un contrat de survie à durée indéterminée sur la terre ! Certains autres candidats en ont assez de tirer le diable par la queue depuis l’avènement de cette foutue démocratie; s’ils n’étaient pas élus cette fois-ci, ils pourraient bien crever de faim avant 2024. Quelques candidats ont dû s’endetter auprès des parents, amis et  et connaissances pour payer les 10 millions de caution et acheter la signature des 10 députés réquis pour  le parrainage; qui va rembourser ce pactole en cas de défaite ? En somme, il y a trop d’intérêts personnels liés au scrutin de juillet. Les incantations et les prières ne permettront pas, à mon humble avis, de calmer les passions des vaincus.

 

 

Si l’on veut vraiment que l’élection soit “apaisée”, je suggère que les députés votent tout de suite, en session extraordinaire, un fonds dit d’“apaisement  électoral”. Constitué de 0,2% du budget d’Etat 2014, il servira à indemniser les candidats battus au scrutin du 28 juillet. Les plus vieux, qui n’ont plus de chances de se rattraper dans l’avenir, auront une part plus importante que les plus jeunes. Les plus populaires auront une meilleure part que ceux qui sont venus, en réalité, amuser la galerie. Mais tous les vaincus émargeront au fonds. Bien entendu, pour en bénéficier, tout candidat battu doit éviter toute protestation publique et, surtout, toute contestation de rue. Le candidat battu qui décide de s’exiler immédiatement, et sans bruit, à Dakar gagnera une prime spéciale qui lui sera remise, dès son arrivée à l’aéroport de Dakar Yoff, par le “Vieux Commando” en personne. Vous trouvez ce fonds d’apaisement électoral injustifié ? Eh bien, l’est-il plus que la caisse noire du chef de l’Etat, les indemnités des anciens présidents ou l’aide publique annuelle à des partis politiques dont les militants tiendraient dans une boutique ? Je ne le crois pas. Et puis, je vous le garantis, le fonds d’apaisement a d’autant plus de chances d’atteindre son objectif que les candidats craignent comme la peste le bâton des policiers et que les militants  auront déjà épuisé les sacs de mil et de riz gagnés pendant la campagne électorale.

 

Tiékorobani

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4 COMMENTAIRES

  1. Noud disons et rappelons tel le Molosse ces lettrés mutants politiques maliens à l’instar de leurs homologues lettrés mutants africains ne peuvent jamais et ne pourront jamais changer leur « déhontée façon » de s’asseoir de se comporter à savoir organiser des élections bâclées truquées et ils sont encouragés en cela par leurs soit disant amis les « Autres » qui disent avec mépris de par leurs comportement que le malien l’africain n’est pas mûr pour la vraie démocratie et

    Nous disons bien que des élections bâclées truquées sont bonnes pour le malien l’africain dans 1pays divisé en 2 le gouvernement légitime d’1part et des ramassis de voyous d’autre part avec 1partie importante de la population réfugiée hors du pays et

    Nous disons bien qu’il ne peut pas avoir d’élections parfaites au sortir d’1guerre au Mali en Afrique et

    Nous disons bien que les crises post électorales avec tueries violes des pauvres citoyens lambda sont bonnes pour les maliens les africains choses qu’ils ne vont jamais accepter faire chez eux car dans 1vraie démocratie personne n’est au-dessus de la loi

    Nous disons et rappelons que les Etats Unies des Georges Washington ont organisé des élections correctes parfaites transparentes au sortir de leurs guerres Il en est de même de la France de l’Allemagne de l’Ouest au sortir de la 2ème guerre mondiale

    Nous disons et rappelons depuis que l’humain est sur cette terre au sortir de n’importe quelle élection qui s’est déroulée qui se déroule qui va se dérouler de façon correcte parfaite et transparente les candidats ont toujours accepté acceptent toujours et accepteront toujours le verdict

    Nous disons et rappelons depuis que l’humain est sur cette terre au sortir de n’importe quelle élection qui s’est déroulée qui se déroule qui va se dérouler de façon incorrecte imparfaite et non transparente les candidats ont toujours refusé refusent toujours et refuseront toujours le verdict

    Nous disons et rappelons donc que les candidats « Dion » ne sauraient donc faire exception à ces principes

    Nous disons « diantre » avec ces lettrés mutants africains politiques Hommes en armes sociétés civiles religieux usurpateurs sans vergogne du titre « d’intellectuels » l’Afrique ne peut qu’évoluer dans la soumission totale aux « Autres » dans la médiocrité de la démocratie bananière des tropiques du pouvoir clanique de l’impunité reine de la « bouffaille » des deniers publics de la pourriture de la cupidité et de la corruption des élections bâclée truquées pour conserver le pouvoir héritage du recevoir exclusif financier et dons de leurs soit disant amis les « Autres » dont ils sont si friands

  2. Un communicateur ne doit pas envenimer une situation. Revois ton analyse s’il vous plait. C’est n’est pas digne d’un journaliste.

  3. Il faut tout faire pour voter le 28 juillet prochain, comme ca à défaut de sortir de la crise nous rapprocherons de la porte de sortie de crise.
    C’est la seule solution pour nous débarrasser de ces autorités de transition qui sèment le désordre dans tous les domaines au Mali.
    Si possible votons avant le 28 juillet même. trop c’est trop

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