L’organisation de cours privés « spéciaux » à l’approche des examens à la Faculté des sciences juridiques et politiques (FSJP) n’est pas de nature à faire honneur à l’enseignement supérieur.
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La création de l’Université de Bamako avait suscité un engouement certain dans les milieux scientifiques : plusieurs filières ayant été créées, la Faculté des sciences juridiques et économiques, scindée plus tard en Faculté des sciences juridiques et politiques (FSJP) et en Faculté des sciences économiques et de gestion, née des cendres de l’ex-ENA. La FSJP a l’exaltante mission de former de hauts cadres du pays.
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Cependant, cette mission aujourd’hui risque d’être compromise par des pratiques qui déshonorent l’enseignement supérieur. Le hic, c’est que celles-ci viennent de certains professeurs qui doivent pourtant prêcher par le bon exemple. L’une des pratiques courantes aujourd’hui à la FSJP est l’organisation de cours privés, dits « spéciaux ». Comment comprendre l’organisation de cours privés spéciaux à l’intention d’étudiants à raison de 5000 F CFA ou de 10 000 F CFA par étudiant à quelques encablures des examens de fin d’année ? Inadmissible rétorquent des étudiants.
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« Pour rentrer dans les faits, hier nous étions en examen partiel en procédure pénale. Le professeur qui dispense ce cours avait pris, cinq jours auparavant, 5000 F CFA avec des étudiants pour leur donner le sujet qu’il allait proposer à l’examen. Effectivement, il a donné in extenso le sujet », confirment certains.
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Aussi, contre toute attente et contre tout bon sens, le professeur chargé de cours de procédure pénale en classe de 2e année de droit a proféré des menaces à l’encontre des étudiants qui ne se seraient pas inscrits à son cours privé « spécial ». Comme quoi, il leur attribuera une note dérisoire au moment de la notation. Cette mise en garde, il l’a fait aux étudiants des 1re et 2e années de droit. La messe est donc dite. Tous ceux qui se sont abstenus pour une raison ou une autre de donner suite à sa « proposition » risquent de l’apprendre à leurs dépens.
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Il nous est revenu que le professeur est tout de même parvenu à remplir l’amphi 2000 en se faisant des millions sur le dos de pauvres étudiants. Il faut dire qu’il n’est pas le seul à s’illustrer éloquemment dans la dispense des cours privés « spéciaux ». « En comptabilité générale également, notre professeur a procédé de la même manière. Il a pris 3000 F CFA avec les étudiants et leur a dévoilé le sujet d’examen », témoigne une source.
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Tout porte à croire que l’objectif recherché n’est pas le renforcement du niveau des étudiants qui ont passé une année universitaire plus ou moins normale, mais, tout simplement d’une corruption qui ne dit pas son nom surtout que ceux qui participent à ces cours sont généralement ceux qui ont les meilleures notes en classe. Les inscrits sont identifiés à travers une liste nominative.
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A tous égards, cette pratique est déplorable d’autant qu’elle consacre l’inégalité entre les étudiants nantis et ceux qui ne le sont pas. De ce fait, le mérite et la compétence ne deviennent plus des critères de l’excellence, mais il faut également l’argent.
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Des langues qui se délient dans le milieu des professeurs à la FSJP souhaitent aujourd’hui une interdiction pure et simple des cours privés « spéciaux » et la suspension de leurs collègues qui s’y adonnent et qui, selon eux, souillent cette noble profession. « Cet acte de la part de certains de nos collègues est honteux parce que l’enseignement supérieur doit favoriser la promotion de l’intelligentsia. C’est un milieu scientifique qui doit tenir uniquement compte de la valeur intrinsèque des étudiants sans faire de distinction. Dans ce cas, tout acte qui serait de nature à favoriser certains étudiants par rapport à d’autres serait contraire au principe d’égalité consacré par notre Constitution », s’indigne un professeur de la FSJP.
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Voyant d’un très mauvais œil l’organisation de cours spéciaux privés à l’approche des examens, notre interlocuteur s’interroge : « le professeur qui tend la main à ses étudiants peut-il affirmer son indépendance par rapport à ceux-ci » ?
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Du côté de certains parents d’élèves, l’inquiétude sur l’avenir de leurs enfants est réelle. « Je suis inquiète de l’avenir de nos enfants qui, désormais, n’utiliseront plus leur intellect pour réussir mais passeront par des chemins tortueux », regrette une mère de famille, qui interpelle les autorités compétentes ainsi que le comité AEEM afin qu’ils cultivent l’excellence dans les Facultés en mettant dehors les professeurs mus par l’appât du gain facile.
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Beaucoup s’accordent à dire que l’organisation des cours privés pouvait être une bonne chose si les sujets n’étaient pas dévoilés. Aujourd’hui, il ne s’agit plus de se contenter d’une simple condamnation verbale, mais il faut agir contre le fait de dévoiler les sujets moyennant espèces sonnantes et trébuchantes.
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Mohamed Daou
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