Système éducatif malien : Des défis majeurs à relever

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Si la poursuite du développement de la scolarisation est un enjeu majeur pour les années à venir, d’autres défis sont à relever en matière de traitement des inégalités d’accès à l’école mais aussi de contrôle de la qualité des enseignements dispensés et du niveau des diplômes délivrés.

ENCADREMENT SCOLAIRE ET NIVEAU DE FORMATION
Le développement de l’offre scolaire s’est fait sans augmentation significative des effectifs dans la Fonction publique. Il s’est appuyé d’une part, sur les structures privées (notamment les écoles communautaires villageoises), d’autre part sur une réorganisation du temps scolaire dans les écoles publiques et un allègement du programme scolaire.
Le système de la <<double vacation>> s’est développé en milieu urbain, sous la forme de l’encadrement de deux classes par un même enseignant, l’une étant scolarisée le matin, l’autre l’après-midi. Le nombre d’élèves par enseignant a significativement augmenté jusqu’en 1990, la moyenne dans l’enseignement fondamental n’avait jamais dépassé 45, en 2001, elle était de 61 élèves (d’après la Cellule de Planification Statistique du ministère de l’Education Nationale. Et depuis lors, cette moyenne est en pleine augmentation.

DES DISPARITES IMPORTANTES
Cette moyenne masque cependant des disparités importantes. Il n’est pas rare que le ratio élèves/maîtres dépasse 100 dans les premières classes de l’Enseignement Fondamental, notamment dans les écoles villageoises.
Le mode de rémunération des enseignants des écoles communautaires, généralement proportionnel au nombre d’élèves (les parents remettant à l’enseignant une contribution par enfant scolarisé), l’importance de la demande et le manque de candidats aux postes d’enseignants en brousse, sont autant de facteurs qui contribuent à la surcharge des classes.

Par ailleurs afin d’augmenter le rendement scolaire dans l’enseignement du premier cycle, un système de quota, limitant le taux de redoublement à 15%, remplace désormais l’évaluation sur résultats dans la gestion de la progression scolaire.

Les aménagements adoptés pour permettre le développement de la scolarisation ne sont donc pas sans risque sur le niveau de la formation dispensée et des diplômés.

La principale limite de la politique de scolarisation tient probablement à sa mobilisation sur les objectifs de réussite essentiellement quantitatifs. Cette priorité est elle-même à rapporter aux exigences des bailleurs internationaux, qui subordonnent la poursuite des financements à la réalisation de résultats quantifiables.

INEGALITES ENTRE SEXES
Les choix éducatifs des familles maliennes se sont toujours faits en faveur des garçons. Au début des années soixante, on comptait à peine 2 filles scolarisées pour 5 garçons et le rapport était d’une pour cinq au niveau du secondaire. Ces écarts se sont nettement réduits depuis mais restent considérables et se creusent à mesure que l’on avance dans le niveau de formation.

Non seulement les filles sont envoyées bien moins souvent à l’école que les garçons mais elles interrompent aussi leur scolarité beaucoup plus tôt. A la fin des années quatre vingt dix, l’accès à l’école des filles était encore inférieur de 30% par rapport à celui des garçons et il était deux plus faible au secondaire.

INEGALITE REGIONALE
Les différences de scolarisation sont également marquées en fonction du milieu de résidence. Le taux net de scolarisation primaire (1er cycle fondamental) est deux fois plus élevé en ville qu’en milieu rural (64% contre 31% en 2001) et les écarts sont encore bien plus marqués (de 1 à 9) aux niveaux supérieurs. La capitale détient le record avec un taux de scolarisation primaire de 76%.

Ces différences tiennent en partie aux écarts de motivation des familles à envoyer leurs enfants à l’école mais aussi aux inégalités dans la disponibilité des structures scolaires qui conduisent les familles à renoncer à la scolarisation de leurs enfants ou à les envoyer poursuivre leur scolarisation en ville.

Malgré le développement des écoles communautaires, les inégalités régionales restent importantes. Les régions de Mopti et Kidal ont les niveaux de scolarisation les plus faibles, les régions de Koulikoro et Gao ont les niveaux les plus élevés, les autres régions se situant en position intermédiaire.

LA NOUVELLE ECOLE FONDAMENTALE
Les structures scolaires existantes et le budget de l’Etat ne sont pas de taille à porter un véritablement développement de la scolarisation, les acteurs de la société civile sont mis à contribution. L’enseignement privé qui s’exerçait jusqu’alors dans un flou institutionnel sans réglementation précise est reconnu en juillet 1994.

Les établissements d’enseignement privé peuvent désormais conclure des conventions particulières avec l’Etat et bénéficier le cas échéant, d’un soutien pour l’acquisition de terrains pour la réalisation d’infrastructures scolaires. Plus généralement, l’Etat s’engage à mettre à la disposition des partenaires de l’école, selon ses possibilités, des moyens financiers, humains et matériels, il veille sur les programmes et l’organisation des examens et contrôle le respect des normes légales par les écoles et établissements privés.

Les frais de scolarité sont libres dans le privé, l’enseignement public restant intégralement financé par l’Etat. Les écoles communautaires sont une composante essentielle du dispositif de refondation du système scolaire. Ces écoles privées créées, gérées et financées par les communautés, notamment villageoises, ou des associations bénéficient de la reconnaissance et du soutien (matériel scolaire, soutien pédagogique, formation des enseignants) de l’Etat dans le cadre d’une réglementation particulière.

Elles jouent un rôle essentiel dans la relance de la scolarisation des enfants en milieu rural. Relevant de l’initiative et de la responsabilité des communautés, mises en oeuvre dans un contexte de décentralisation et de climat politique apaisé, elles permettent aux populations de réinvestir le projet d’école et sont largement adaptées compte tenu de leur coût.

Ces nouvelles écoles offrent par ailleurs un débouché aux jeunes diplômés revenus au village et contribuent ainsi à une revalorisation de l’investissement éducatif. La nouvelle politique de scolarisation porte ses fruits, on assiste à une véritable explosion de la scolarisation au cours des années quatre-vingt-dix.
Au sein des générations atteignant l’âge de scolarité en 1998, la moitié des garçons et plus d’un tiers des filles entrent à l’école, contre respectivement un tiers et un cinquième dix ans plutôt.

La scolarisation dans le secondaire (après le DEF) connaît partout un niveau bien plus bas, une augmentation tout aussi considérable : elle concerne à la fin des années quatre vingt- dix, un cinquième des garçons.
Mamoutou DIALLO (Stagiaire)

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