Dans le récent bulletin de la CASCA les termes sont clairs en ce qui la gestion de l’université de Bamako au titre des années 2007-2008 et 2008-2009. Ils recommandent “la transmission aux autorités judiciaires des rapports ci-après : (…) audit de la gestion des ressources propres de l’université de Bamako (UB) et des grandes écoles; audit de la gestion des heures supplémentaires de l’université de Bamako et des grandes écoles…
La cellule d’appui aux structures de contrôle de l’administration (CASCA) vient de publier son bulletin 2010. Comme son nom l’indique, ce document est la compilation de tous les rapports des autres structures de contrôle. Pour ce qui concerne la cuvée 2010, force est de reconnaître qu’elles sont nombreuses les structures qui sont épinglées dans ce bulletin. Nous évoquions en début de semaine les faits reprochés à certaines Daf de certains départements, telles que le ministère de la Santé, celui du Travail ; les agissements du greffier en chef du tribunal administratif, les faits reprochés à la trésorerie de Sikasso etc. Nous publions aujourd’hui certaines pratiques peu orthodoxes au niveau de l’université de Bamako entre 2007 et 2009 au moment où l’actuelle ministre de l’Enseignement supérieur était aux affaires.
Mme Siby Ginette Bellegarde, faut-il le rappeler, n’a été nommée ministre qu’en 2008 avec le réaménagement gouvernemental qui a vu le départ de Mme Sidibé et du ministre Touré. La première période dont il est question dans le bulletin concernant l’année scolaire 2007-2008 est celle pendant laquelle Mme Siby était recteur de l’université de Bamako. Il s’agit donc de sa gestion, qui est explicitement dénoncée dans ce bulletin au point que ses rédacteurs aient recommandé la transmission du dossier aux autorités judiciaires.
Gestion catastrophique des ressources de l’université et des Grandes Ecoles ?
Le bulletin évoque pêle-mêle l’inexistence de réglementations relatives aux frais de cartes d’étudiants, de prestations diverses et pédagogiques perçues à l’institut universitaire de gestion (IUG) et à la Faculté de médecine, de pharmacie et d’odontostomatologie (FMPOS) ; le non respect des règles relatives aux procédures d’exécution des dépenses publiques, d’acquisition des biens et services et de gestion du matériel; la mauvaise tenue du fichier central des étudiants due à l’insuffisance des données fournies par les services-scolarité des facultés et instituts.
De même il relève l’inexistence de manuel de procédures administratives, financières et comptables ; le non respect des périodes d’inscription en violation de l’article 52 de l’arrêté n°08-2582/MESSRS-SG du 15-09-08 portant règlement intérieur de l’université.
La Casca souligne par ailleurs d’un trait rouge l’inexistence de bons d’achat, d’attestations de service, de procès-verbaux de réception au niveau des grandes écoles ; l’inexistence de statut juridique des grandes écoles ; la non maîtrise des effectifs des étudiants se manifestant par l’existence d’écarts de : 4691 en 2007-2008 et 6796 en 2008-2009 entre les nombres d’étudiants au niveau des services-scolarité des facultés et instituts et ceux du service-scolarité et orientation du rectorat ; 1136 en 2008-2009 entre le nombre d’étudiants réguliers fournis par les facultés et instituts et celui du centre national des œuvres universitaires (CNOU). Le même scénario a été observé en 2008-2009 où l’écart est de 210 entre les effectifs fournis par l’école nationale d’ingénieurs Abdrahamane Baba Touré et l’IPR-IFRA et les effectifs du CNOU.
En ce qui concerne toujours la gestion de l’université de Bamako au moment où Mme Siby était recteur, la Casca a noté des impayés de 99.914.000 FCFA au titre des cartes d’étudiants au niveau de l’UB, ainsi que d’autres impayés d’un montant de 54.740.000 FCFA et 31.527.250 FCFA au titre des frais d’inscription respectivement à l’IPR-IFRA et l’ENI-ABT. Il est aussi question de la non-comptabilisation de 14.806.545 FCFA de recettes du centre de formation continue de l’IPR-IFRA et 21.309.050 FCFA de recettes de la ferme agro-sylvo-pastorale, 10.109.530 FCFA de recettes de l’unité d’études et de production à l’ENI-ABT. Plus grave encore, il existe un écart de 121.542.700 FCFA entre les montants des ressources propres effectivement recouvrés et ceux mis à la disposition des structures par le recteur de l’université et des dépenses de 360.593.683 FCFA sans le visa du contrôle financier.
Le business des heures supplémentaires
La Casca nous l’apprend, les heures supplémentaires sont aussi un moyen de se faire beaucoup d’argent et qu’elles sont gérées de manière très opaque. A l’Ensup (Ecole normale supérieure) par exemple, il est fait cas du paiement indu de 64.528.000 FCFA en heures supplémentaires pour l’encadrement des stages pratiques; le dépassement des quotas réglementaires d’encadrement de mémoires supplémentaires pour 5.166.000 FCFA en 2007-2008 et 9.396.000 FCFA en 2008-2009; le paiement d’heures supplémentaires de cours sans existence de besoin dans certains départements d’études et de recherches (DER) pour 18.496.000 FCFA en 2007-2008 et 32.169.250 FCFA en 2008-2009. Pour ce qui concerne la Faculté des lettres, langues, arts et sciences humaines, le bulletin de la Casca retient l’inexistence de règlement intérieur, de cahiers de textes et de textes de création de certains DER ; le dépassement du quota d’encadrement supplémentaire pour 198.144.000 FCFA en 2007-2008 et 267.732.000 FCFA en 2008-2009.
De tout ce qui précède un questionnement s’impose quant à comment Mme Siby après cette gestion a pu être ministre. Et si elle sera interpellée et quand ? Les faits dans le bulletin sont très clairs. Sous son mandat, ce sont des milliards qui se sont dilapidés entre les frais d’inscription, les dépenses fantaisistes sans l’avis du contrôle financier, les impayés au titre des frais d’inscription, le détournement des ressources propres de l’université non reversées aux structures du rectorat etc.
Nous y reviendrons.
Moussa Touré