Depuis le début des années 90, le système éducatif malien souffre énormément de plusieurs maux. On n’y constate une baisse de niveau chez les enseignants comme chez les élèves, notamment dans les écoles privées. Parmi les facteurs qui peuvent expliquer ces fléaux, il y a notamment le recrutement des enseignants. Pour comprendre l’ampleur du problème, Le Pélican a discuté avec des professionnels du métier. Ils ont quasiment tous voulu rester dans l’anonymat. La synthèse !
D’après l’Article 11 de la Loi 94-032 AN RM, Statut de l’enseignement privé au Mali : « Les établissements d’enseignement privé reconnus d’utilité publique par l’Etat sont astreints aux règles générales d’organisation matérielle et pédagogique, de gestion et de contrôle appliquées aux établissements publics correspondants notamment en ce qui concerne le recrutement, la gestion et l’utilisation du personnel enseignant ».
Donc en clair, « les profs d’enseignement secondaire doivent être recrutés, par concours direct, prioritairement, parmi les candidats titulaires d’un diplôme des grandes écoles de formation d’enseignants ou au besoin, parmi les candidats d’un diplôme universitaire national ou étranger, spécialisé dans les disciplines d’enseignement secondaire général, technique et professionnel et dans les disciplines d’enseignement normal, correspondant à la catégorie A des fonctionnaires ». Cette orthodoxie est-elle vraiment respectée dans le recrutement des enseignants au Mali ?
Le métier de l’enseignement, de façon générale, est devenu au Mali un métier sans considération et sans valeur. Alors que normalement, c’est un métier sensible comparable à celui du médecin qui n’admet pas d’erreur. Donc qui demande de la perfection. Selon l’écrivaine et l’enseignante Mariama BA: « Déformer une âme est aussi sacrilège qu’un assassinat ». N’est-ce pas une façon pour elle d’admettre que l’enseignement n’est pas un métier qui doit être ouvert à tout le monde ?
Mais n’est hélas pas le cas au Mali. Dans notre pays, beaucoup d’établissements privés ne respectent pas l’esprit de la Loi 94-032 AN RM, Statut de l’enseignement privé. Le recrutement dans nos écoles privées ne répond pas à la norme. Aujourd’hui, 80% des écoles privées recrutent les enseignants sans tenir compte ni de leur formation académique, ni de leur capacité pédagogique. Donc sans aucune rigueur pour l’exercice de ce métier. Cela a permis le recrutement de plusieurs pseudos enseignants. Le milieu scolaire est devenu un tremplin propice pour la recherche de l’argent mais non pour la transmission du savoir. Très souvent, les personnels chargés de recrutement dans ces écoles privées ne font pas preuve de compétence. En outre sans annonce, le recrutement se passe par plusieurs canaux non professionnels sans prendre en compte le niveau de l’enseignant (bagage intellectuel et pédagogique) : le lien de parenté, le lien amical, et de lien de connaissance suffisent. L’efficacité et la performance des demandeurs d’emploi (l’enseignant) ne sont pas jugés. Alors que même être diplômé ne signifie pas que l’on peut forcement enseigner. On peut être diplômé mais ne pas avoir la capacité pédagogique d’enseigner.
C’est ce genre de recrutement, fondé sur le réseau d’amitié et des liens familiaux, qui favorise : le népotisme dans le milieu scolaire, le déséquilibre de salaire, pour rendre plus misérable et vulnérable les conditions sociales des enseignants. Ce genre de recrutement ne fait pas aussi la promotion de la méritocratie. Car, les enseignants non qualifiés remplacent ceux qui sont réellement qualifiés.
Plus grave est que l’on note dans le système éducatif privé, une absence de formation interne et continue. Puisque les écoles privées n’élaborent aucune initiative pour organiser des séminaires de formation dans le but de rendre plus performants leurs enseignants peu qualifiés qu’elles recrutent. Dans la plupart des cas, l’on recrute ces enseignants parce qu’ils sont moins chers. Ces faits impactent négativement le système éducatif, plus particulièrement sur l’apprenant (l’élève) mais aussi sur les conditions sociales des enseignants. Puisque au finish, l’apprenant n’aura pas de niveau. Or, quand l’enseignant n’est pas performant, l’apprenant ne le sera pas non plus.
Au vu et au su de tous ces fléaux dont souffre le système éducatif privé, l’on peut déduire que les écoles privées n’aident pas l’Etat a bien formé les enfants. Au contraire, l’on peut affirmer que ces écoles sont créées simplement à des fins commerciales. Les inspecteurs de l’éducation nationale, chargés pour le suivi des écoles privées et le respect des textes, ne font rien pour moraliser le système éducatif privé. Les enseignants enquêtés affirment que, chaque année, 90% des écoles privées ne sont pas inspectées ou mal inspectées. Alors que les inspections de travail ne font pas aussi leur boulot.
L’état malien doit donc s’assumer, en contraignant les inspections de l’éducation et de travail à faire correctement leur travail. Il doit obliger les écoles privées à s’investir dans la formation des enseignants, notamment ceux qui n’ont pas fréquenté des écoles de formation d’enseignants. Quant aux parents d’élève, ils doivent s’impliquer à ce que les enseignants du privé soient constamment évalués par les inspecteurs de l’éducation nationale. Bref, que tout le monde s’implique dans la gestion des écoles privées ! Cela, pour un meilleur avenir de nos enfants !
Synthèse de Boubacar Bani Traoré
J’aime partager ma connaissance avec les élèves
Pourtant au DEF et au BAC, se sont les écoles privées qui ont les meilleurs taux de réussite. Il faut pas saboter les écoles privées pour le simple plaisir de les saboter.
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