La rentrée scolaire 2017-2018, initialement prévue le lundi 9 octobre, aura certainement lieu sans une grande partie des écoles du centre et du nord du pays. Selon un rapport d’Amnesty International, l’insécurité empêche plus de 150 000 enfants d’aller à l’école.
Mali: Violations and abuses as instability spreads. C’est le nouveau publié vendredi 22 septembre par Amnesty International. Selon ce rapport, plus de 150 000 enfants ne peuvent pas aller à l’école en raison du manque de sécurité dans le nord et le centre du Mali.
En effet, depuis juin 2017, plus de 500 établissements scolaires étaient fermés dans les régions où des groupes armés sont actifs, notamment celles de Gao, Kidal, Ségou, Mopti et Tombouctou. Certains, en particulier dans le centre du pays, ont été forcés à fermer après que des membres de groupes armés ont menacé leur personnel.
«Des dizaines de milliers d’enfants paient le prix fort dans un contexte où la violence et l’insécurité persistent dans le nord et s’étendent à présent au centre du Mali. La privation de leur droit à l’éducation a atteint un seuil critique. Cela doit cesser», a déclaré Gaëtan Mootoo, chercheur sur l’Afrique de l’Ouest à Amnesty International.
Le rapport attire par ailleurs l’attention sur les conditions de détention effroyables à la prison centrale de Bamako et dans d’autres prisons en dehors de la capitale. Lors d’une visite de la prison de Bamako, en avril 2017, les autorités carcérales ont indiqué à Amnesty International que 1 200 personnes y étaient détenues et devaient dormir à tour de rôle en raison de l’espace limité. Cette prison a une capacité de seulement 400 détenus.
Amnesty International a confirmé que les conditions à la prison centrale de Bamako ne s’étaient pas améliorées depuis ses dernières visites, en 2013 et 2014. À titre d’exemple, aucune des personnes arrêtées et inculpées d’actes terroristes depuis 2013 n’est autorisée à faire de l’exercice en dehors des cellules, qui sont surpeuplées et mal ventilées.
En novembre 2015, des groupes armés ont tué 19 civils lors du siège de l’hôtel Radisson, à Bamako, au cours duquel plus de 150 personnes ont été prises en otage. Celles-ci ont été libérées lorsque les forces de sécurité sont intervenues. Amnesty International a été informée par des organisations travaillant sur le terrain au Mali qu’au moins 15 personnes, de nationalité malienne ou étrangère, sont actuellement retenues en otage par des groupes armés.
Depuis le début de l’année 2017, les attaques commises par des groupes armés dans le centre et le nord du pays sont en augmentation, y compris celles visant des imams, des chefs de village et des représentants de l’État, et ont donné lieu à de nombreuses atteintes aux droits humains et violations du droit international humanitaire.
Le 18 janvier 2017, Al Qaïda au Maghreb islamique (AQMI) a attaqué le camp du Mécanisme opérationnel de coordination à Gao. Plus de 70 personnes ont été tuées, dont des civils. Le 18 juin 2017, quatre civils ont été tués au cours d’un attentat contre un hôtel de la périphérie de Bamako perpétré par le Groupe de soutien à l’islam et aux musulmans (GSIM), un autre groupe armé.
En 2013, à l’issue du dernier EPU concernant le Mali, celui-ci a accepté la recommandation qui lui a été faite par le Conseil des droits de l’homme d’amener les groupes armés à rendre des comptes pour les graves atteintes aux droits humains. Cependant, la situation n’a guère progressé.
L’impunité persiste pour les atteintes aux droits humains et les violations du droit international humanitaire, telles que les homicides, la torture et les pillages, surtout lorsqu’elles sont commises dans le cadre du conflit actuel. Par conséquent, les victimes et leurs proches ne peuvent obtenir vérité, justice et réparation.
Amnesty International appelle les autorités maliennes à créer la commission d’enquête internationale prévue par l’accord de paix d’Alger. Cette commission devra mener des enquêtes efficaces dans les meilleurs délais sur les allégations faisant état d’exécutions extrajudiciaires, de disparitions forcées et d’autres crimes de droit international commis par des forces de sécurité maliennes et des groupes armés.
«Une situation où des personnes soupçonnées d’être responsables de graves atteintes droits humains ne sont pas amenées à rendre des comptes serait désastreuse pour un pays qui peine à mettre fin à un conflit ayant occasionné des violences atroces dans les régions du nord et du centre», a déclaré Gaëtan Mootoo.
La 29e session du Groupe de travail sur l’EPU du Mali se déroulera en janvier 2018. Le Mali a accepté 111 recommandations lors de son EPU de 2013, dont celles d’initier l’interdiction des mutilations génitales féminines (MGF), de protéger les enfants du recrutement par des groupes armés, et d’enquêter sur les exécutions extrajudiciaires. Il a toutefois rejeté 14 recommandations, notamment celles prévoyant des enquêtes sur les allégations d’exécutions extrajudiciaires et de torture de Touaregs aux mains des services de sécurité de l’État.
Zan Diarra
Soleil Hebdo